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2 février 2021

St. Georges

Saint-Georges
Dimanche 31 Janvier 2021 - 23h21 -
Ligne 12
La ligne 12 traverse Paris du Nord au Sud et se distingue des autres lignes du réseau métropolitain parisien. Contrairement aux autres, exploitées et fondées par la Compagnie Métropolitaine du Chemin de Fer, la régie de la ligne 12 était échue au Réseau de la Société Nord-Sud. Pour cette raison cette ligne 12 - ligne A de l’ancienne nomenclature - conserve des originalités rendant ses stations, en quelque sorte, plus charmantes. On y trouve une multitude de faïences, de petits carreaux colorés dans le style Art Déco - je suis un grand fan - le nom des Stations se constitue de mosaïques tout à fait hors-sujet. Qui se donnent des airs d’une antiquité romaine. Rappel de ce que le métro parisien a bien un siècle et qu’il y a un siècle, déjà, on voulait faire ancien.
Aujourd’hui, lorsqu’on rénove ces stations on leur garde au mieux leur apparence préhistorique pour une mise en spectacle du passé. Restauration d’une autre sorte.
Ici pour qui veut effectuer l’archéologie on trouve l’Histoire en délogeant quelques morceaux secrets de faïence là, le petit sigle NS, qui témoigne d’une propriété caduque, est gravé sous le nom des stations.
Ma présence sur le quai se justifiait : je devais retrouver l’amoureuse dont le train, en provenance de Nice, entrait en Gare de Lyon avec 2h10 de retard. Comme je venais de rater mon métro il me fallait attendre 9 minutes sur le quai alors j’ai décidé, pour m’occuper, de découvrir la station au-delà des mosaïques, des faïences, de l’article Wikipédia et son savoir technique. Au cours de l’entreprise je pus établir un certain état du monde contemporain. Trouvant, dans les éléments divers (pas tant que ça) la synthèse de mon époque.
Ce qui m’a saisi d’abord c’est cet affichage là s’inquiétant du sort des femmes dans les pays francophones et demandant aux gens pareille inquiétude active :
Appeler ceci publicité apporte toujours du trouble. Qu’est ce qu’une publicité. Son statut se définit-il par son objectif : vendre un produit, faire connaître une marque ? Ou par son contexte disons…d’énonciation se retrouver dans le lieu déclaré de la publicité ?
La publicité ce n’est plus aujourd’hui, comme à son origine, simplement rendre public, porter à la connaissance de, mais infléchir et orienter des comportements. La publicité reproduite ici poursuit aussi ce but : orienter des comportements (vers le mieux, l'éthique, la protection).
Autre chose encore m’a intéressé ici. Cette affiche a été investie par des individus sans que très clairement je ne saisisse le sens des différentes interventions. Celle, radicale, en lettres capitales dit « à force de dire aux femmes qu’elles sont faibles elles finiront par le croire » et je ne sais s’il s’agit d’un discours féministe ou, à l’inverse, d’un discours prétendant que les femmes étant déjà assez reconnues dans le système actuel il ne sert à rien de défendre spécifiquement leur cause - il signe au masculin me laissant penser que la deuxième lecture est juste. Une réponse critique et fâchée y est apportée.
Soit.
J’ai décidé d’observer de plus près cette publicité. Non pour fournir une analyse des codes et de la mise en scène qui y commandent mais pour observer ses marges. Ce qui n’appartient pas au message explicitement porté tout en se trouvant bien là, inconsciemment. 
Ici, littéralement dans la marge, on lit le nom du cabinet qui a réalisé cette publicité donne son nom.
Mlle Pitch.
 Mademoiselle cette publicité, qui très clairement s’inscrit dans une dynamique féministe en appelle à une agence dont le nom même contrevient au message. Mademoiselle. Plus loin, encore, est inscrit le nom du photographe : Fred Leveugie. Un homme.
On trouve déjà, ici, une synthèse et un commentaire : une affiche féministe, un débat entre des individus en lettres capitales et rageuses, des auteurs pas si féministes que ça.
On y trouve une autre idée : chaque fois, dans les stations de métro, une des publicités a bonne conscience, qu’elle défende une cause humanitaire, informe sur un désastre, demande des financements.
il faut mettre au jour l'inconscient des formes. 
(ouh)
Alors, j’ai continué ma marche dans la station - 90 mètres pour découvrir un peu plus ce qui habite mon époque. J’ai découvert Tiphaine, 52 ans :
directrice d’une société de 500 salariés en Bretagne. Tiphaine a donné 2000 euros pour réaménager l’espace parents-enfants du centre de santé proche de chez elle.
Puis, le slogan « être Mécénactrice c’est investir pour l’avenir ».
80% des entreprises mécènes choisissent de financer localement des projets sur leur territoire.
On y trouve des choses joyeuses : la mise en avant d’une femme, noire, la solidarité des cheffes 
d’entreprise, l’aspect local des initiatives afin de cibler des besoins particuliers…
Oui.
Mais.
Mais.
Il s’agit d’un centre de santé et sa gestion devrait, doit, absolument, impérativement, exclusivement, appartenir à l’Etat. Ici, on me dit l’immixtion du privé dans le public, on me dit la dépendance du service public, donc de l’accès à un soin de qualité, à des choix particuliers.
Au-delà de la belle histoire de Tiphaine en creux s’annonce l’effacement de l’Etat seul garant de l’égalité entre les territoires…Alors, si dans la Creuse ou en Seine-Saint Denis à l’horizon l’espace parents enfants du centre de santé proche d’aucune Tiphaine continue à se désagréger…
Les stations produisent du sens en dehors des publicités. Face à la mort habituelle et la mise en garde commune du ne pas descendre sur les voies s’affiche désormais le virus mortel qui parasite nos vies. Le nouveau danger échappant à la mort commune se rappelle partout, descend jusque sur le quai du métro et dans la rame. Moins létal que le coup de semonce du métro cependant. Omniprésent.
D’autres publicités parlent du monde qui nous entoure.
Celle proposant une application sportive. Qui dit à la fois la sédentarisation des activités (faire du sport chez soi) la quête de bonne santé, la numérisation de nos pratiques (une application). C’est une publicité de l’air du temps comme en d’autres époques une publicité pour le Yoga, autre mode, autre bien-être.
La publicité pour food chéri s’inscrit dans la même dynamique, mieux manger, mieux 
consommer, utiliser son application tout ça avec la grâce ludique du jeu de mot.
On y trouve aussi le truisme publicitaire, celui qu’on attend les fameuses publicités culturelles, on annonce une production artistique, un film grand public, une pièce de théâtre…Ca nous dit que la création ne cesse pas, que des objets culturels continuent d’être produits et que des manifestations publiques se tiennent - se tiendront - encore. On pourrait analyser le contenu de ces publicités, montrer les trajectoires que prend le cinéma grand public et tous ces trucs qui appartiennent aux professionnels de l’ennui - je ne saurais me compter parmi eux étant chaussé, déambulant sur le quai, de bottes Jeffery West en (fausse) peau de serpent et peuplées de (vrais) clous.
On trouve d’autres publicités à visée humanitaire qui ne manquent de nous serrer le ventre et perdent hélas l’essentiel de leur impact de côtoyer food chéri et fizzup comme si je peux alors éviter de me confronter directement à cet immense violence, distrait que je serais par les couleurs criardes et le ridicule de toutes les autres publicités. Diversion…La fondation Abbé Pierre fait ce qu’elle peut et raconte, elle aussi, plus tragiquement encore, l’échec du Service Public. Des être humains vivent et meurent dans la rue et des associations tentent de toute leur force - jusqu’à la publicité - de les faire durer. Sûrement Tiphaine donne mensuellement ou ponctuellement, avec un abattement fiscal de 66%, une partie de ses ressources à Amnesty International.
D’autres publicités visent - avec homme noir à tresses antithèse du bon citoyen il y a 10 ans - la bonne conscience écologique et nous incitent à mieux jeter ce qu’on a mieux consommer. Une cohérence apparaît : faire du sport, avoir faim, jeter. ô cercle parfait des contemporanéïtés. La perfection moderne, c’est pas des lol. L'exactitude de ce système me donne un instant envie d’y croire et de m'y fondre (voir le PS)
Je crois que cette promenade souterraine m’a beaucoup instruit.
Le métro arrive, je changerai à Madeleine pour prendre la ligne 14, la première automatisée de Paris, celle qui n’a pas un siècle, ne fait pas de bruit. Encore un commentaire du présent. Décidément.
PS : Souscrivez à la banque la moins chère pour la 14ème année consécutive. Code promo en MP et argumentaire de vente pour la souscription d’un contrat d’assurance vie recommandé par Rotschild (52,29% sur 30 ans).
                                                                             

 

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  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
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