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24 juin 2011

Les yeux clos de Paris délaissent une vie de lumière.

Qu'est ce que je savais du printemps que les femmes promenaient dans le débris de leur âge ? Que des visages beaux allaient changer sous le crachat des saisons odorantes ? L'automne entre par mes yeux sans toquer aux calendriers. Il défait de lumière la nature tandis que changent les murmures des feuilles semblables à des femmes chargées d'étreinte. Les mots ont une autre couleur sous les crissements de Novembre.

 

Les mimosas éclatent sous les semelles du vent dans le silence d'une ritournelle de mimes. Les rues d'hiver se déguisent d'un pantalon de jute, le baiser des filles y fait des impasses de sortilèges et des avenues de drames. De ce geste malade assez pour engendrer sur la route des immeubles timides comme une ville de Province. Les femmes y passent, et leurs yeux encore maquillées d'une jeunesse ancienne récitent « visage âgé dont l'on devine qu'il était beau ». Cheveux blonds, on ne peut pas teindre une voix. Les grincements prudents du silence ouvrent le ventre de la ville, et s'échappe dans un demi-cri l'infini qu'on croyait gardé sous le rideau de fausse opaline.

 

Mon corps hâtait l'arythmie de l'Univers quand ses mains posaient les caprices sur les seins des mondaines, y glissaient des cages de baisers pour tresser à la nuit sa natte de princesse inca. Les collines des jolies font à leurs lèvres de cité un balcon puis un parvis. Un sous-sol et un toit. Ces filles sont des malheurs sans ciel, des joies sans terre, des trônes sans princes. Petites filles de Paris, de Londres, de Vienne ou de Madrid j'aime vos mains irritées, j'aime le blé fané de vos voix. La peinture que ma caresse accrpoche à vos voix paniquées a la couleur de la neige.

 

Pour une seule de ces minutes graves comme un baptême, j'ai mis les heures dans un chant, je les ai mêlées aux sérénades des moqueuses, aux froissements iodés de l'ombre d'un albatros. Pour un des silences que l'on achète à la fête, au bruit, à l'habitude, pour un de ses silences de messe j'ai mis mes genoux en gage aux usures monastiques, et ma voix libation des muettes prières des confréries timides. Quand mes paupières sonnaient les cloches des Pâques, j'ai senti la terre vibrer du prurit des femmes vulgaires, j'ai vu son grand cri couvert de ronces, de flèches, et de mer s'accouder aux avenues de la déroute, y boire au trottoir le vin transparent tiré du ciel.

 

Il était cinq heures moins dix à l'horloge de tes mèches quand sont venus frémir les envies et les soifs. Les images altéraient le teint ocre du désert jusqu'au mirage. Les murmures frissonnants paraissaient à nos sens des fresques prises dans le rêve, ils dansaient dans des accents antiques jusque l'étourdissement des sexes étrangers.

J'ai vu dans ce pays de sable et de songes l'âge grimacer sur les joues des femmes de douze ans. Et des garçons attachant à leur taille une certitude couleur d'acier grinçant. Rouges de soleil. J'ai vu des jeunes filles insoumises chercher dans le miroir le talisman d'un reflet, et accrocher au cou un bijou couleur de ciel, réfléchissant un peu de l'or d'ici : le soleil.

Un soldat mutilé contait les aventures de son avant, de quand sa barbe n'avait pas encore l'odeur de cent huit vulgarités, moitié spectres, moitié liqueurs. Le présent de ses muscles pleurait des souvenirs de légende, belles comme des filles-fées aux seins vierges de baisers, et la littérature faisait à ses mythes les yeux vairons.

 

La gouache tonnait d'une ode de miracle sur les dents du fantôme.

 

J'ai baissé le store du hublot pour fermer la bouche de l'infini. Bonjour Paris. Je vois tes nuits d'ici. Il est longtemps que ta voix est morte. Tu as crié tant de fois pour les Révolutions, et voulu mille choses sous tes pavés de sanglots, tes rues en sont rendues aphones. Tu dressais sur ton torse les symboles et les mots qu'on fusillait avant que ne pointe l'indignation du jour. Haussmann commettait son crime urbain dans le secret de tes ombres. Paris, tu voulais être une patrie, et déjà les traditions de Versailles étouffaient de manières ta démarche d'enfant sale. Des coiffeurs coinçaient dans leurs ciseaux les poux de tes bâtards, les bérets des Gavroches se portent en devanture des boutiques du luxe comme le trophée d'une victoire volée. L'hôtel de ville brûle dans les pages des encyclopédies et forme un coeur aux rêveurs. Paris, tu as des porte-voix qui soulèvent ta sueur muette jusque dans l'hémicycle aux nations, et l'on y entend l'accordéon jouer cette valse de défaite qui traînait dans les pleurs de Vallès qu'on mène une fois par an à l'échafaud de l'Histoire. Paris, au sommet du succès on n'entend plus battre le sang des hommes libres, les pleurs s'évaporent quand ils entrent à la Bourse. La poésie y sèche. Vieille fleur inutile. Lustre dépassé. Paris, Paris, Paris, on peut aimer des mortes, et tu as dans mes lignes ton arc de triomphe. Paris, ce siècle est ta défaite, tes yeux clos n'en sauront pas l'ombre ni le sang muet aux tempes de notre âge. Je pense à toi, Paris. Je pense à la gageure de ton insolence d'alors. Quand les empereurs fleurissaient sur les berges du Rhin, tu noyais les monarques dans l'eau d'absinthe de la Seine. Tu as le visage des jonquilles. Narcisse au front gris. Répète avec moi le cantique des offensés. «Nous pouvons rompre, jamais plier ».

 

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Commentaires
S
Et là, tout à coup, un truc insensé, génial, naïf et si solide.
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  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
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