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boudi's blog
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13 mai 2009

Papa est mort.

Papa est mort. Il a avalé cent huit somnifères. Le réveil est éteint. Papa les a accumulés au fond du verre. Le whisky ne dissout pas la solitude. Ni la douleur. Papa est mort. On m'a appelé. Je buvais soutenu par la nonchalance, un peu de légèreté. J'ai demandé cinq verres de fête, pour infuser la nuit dans mon corps, qu'elle recouvre la surprise et l'étouffe. Cinq petits verres à renverser mettant un bandeau au regard de la douleur. Je n'ai qu'un permis pédestre. Une autorisation d'errance. Ok, Papa est mort. Et après. Cent mille licenciements prévus. Cent mille morts à crédit,  cent mille désespérés et combien de pendus à dix huit pour cent taux variable selon la conjoncture économique, dans nos châteaux blindés, nos coffres tremblés. La rue s'allonge et le soir grogne. C'est le crépuscule qui s'annonce dans le ciel délayé, les couleurs affadies, la foule vomie, étourdie. La nuit enveloppe déjà tous les bruits de la ville, déploie ses divertissements au néon dans les cafés et les bars. La musique gronde. La lumière compense On ne s'entend pas, se voit pas à peine. Les gens s'endurent et ne se supportent pas, s'effleurent sans se toucher. Les contacts sont gantés, hygiéniques. Je m'assieds. Pour capter le bruit. Ce sera ma cartouche. J'écoute. On formule du bruit à gauche. A droite aussi. Le langage c'est un bruit qui ne pense pas, une excuse pour meurtrir le silence, qui effraie. La musique s'interpose. Juste au cas où. Mauvaise. Mes jambes en terrasse. Chauffée. Faut bien entretenir toutes ces petites usines humaines qui fument, expirent. Ca rassure sur l'état économique. Demain on aura qu'à titre "La relance en terrasse". Je suis tout seul, à vomir des lettres. J'aurais aimé voir à quatre yeux, autour de moi que du bruit. Mes lunettes sont perdues. Merde. Peignons myope. On danse je crois. Une vieille croute montmartienne, musette en mini-jupe. Les solitudes ricochent, pas de deux, l'oubli se ménage. Il faut bien vivre. Je suis rue Descartes, maintenant. Pour causer aux grands hommes. Chacun son tombeau. Rousseau. Il en a des choses à raconter depuis l'enfer. Maman veut savoir où je suis. Sur répondeur. Dommage, ici le parfum de l'Histoire, du bois pourri. Personne pour fouiller le creux de la nuit. Quand elle remonte sa braguette, qu'elle éjacule ses flèches argentées, personne pour voir. La nuit tien des prisonniers. Les gens passent sans les voir, les meurtris. La symétrie est la beauté des architectes. Faut croire qu'ils sont tous un peu oeuvres, bâtiments, tous parallèles à coïncider. Sourire, maquillage, jupe, jeans, pantalons. Ce doivent être des esthètes, pas moi. Je garde le cheveu fou. Ca évite de se confondre, de s'esquinter. Ca préserve un peu de toutes les renonciations commodes, de toutes les habitudes à l'échec.

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Commentaires
B
Je ne sais pas. Pour moi l'artiste est obsédé, il faut qu'il soit obsédé. Obsédé par la forme, le style, la technique. C'est essentiel et loin d'être suffisant, il faut avoir conscience de cette nécessité. Pour autant l'acte de création n'a pas à être habité par cette obsession, et je pense que l'on est d'accord, elle peut être inconsciente. La création suffit à la création, à transcrire une émotion à travers une technique qui n'est qu'un outil inconscient. Si j'écris (pas toujours) je ne réfléchis pas, j'écris et c'est comme de jouir, je n'y prends pas garde. Si c'est hanté par la forme c'est parce que je suis hanté par la forme.<br /> <br /> Je pense qu'il y a deux moments, deux mouvements. Une sorte de préalable à l'écriture qui serait l'obsession formelle, l'exercice, comme le peintre qui effectuerait des mouvements de poignet pour s'assurer de sa dextérité. Le premier instant c'est celui-ci, celui de circonscrire le champ de ce que l'on veut créer, l'endroit que l'on veut délimiter. Ensuite, c'est justement s'y introduire, le décrire, le raconter, et là il ne doit plus y avoir de conscience, de manipulation. Ce serait pervertir ce qui pourrait être l'inspiration (qui semble fictive mais qui est réellement ressentie). Je pense que nous sommes d'accord sur le fond. Sur le second mouvement, sur le moment de la création, c'est à dire quand l'écrit sort de terre. Sauf que je m'attache autant à la germination qu'à la plantation.
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M
Quand je dis que la mort du père a tué le style, je me contente de "déconscientiser" le style. C'est comme avec l'art. La meilleure façon de voir l'art échapper à l'artiste, c'est de se considérer comme tel, occulter l'art est sans doute la seule façon de l'approcher au plus près. Vital le style ? seulement à partir du moment où on se permet le luxe de l'oublier, c'est bien là qu'il est le plus vivant. Cela peut paraître contradictoire mais le paraître, comme chacun sait est trompeur et possède sa part de niaiserie.<br /> <br /> Admettons que je me sois fourvoyée, "Papa est mort" reste alors un mémorable "exercice de style", d'une habileté incontestable... et vidé de l'essentiel. Dans le cas contraire, le style est ignoré et "l'Ecrire" est roi, parce qu'éprouvé. Il n'y a qu'une seule chose de vitale, c'est la vie. Si tant est qu'on leur accorde un peu d'importance, le style et la manière sont comme autant de grelots attachés à la queue d'un chien, dédouanés cependant leur prestige, ils nous offrent Monts et Merveilles. S'y soustraire est encore le plus sûr moyen de gagner "le style". Après bien sûr, on peut toujours écrire des romans... mais toute déformation de style demande un jour à être "éprouvée" d'une manière ou d'un autre, là est l'essentiel. "Je" est réel ou bien ?
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B
Non, le style c'est tout ce qu'il reste quand tout a disparu. C'est un peu les manières de l'aristocrate ruiné, le style. C'est ce qui résiste contre toutes les marées industrielles, physiologiques, marines. Le style c'est vital.
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M
la vérité crue se passe de style. Mieux vaut être "recousu" à vif que sous anesthésie... la mort du père à tué le style et c'est plutôt bienvenu. Point barre.
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J
"Boudi n'a suscité des "réactions" qu'en allant agresser une autre personne sur son espace alors que celle-ci ne lui demandait rien, et certainement pas de la juger ni même de l'apprécier."<br /> <br /> Liberté d'expression, blabla, je ne vous apprends rien. Parce qu'on ne demande rien, on n'a pas le droit d'émettre une opinion? Lorsque on écrit sur la toile, on s'attend forcément à des réactions. Appréciées ou non.
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  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
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