Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
boudi's blog
boudi's blog
Archives
Newsletter
1 abonnés
24 mars 2011

Perso - Rue Saint-Jacques, les critères sacrés.

Un jour l'on me dira "je veux que tu arrêtes d'écrire sur moi" et j'ai
répondu "je n'écris pas sur toi, j'écris après toi, je capture ton ombre.
Mon écriture est depuis toi, la traîne que tu laisses, le scrupule que tu
engages". J'espère que ce ne sera pas toi, mais une autre, qui me dira ces
choses. Toi, j'aimerais que tu continues à faire semblant de ne pas lire,
de ne pas savoir. Tu as les yeux beaux, beaux comme des yeux aveugles.
Trop de lumière dit le soleil. J'essaie d'éclaircir les miens, de les
faire tousser, je regarde le soleil à la place des Etats-Unis, je le fixe
longtemps, et je suis ému, je crois, mes yeux sont plein d'émotions
claires.

Le jeudi, je sortais, dans des bouges, boire, pendant deux heures, chez
Maxim's, à l'Ice Baar, à la French. Puis je suis fatigué, des gens que je
trouve partout identiques, des gens évadés de la cire. Alors, ce soir, à
vingt et une heures, j'irai ailleurs, j'irai à la rue Saint-Jacques dîner
de silence. J'irai tout seul, à la rue Saint-Jacques, et ce sera pareil
qu'avoir écrit adieu au bas d'une lettre de rupture. Je leur dis au
revoir, à ces corps qui se croient plein d'esprit, et moi, comme Crevel,
je suis un esprit déguisé avec un corps. Quand je le dis à un inconnu, il
me frappe. Et c'est comme de me dire "c'est comme ça qu'il faut se servir
du corps". Je ne sais pas. D. j'aime ta voix de clown faussement
agressivse, et qui déraille vers la tendresse des jours sans pluie, où les
enfants rient d'eux même. Tu as une voix petite comme tes mains qui
bourgeonnent au bout de tes os. Je ne m'approche jamais assez -je déteste
la bise, la tentation des lèvres est trop forte- mais je devine l'odeur
d'églantines de ton cou. Tu as une nuque de jardin, tu en as l'odeur de
lavandes sèches.
Aujourd'hui, je me suis levé avec un mal au poignet assez étrange. Comme
si l'on m'avait tordu les mains toute la nuit.
Je me demande où va ma vie.Je me demande avec qui elle va partir cet été.
Je me demande, si je te recroiserais, plus tard. Je crois aux signes, et
de t'avoir vue hier, place des Etats-Unis me terrifie encore. J'ai très
peu dormi cette nuit, parce que j'avais peur que tu sois là, encore, prête
à surgir.
Je me demande si, au Pont du Bois, il y'aura encore cette dame penchée au
rebord, qui répondera aux passant :"qu'elle sautera un jour".Je me demande
si le vent l'emportera avant sa chute.Je me demandais si j'aurai le temps
de l'aimer avant. Je me demande si je finirai par t'écrire les mots
élégants, dans des chemises capitonnées. Je ne sais pas bien. Ton prénom
est court. Je le prononce et il a déjà fondu sur toute ma longue. Il rime
avec Anne, il rime avec mes souvenirs. Si je t'attache des perles au cou,
est-ce qu'elles tonitrueront comme les vagues accrochées dans Pâques au
clocher des Eglises. Si j'appuie sur ton dos, j'ai l'impression que de la
musique va sortir, mais je n'ai pas de corps, alors je ne peux pas
appuyer. Je passe. Comme une note close.
Je me demande si les corps que je croise peuvent être à moi. Remplacer les
idées. Je cherche le corps que je pourrais m'accaparer pour venir t'aimer
convenable. J'ai déjà trouvé le corps où je veux faire brûler mes venins.
D. C'est tout chaud, ton prénom, ça sort du four, c'est croustillant,
doré, c'est le matin qui a dérapé de l'horloge pour tomber dans ton teint.
Et je me fiche de savoir.
Je n'invente pas ta beauté. Je la trouve en toi, et je la retrouve, chaque
nuit. Je la retrouve, dans les murmures que je prie, dans le murmure de
ton prénom que je récite en entier, que je n'écris qu'en mystères. Je te
retrouve, dans les yeux ouverts d'un cri sur la table du salon.
Je ne veux pas d'avenir.Je veux mon destin.Je ne veux pas de compliments.
Je ne veux pas être flatté. Je veux être pris en flagrant délit .Je veux
qu'on m'interdise, qu'on continue de censurer ma vie. Je veux que tu me
gaspilles.
Je ne veux pas te faire peur, et pourtant j'effraie. Quand je passe devant
un miroir, avant de rire, je pleure. J'arrache les cheveux du reflet. Je
ne supporte pas. Ni le bruit, ni la vue. J'appelle les hommes "mes
automates". Depuis tout petit, dans le chant gras du jour kabyle, qui
semait par carrés son jour, une sorte de peur et d'angoisse énorme me
prend, quand j'aperçois le moindre éclat bleu d'un oeil. Le spectacle de
ton regard est terrifiant et je ne peux pas m'en détourner, quand tu me
regardes, tes yeux finissent par partir dans leurs propres silences, et
moi, je prends des poses victorieuses mais mon esprit vibre de
peur.Parfois, mais plus rarement, je me mets même à en pleurer. Mais tu ne
peux pas voir, je pleure avec mon esprit. Avec mon silence. C'est une peur
énorme. Mes parents n'ont jamais su l'expliquer. Et moi, je n'ai jamais su
le comprendre.
Je me demande pourquoi j'ai aimé voir tes yeux croiser. Je me demande
pourquoi, je ne supporte pas la laideur dans ta bouche.Pourquoi je trouve
ça vulgaire. Pourquoi, chez les garçons, ça ne me surprend plus. Je me
demande pourquoi je ne suis pas parti dans les terres froides de la
liberté.
Je me demande si tu sais que je fixe tes yeux parce que mon écriture est
altérée. Je me demande si lorsque l'on veillit, on aime toujours autant la
jeunesse. Si l'on devient envieux.
Je me demande si c'est logique de tomber amoureux d'une idée. Si c'est
important, que toi, D., tu ne puisses qu'avoir peur de moi. C'est étrange.
Je ne sais pas si j'aime déranger. Mais je dérange. En seconde la
professeure avait écrit "vous êtes dérangeant".
Marguerite avait dit "tu es érotique quand tu t'allonges sur la table"
C'est la position de l'écriture. Sa position amoueruse. Si tu me voyais,
dans la nuit, tu aurais autrement peur. La peur du visage dément, les mots
qui partent par la bouche et qui gemment l'univers. Tu n'es banale pour
personne, mais je t'offre différente.Tel que je te vois. Avec mes yeux
décharnés, avec mes côteaux versés. Chaque jour. Oui, D., je te fais
exister autrement que tu peux être. Sous une autre forme. Les corps
humains sont des ombres, dans mes mots, avec le grain de tes yeux je veux
te troubler.Je trouble. Tu n'entres pas dans ma vie, tu entres directement
dans les souvenirs. Je ne sais pas si je pourrais jouer avec tes cheveux
toute ma vie comme s'ils étaient des minutes, je ne sais pas s'ils sont
longs assez pour que la vie qui sépare les aveux silencieux les laisse
s'égayer dans mes doigts. Laisse moi les transformer encore, j'ai une
dernière mélodie à jouer, la mélodie du regret lâche. Je ne peux pas dire
ces quelques mots vulgaires que tout le monde dit "je t'aime", je ne peux
pas les adresser. Ce serait un déshonneur, ce serait comme t'offrir au
mariage l'alliance désuète des divorcés. Je me demande pourquoi l'on m'a
éduqué. Pourquoi, quand l'on me bouscule, je ne le remarque pas. Je me
demande pourquoi, je tombe dans les escaliers, quand je suis la voix, qui
légére, me gronde des sons inaudibles et attendrissant, des rires, de
lycéens. Et aussitôt, je comprends, pourquoi, j'ai mal au poignet, et
aussitôt je comprends : l'on m'a attaché.

J'ai envie d'écrire encore sur toi, puis je n'ose plus. Je me souviens que
tu me lis.

Publicité
Commentaires
boudi's blog
  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Derniers commentaires
Visiteurs
Depuis la création 49 381
Publicité