Et la bouche des blasphèmes
Déjà j'ai sacrifié à l'au-delà du miroir, une ligne de trop. J'en reviens au pouls de l'Univers. JE infect et beau comme l'amour trempé d'Avril.
Mon narcissisme, plus courageux que toutes les choses béates dont on pare les héros, suffoque et désespère HEUREUX (il est trop facile d'avoir de grands gestes sur le champ de bataille, au rebord de l'abîme, dans la chute des falaises et il est autrement moins aisé de s'arracher à la tourbe, au monde lent, enfin, d'aller gesticuler dans la poésie, quand le ciel est si bas. Dans un monde de carnage, de cendres et de bombes, de choléra et d'infection, l'infini tombe de lui-même dans les paumes du dormeur. Le ciel se dresse comme un condor, s'éploie gigantesque.
Aujourd'hui tout le monde nous assomme d'écologie, de réchauffement climatique, de couche d'ozone raréfiée, mais le ciel dans sa clôture, l'infini à l'asile et l'enfer au ban ah, ça personne ne s'en soucie, même on est soulagés. On a des guenilles de ciel, de manuel scolaire pour en parler).
Je ne crains pas l'obscurité des hommes, cette grande solitude au bout de toutes les nuits, quand chacun déjà somnole d'avoir cherché -en vain, toujours- son âme. Cherché dans l'alcool, dans les regards étrangers, au terme d'une caresse, au nadir d'un baiser, au zénith d'une parole, dans la haine du désir. Cherché nulle part et tout figure pourtant au même lieu prisonnier des songes, reflet tranquille, mer démontée des images.
Je me fiche des cages, des prisons, des solitudes terribles, des grandes pestes physiques et des incendies humains, si me demeurent les miroirs. Peuple de verre, de quartz brisé, de roches transparentes, peau des morts, un monde de moi-même ; de moi-même mis en miettes, en cendres, en poussières, moi rayé, violé, brisé, fendu, entier, double et triple, moi poussé à toutes les extrémités, brûlé à la bouche, enflé jusqu’à l’enfer, rompu à la première neige. Univers de mon âme en souffrance, galerie des «JE» sensibles, palais des enfances mortelles.
Je ne m’enferme dans nulle case, je m’en vais dans les miroirs, derrière les paupières. Je suis libre pour toujours si je peux fermer les yeux, parler à moi-même à l’instant fragile de sommeil, à l’instant de la longue peur.
Puis je sens la haine, le corbeau malade
Et la bouche des blasphèmes, pria