Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
boudi's blog
boudi's blog
Archives
Newsletter
1 abonnés
16 février 2021

Novlangage.

Je n'aborde pas l'aspect politique de la langue de façon générale et de la langue inclusive a fortiori. Celle-ci ne faisant plus débat que chez d'indécrottables imbéciles. Il s'agit d'illustrer combien, en rien, le langage inclusif n'est PAS une novlangue. 
Le danger de la novlangue tient, nous nous accordons toustes à le reconnaitre, au rétrécissement du monde qu’elle implique, réduisant, par son étroitesse, nos possibilités imaginatives ; ainsi, certain·es croient voir dans la langue inclusive le danger imminent de la mort du langage et, ce faisant, l’incarnation la plus décisive de la novlangue. 

Rien n’est plus faux. La novlangue, en quelque sorte fait coïncider les mots et les choses ou, plus certainement, permet, dans notre société occidentale, l’adhésion la plus totale entre les nombres-prix et les objets-produits. Ce faisant, deux choses, le langage ainsi appauvri prive ses locuteurices de l’accès à une pensée complexe qui, comme il l’a été démontré par une cohorte d’intellectuel·les plus ou moins lisibles, passe par le médium de la langue et, ainsi privé·es, les locuteurices deviennent inaptes à la critique et donc à la résistance ; aussi, surtout, ce langage ainsi simplifié n’a de telos qu’instrumental, il permet de mettre en rapport une offre et une demande, son seul horizon est marchand. Pur instrument de commerce, cette novlangue existe partout autour de nous, y compris dans en nous-mêmes, elle s’appelle le business english, sans rapport sérieux avec l’anglais, réduisant celui-ci à sa portion pécuniaire et son air d’expert comptable. Les plus chanceuxses, s’accommodent de ce langage, naviguant dans le spread et les closing ; bookant une chambre au Waldorf ou au Hilton - disséminés partout où le business english a cours, sorte de concrétion de cette langue en ****, couettes en plume d’oie, oreillers rembourrés, continental breakfast et room service, touche 0 pour la réception etc.
Danger oui, danger mortel, peut-être vivipare éclosant sous les ailes protectrices des business angels ou dans le chaud cocon des incubateurs à start-up.





Il existe, près de cette langue délabrée, une langue en quelque sorte rivale malgré ce qu’on pourrait leur croire de semblable : le langage informatique, le langage de la programmation qui, si dans son expression la plus basique peut sembler une pauvre combinatoire de symboles peu variés, ne permettant aucunement de nous réconcilier avec la philosophie ou la poésie, il n’en est rien, le langage informatique ouvre l’espace d’une expressivité infinie, nous donne le pouvoir de réinventer notre langue dans les marges des lignes de code et le if, omniprésent dans cette parole informatique, nous assure de tous les possibles. Si…et le monde enfourche le bel esqu-if.


Cette langue peut servir tous les intérêts et tous les destins comme le français a pu servir à la déclaration de guerre du 20 avril 1792 autant qu’à la poésie de Louise Labbé ou au chant quasi-martial de Sonny Labou Tansi. 
Facebook et Wikipedia
Instagram et Philippe de Jonckhere. 


D’autre part :
Certain·es croient voir dans le langage inclusif la novlange et n’ont pas de mots assez durs ni de tribunes assez ennuyeuses pour exprimer leur désapprobation face à ce crétinisme rampant ou, incarnant très bien le crétinisme elleux-même, comparent le langage inclusif à un fascisme certain·es qu’ielles sont que chaque point médian résonne comme le bruit des bottes de Mussollini 28 octobre 1922. Imaginez


Or, pour peu que l’on aime vraiment la littérature, on ne peut ignorer l’aspect exploratoire de celle-ci, on ne peut chasser au-devant de soi, l’inquiétude qu’elle porte quant au sens des choses et de nos usages. Si l’on considère vraiment la littérature non comme un cadavre mais une chose vivante, triomphante toujours, échappant à la barbarie réelle celle-ci, des disruptions - sorte d’éruption de néant couvrant l’âme d’une poussière suspendue - alors on ne peut qu’adhérer à l’apparition salvatrice de cette langue inclusive. Au-delà de sa nécessité politique qui a été traitée avec science et raison - nous savons historiquement combien la raison ne peut rien face à la bêtise qui se pare des habits nobles de la tradition usurpée - j’y vois un potentiel créatif d’une fécondité inouïe ; la même langue augmentée, comme si le français soudain - en mouvement depuis la première geste - connaissait une immense crue fertilisatrice des mots que l’on croyait condamnés à la fossilité.

Mieux encore, nous pouvons manipuler cette foudre nouvelle pour revisiter des formes passées qui, si les réactionnaires tenaient tant à la tradition, susciterait leurs hourrah ; bon retour chez toi, cher sonnet, poésie baroque, formes exténuées n’appartenant qu’au savoir scolaire, aux pupitres gravées des signes d’ennui ; bienvenue à vous toutes les formes condamnées, salut à toi ô l’ode et Homer·e je t’en prie reprends la traversée interrompue et vous aussi les Argonautes et vos suiveuresses. Nous pouvons retrouver, face à cette novlangue infecte du business english, une résistance en redonnant à ces formes négligées une nouvelle nécessité, repenser l’alexandrin et le pentamètre iambique, réinventer le rythme et la perfection plastique de la Pléäide.



Car et c’est bien le travers depuis la nuit des temps des réactionnaires ielles n’aiment rien tant que se poser vigie - bossues - et déplorer de cette bassesse le monde qui finit. Voyant leurs habitudes aborder un nouveau rivage, pleurent la fin de la traversée comme si cette fin signalait le terme ultime, ce sans voir que tout rivage abordé fait signe vers un monde nouveau, riche de fruits inconnus. Et, elleux, gargouilles inertes, meurent du scorbut. 




On peut noter que l’exemple des Argonautes trouvent un retentissement particulier, navire aux pièces changées tout au long de sa traversée et conservant toujours le même nom, ainsi nous le remettons à la mer avec son équipage de matelot·es. 




contenait la fin de tout sans voir que le rivage abordé donne à voir et à explorer une contrée nouvelle, riche de fruits inconnus. Alors ielles meurent du scorbut. 



Et ielles ne se rendent pas compte combien elleux appauvrissent en réalité elleux-mêmes la langue et la pensées qu’ielles pensent ainsi défendre. Ne connaissant plus d’usage que la féroce ironie qui signe toujours la défaite et la résignation, solidaire indissociable de la lose. Voilà que quelques ouvrages ironiques paraissent, quelques vidéos moqueuses d’acteurices à la lèvre torve et nous les regardons avec pitié du rivage nouveau. 

 

Publicité
Commentaires
boudi's blog
  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Derniers commentaires
Visiteurs
Depuis la création 49 344
Publicité