Livre from Amsterdam - Hot Blondie.
De toi je veux de l'intimité silencieuse, aux rideaux de velours rouge couvrant nos teints mouillés des sueurs légitimes de l'excès, nos plaisirs sont des baigneurs au milieu des sentences de nos visages, des fleuves d'une largesse de cils, où dorment les plants sauvages de nos caprices, de nos déclins. Je te tends un pays tout entier, aux frontières prismatiques, je te tends un pays qui dans moi gémit, la voix courbaturée et craque partout menacé des eaux noires des forêts que l'on nomme les flaches, menacés des braconnages du réel, du fusil de l'impératif. Je te tends ce qui frémit, palpite, ce qui prend l'apparence de deux conques creusant dans la lumière de quoi bénir les muscles. Nous aurions, dans l'intime, sur ces baisers qui séparent du monde, qui nous en cachent et le font écroulé comme une confesse sur la bouche coupable, à l'abri de toutes les réprobations.
Offre moi tes lèvres que le baiser y naisse. Je te tends le moule de ma bouche pour que ta tendresses s'y forme. L'intimité est-ce autre chose, encore, que l'isolement conjoint, de deux volontés tendues ensemble au dessus d'un but ? Qui se fabrique de quatre mains potières. Je pourrais t'en façonner un, de la taille d'un orgueil, je pourrais y punaiser des photos en couleur, les articles du journal, des couvertures de roman. L'intime, c'est ce pas dans une foule qui ralentit deux corps étrangers, qui se bercent assez, soudain, de l'écho rencontré en l'autre, du reflet sonore de sa foulée imitée, reproduite. Je pourrais t'inviter dans l'intime de mes nerfs dans le danger profond de mes yeux où naissait le vertige qui creusait le vide dans les corps des funambules. Je voudrais sentir dans une transe commune, dans nos respirations mélangées, associés en les senteurs nouvelles du désespoir, je voudrais coller l'effluve de toi aux images de toi qui se réunissent à l'intérieur de ma bouche, le parfait frisson de notre distance. Je te proposerai mon ventre ouvert et tu dirais "il y fait froid comme à la tombée de l'espoir"
J'ai l'obsession de toi, de tes yeux mouvants qui enfilent tes orbites comme les mains du joaillier tissent les colliers, tu es lourde à mon âme comme un péché dans le geste du saint, comme le crime dont la justice ploie les innocents. Tu te tiens dans la pliure du regard que fait la fierté aux visages sensibles, ce petit creux où s'agglomère en peaux neutres le pleur suspendu, cassé, gelé. Tu te tiens au rebord de moi, je te sens proche, mais aucun de mes mouvements ne peut t'atteindre. tu es d'une autre réalité. De l'autre côté de cette matière invisible au-delà du visage, au delà des pensées, dans le sens même pratique, physique tu m'es extérieure. Dans un univers nous nous tenons chacun d'un côté distinct de la lumière.
Si mon audace me compose au corps le toucher de ton être, je suis certain de te passer au travers, de te déchirer sans douleur comme la brume traversée par des processions. Comme le silence redevenu silence après que les voix longtemps chantantes se taisent. Si mes manières sont en capacité de te troubler, tu te reviens à l'état primitif d'avant moi dès lors que je te quitte. L'ondée rare, cette mare précieuse, bleue liqueur, absinthe suisse, où la pierre de mon âme s'enfonce, divise, jusqu'à ce que les eaux se reviennent toutes en ordre comme tes cheveux longs mais dressés. Tu as sur la tête une colonie de serpents d'or, de fougères baignées d'aube, couvertes d'automne, tu as sur la tête une tiare de venin pour doubler la lumière de celle de tes deux beaux yeux de buée. J'y inscris des signes indiens...
Tu es belle dedans moi, belle comme la promesse de la jeunesse, comme une femme muette. Tu es belle dans tes indignations qui t'empourprent en bas ce que ta lèvre a ganté de pâle, cette étrange trace de dignité, cette petite tache invisible, immaculée, ce petit reste de calme que l'injustice enflamme. Il est heureux qu'à l'heure de nos courtes conversations, les images du fantasme se forment directement dans l'obsession, sans prise sur le réel, sans y aspirer ce qui lui manque de couleurs et de laisser la trace résiduelle de lui comme une preuve du crime, comme le sperme stagnant, jaillissant du sexe du violeur. La croute du crime, et le regret trainant là sa laideur coupable. J'ai vu des pantalons de coutil avouer mieux un crime que la bouche des condamnés à mort. J'ai vu les ourlets figures, me raconter toute l'histoire sous l'aube d'un réverbère, dans le crépuscule d'un porche, j'ai vu les braguettes trembler des images rassemblées en un point par le réel. Je sais toutes les choses, tout le pigment insensé de la fatalité.
Tu es trop précieuse pour que je te souille du mot d'amour, pour que je te souhaite rangée dans mon quotidien de désordre, où ma solitude crève les yeux des fillettes, où ma solitude comme une douane jette en dehors de mes secrets toutes ces étrangères, que je dis d'amour ou de passion, qui ne sont que des dégoûts, les ombres-vêtements que je me mets au froid. Je ne peux pas te couvrir de cette guenille, ce vêtement public du verbe dont je sais bien que tu te doutes qu'il te concerne, quand je le sors ici du silence.
Tu es autre, dans moi, et je t'enjambe ruisseau
Du pas leste et brisé des couleurs
Faillies de l'accord
Étrange du vent
Avec le son
Du silence reprisé par les mille bourdonnements
Infernaux. Ce chant révolté des grèves
Aux allures de défaite
Ne suffit pas à disperser tous les parfums
Entêtants, des premières audaces
Les eaux chaudes jettent
La leur du thé
hors de meu
-rtissures du soir
Il me faudra oublier, le chant de tes yeux. Tout ce que j'y vois quand je m'y fixe. Je tiens à toi, de loin, je te veille à mes façons, je m'enquiers de ton état, quand tu es hors de mes visions, à des fées, des monstres, des idées fixes comme des constellations je demande aux hallucinations qui t'ont crue voir dans le délire si tes yeux dansent toujours comme d'éclatantes Lady, et aux songes, que ton sommeil autorise, à me rapporter tes gestes et tes sacrilèges. Je te sens, il est une odeur dans toutes les puanteurs du monde que je sais la tienne, que j'ai affiné jusqu'à me la rendre intime, à l'allonger dans ma chambre pour y transformer l'atmosphère -comprends, je te fréquente tous les jours, en l'ombre de toi. Mon sommeil absent, tu l'enveloppes, le berce, mon lange ou mon suaire. Selon que je meurs ou que je suis mort.
Tu es trop digne, trop précieuse ,trop étrangère pour que je vienne immobiliser le verbe mou, fatigué d'aimer. Tu es trop loin de ma myopie pour que ta forme réelle m'apparaisse, tu es floue, incertaine comme le plaisir. Et de ton bord de la vie le temps s'en va, sans frissonner jamais, de son pas militaire. Tu te tiens de l'autre côté des idées, entre le marbre de celles qui durent et l'acier de celles qui tuent. Ce sont des lois.
Je t'embrasse sur les yeux
Ton petit feu et toi
Passe de bonnes vacances.