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18 mai 2010

Luxure.

J'ai eu besoin de te chasser pour avoir à te réclamer. De te mettre hors d'atteinte de mon ombre, de mon sexe, et de mes doigts. De tout ce qui de moi est fleur, jardin et odeur, de t'éloigner de corps qui se brise en tige fine et parfumée, en suavité comme une femme de légende changée en roc sur la proue d'une île, et qui se brisant laisse apparaître des mondes aux contours de troubles, aux visages émaciés, où l'on se croirait dans tes temples de barbarie, où les flutes ne jouent que des marches funèbres, où l'on mène des peuples en moi, et les menant en moi les accompagne au charnier. Comme les larmes qui ne crèvent pas encore et se tiennent au rebord de la paupière sont un funambule transparent de grâce et d'hésitation, comme le condamné à mort qui attend sur les barreaux de son cachot que le verdict lui tranche la gorge, lui empoisonne le sang, lui brise la nuque ou bien lui leste de trépas les poumons, je t'attends.
J'ai besoin de te chasser pour avoir un peu mieux la cicatrice du criminel qui me part du cou, pour avoir de toi après que tu sois devenu un crime, crime majestueux, fille rose devenue blanche morte par le secours de mon être, en poussières de cristal, en brume, en souvenirs. Tu es, non la blessure que fait la balle qui s'anéantit dans le corps de l'assassiné, mais la poussière que soulève la balle, l'araignée de verre qu'elle laisse dans le miroir, la tâche brune, l'odeur de chair brûlée, le bruit du cristal qui tremble, du vent qui secoue, enfin, tu es un ensemble de choses qui se tiennent avant le sommeil, dans ce pays où tout est inconsistant, meuble, boue diamantée qui gicle sur le visage du rêveur, où tous les objets sont des mollesses, faits dans la matière du songe, avec un corps de fantôme abolissant tout désir, toute envie. Où l'on porte ses lèvres sur des monstres de vapeur, où l'on baise des souffles, où l'on aime des voix.

Tu n'es pas quelqu'un, et de ne pas être un individu, tu te confonds avec l'obsession, jusqu'à y prendre toute sa place, à remplacer dans mon lexique, mes définitions, mon dictionnaire, son mot, son terme, son évocation et sa puissance, tu y es installée comme la fièvre dans le front du pestiféré, tu as un empire de verbe, d'un verbe, qui se conjugue qui s'allonge, et où tu peux montrer tes jambes blanches, ta chair de peu, où peut tourbillonner toute ta salive, tes glaviots -tu voulais être, dans une autre vie, un homme, un bandit- qui forme dans le ciel une constellation où s'attache d'autres étoiles, planètes, cailloux, enfin cosmogonie du désespoir. Ce désespoir est parent de fortune, il en a la souplesse, le bassin tordu comme une hanse, un ventre. Il enfantera des fils terribles, aux mâchoires de fer et aux reins de pierre, et l'on appellera "malheureux" ceux que ces fils de nuées frôleront. Ils embraseront ce qu'ils toucheront, non pour en laisser des braises fumantes, mais pour voir la cendre qui leur succède. Et ce désespoir engendrera de sa bouche féconde trois-cent ombres douloureuses qui envahiront un ciel bleu devenu bas, un ciel qui plongera dans la mer pour survivre aux taches de feu qui y montent comme un lierre sur un mur abandonné.

Dans le terme d'obsession, que tu recouvres de tes boucles blondes, où tes yeux bleus y soufflent comme un vent et y changent comme un matin. Dans le terme obsession il faut comprendre ce que tu as d'ignoble, et d'ignoble que j'adore, comme ces gens que l'on fusille d'avoir vendu leur pays et où le plomb fait des belles plaies d'argent, comme Tarpeïa qui donna Rome aux Sabins et qui mourut lumineuse écrasée sous le poids de son avidité -brillante- et de leur or -baume. Tu es dans ma mémoire comme le bijou dérobé que glisse le receleur dans la poche du saint et finit par la trouer de culpabilité. Tu es plus lourde en moi que le pistolet arraché de la ceinture du maton et qui pèse tout son poids dans la cellule du prisonnier qui deviendra l'évadé. Lourde comme le sceptre que tient la main butée de l'enfant-roi, et la couronne qui lui broie le crâne. Plus lourde encore que la souillure bénie dans la bouche de l'enfant de choeur, plus lourde enfin que la pierre décrochée du ciel qui s'abime dans la mer, où plus lourde encore que Christ sur la croix coupable, croix gémissante, terrible d'akinésie, et qui voudrait libérer ce corps dont elle s'est épris, cette chair parfaite, parfumée de dieu, et aux yeux de nuit. Elle ne peut pas, la croix immobile, abandonner ce corps sublime que des mains d'ange -anges sans sexes, désirs, passions, anges comme des formes impropres à la réalité, ont gravé dans un muscle humain, ont soupiré dans une vie, comme je ne pus abandonner le tien. Et mes bras dépliés avaient cloué les tiens, comme un corps changé en monstre de pierre et qui ainsi durcit figerait tes vertus.

Il faut que tu comprennes, l'âge, l'ambition te tordent la grâce pour te rendre belle, pour te figer en formes invincibles, en sœur d'éternité. Et ce qu'il y a de grand dans ce corps neuf qui craque de partout et qui fuit des yeux jusqu'au ventre -pour répandre le jour, c'est la main de l'assassin et le tremblement de l'innocent. C'est la peur de l'un et l'envie de l'autre. La crainte de la pureté et l'espoir du vice.
Mais tu ne sais pas que les barreaux sont des roseaux de métal que ma bouche sait courber, et où s'enroule tous les espaces, toutes les mains gémissantes, tous les gestes altérés. La poésie les incline, et libère tout un jardin de criminel, des roses, coquelicots, épigées, lys, sexes, pétales, flétrissure, étamine, enfin tout ce qui jaillit à fleur d'eau, là où poussent les tiges des cellules.

J'ai besoin de te mettre hors de moi, de mon ombre, hors des rameaux que font mes cheveux si les mains froides du temps les assouplissent, hors du poison qu'exhale ma bouche, hors des victimes qui partout jettent leur fine pluie et dont j'accouche sur des lits de pierre. Je tiens dans mon ventre une comptabilité de morts, d'incertains, d'êtres aux allures terribles que le vent balance -comme le criminel étourdi sous le prêche de l'abbé, et qui ont toussé leur agonie dans mes poumons, agonie dont je sens la caresse aimable.

Il faut que tu restes à la périphérie de moi parce que je t'étranglerai, et tu rejoindrais ces tombes que j'honore de souvenirs tous les matins et où j'espère traîner des amantes, un jour, et y déposer sur l'épitaphe des rires semblables à des chrysanthèmes fanées.
La vie est bien trop grave pour être sérieuse, pour s'endeuiller et ne porter que des volutes noires, des chiffons sombres qui digèrent la lumière.

Il y a quelque chose de fantastique aux photos que je prenais de nous malgré mon manque évident de talent. Elles sont l'érotisme, la sexualité, avec son désespoir et ses joies, avec son regret et son vice, avec ses taches et ses couleurs. Elles montrent le désespoir et la violence, elles montrent ton visage qui a honte d'être abattu sous des muscles, sous des os, sous la verge de l'autre qui durcit, et que ta faim ne peut t'empêcher de serrer dans la paume ou d'embrasser avec toute la bouche. Tu as une pulsion au lieu d'un sexe qui durcit, et c'est ainsi qu'est ta queue, en forme de pulsions et d'invisibles. Tu as un sexe d'homme immatériel.
Tu as des pudeurs que tu masques sous l'appétit.
Tu es l'obsession ; tu es aussi l'avidité
J'étais le vice amputé de luxure.
Puis je t'ai trouvée.
Puis je t'ai perdue.

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  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
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