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10 février 2011

Aux assassinées

        Je veux être un suicidé du prestige et de l’honneur, que ma gloire tombe en poussières, incapable de survivre en dehors du corps parasité. Cette tique nourrie des sangs, des chairs, qui grattent l'orgueil sous l'âme. Je veux la gloire, colée à mon buste de gravats, de salive et de foutre, et marcher, marcher et la voir me suivre languide amoureuse, ruisselante et neuve. Je veux voir sa peau blanche et lisse comme la cruauté du bel enfant.  Je veux la gloire et lui serrer sa taille en coton parfumé, lui bander les yeux des parfums féminins noués à ma peau comme des lèvres d'amantes. Elle me prendra la main, et mes doigts déformés de poésie iront dans ses mains gardées des offenses du monde par des gants blancs, pâles. La gloire me dira « où va-t-on » je dirai « vers des pays libres et froids où grelottent la douleur et le silence». Elle croira les montagnes escarpées de Russie, leurs chemins tendus, les falaises aux parois creusés de musique et d'hiver, l’ourlet des collines de neige que suppose l’Oural curieux, elle imaginera la neige recourbée des pas du souvenir, les sabots des cosaques qui dans le ciel font monter la marche des abandonnés et des défaits.         J’attends la gloire non pour qu’elle sertisse mon front de ses brillants venimieux et que mes yeux bleuissent d’orgueil beau. J’attends la gloire pour l’entraîner avec moi dans la mort. Arriver devant les portes de la tombe, je lui dirai « passe devant, gloire, il te faut ouvrir le chemin, couper la corde aux frontières ». Naïve comme la femme séduite, ses yeux voilés de gaze embaumée, elle avancera…Oui, ce pays libre et froid se tient très loin d’ici, de l’autre côté du langage, à la froide extrémité des états -physiologiques. Je lui dirai viens, suis ma voix qui tremble et qui hésite, viens au bord du vertige sentir toutes les maladies montantes comme de la lave. Ma vie je la guide dans le libelle, je l’éduque dans l’offense, je la tords le long du tuteur en bois vénéneux et nerveux qu’elle prenne la forme parfaite des forêts maussades où le poison et la puanteur flottent en un ballet infernal et indistinct, où les mères assombrissent de leurs bouches de cendres grises les fronts saints d’enfants ceints de religion. La gloire, je l’emmène sur les terres pourrissantes de la dechéance, où tombent en morceaux ses mains de plâtres peintes en ciel, où ses seins terrassés par la faim, amaigris par l'amour donneront la nausée aux fébriles de l’ambition, qui s’ils voyaient la gloire -que je délierais- surgir aux carreaux de leurs labeurs, la chasseraient d’un cri inquiet, horrifié, l’ambition menacée de l’odeur mélangée du mal et du baptême des rites occultes. Je ferai de ma tombe un étroit appartement où mes chairs pourrissantes se mêleront si bien avec la gloire conquise, que l’on nous confondra, que les temples à sa gloire prendront un peu de mon visage immonde, de ma tête hirsute, coiffée de nuits et de la chevelure cruelle –et bouclée- du poète. J’habiterai plumes, notes, broderies, je serai dans la phrase, le sordide, et la gloire, morte, décomposée en moi, pleurera trois cris de soufre, couleur crépuscule, avant que de disperser tout à fait ce qu’il lui reste de son murmure angoissé. Au frontispice mon visage menaçant, défait, usé, mon visage abandonné de sommeil, creusé partout de sa laideur primitive.
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  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
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