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17 décembre 2021

Désirer comme une femme

La première fois a ressemblé aux suivantes. Les suivantes à la première. Je ne sais à quel moment le fil des pareils-aux-mêmes, s’interrompit, à quel instant je pus au plaisir prendre ma part. Celle qui m’était due. Le désir je le savais, pas par coeur certes, on ne le sait jamais en entier, ni aujourd’hui ni plus tard, le désir je le sentais boule tiède dans le ventre, petit animal doux et ronronnant, sensible aux images, aux regards. Le désir parfois violent, carnassier prêt à tout rompre, le désir hurlant, à l’intérieur de moi semblable une foule en insatisfaite, affamée et avide de sang, de dents enfoncées dans une chair tendre comme du pain frais. Le désir solitaire me clouait insatisfaite, hors d’une totalité que je pressentais, qui, de justesse, m’échappait, me faisait étrangère. Je ne parvenais pas, piégée en haute mer, sans vent, sans courant.

 

Le désir fonctionnait parfaitement bien. C’était au niveau du plaisir que ça coinçait.
On aurait dit que la peau ne suivait pas le mouvement muet, que l’influx nerveux ne parvenait pas jusqu’aux profondeurs, comme si le désir s’engageait dans toutes mes impasses intimes, qu’aux embranchements décisifs un éboulis de pierre coupait la route en deux. Le plaisir ne venait pas. Orgasme enfoui trop profondément, dans des couches géologiques sans nom, minéral fragile, tremblant, invisible. 

 

Je demeurais insensible à la main follement désirée dont la matière, au contact de ma peau, changeait. Devenant métal dur, froid après avoir semblé argile mou, tiède.

Brusque, impatiente, douloureuse. 

 

Moi, je ne savais quoi faire de ce désir, ces impasses, ce courant électrique, alors je reprenais les paroles, les mêmes depuis le début, comme une comptine ânonnée de toute ma chaleur tourmentée. Je me disais qu’en répétant toujours la leçon quelque chose finirait bien par vibrer, une juste récompense me parvenir, alors je disais, je répétais, je m’exclamais puis je me suis tue sans croire au silence. Je me suis tue. Aphone. 

 

Je ne dirai pas que c’était désagréable, je dirai que ça rendait le temps long comme l’attente dans un train arrêté en pleine voie. On signale un problème électrique pour expliquer la paralysie momentanée. Je revenais à ce problème électrique, le signal ne se traduisait pas, aucune intervention intérieure ne semblait pouvoir ressouder les fils dénudés. Tous mes efforts semblaient vains.  

 

Je restais assoiffée, le corps impertinent, rageur ou vengeur. Pourtant, je jouais le jeu, j’écoutais les désirs des garçons puis, sans que rien ne s’en trouvât changé, des hommes. Toujours la paume d’argile devenait la pierre rude, insatisfaisante, puissante d’aucun feu. Les poils, les leurs, les miens, un buisson d’orties frôlé d’un peu trop près. 

Le désir intact. Le petit animal grandissait, atteignait une envergure mythologique.  Je me souviens :

Le garçon que j’aimais dormait d’un sommeil pur et je me tordais, agitée d’un désir qui me paraissait coupable. Dans l’immobilité son corps retrouvait lentement la couleur tendre du sable chaud, je sentais dans les creux de son dos comme de minuscules tanières, des abris microscopiques qui sentent bon la forêt, la mousse, le refuge et la cabane maladroite. Le désir montait, intact, comme une musique intérieure, une fanfare festive, assourdissante. Ca ne clochait pas ici. Puis s’écrasait, anéanti sur une plage vide, n’abandonnant aucune trace sur les galets ronds et polis. La marée montait, puissante, sans jamais dépasser la falaise immense de la côte. Le plaisir devait se trouver de l’autre côté du mur infranchissable. J’attendais le déluge. 

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11 décembre 2021

KOTS

Tu ne vas pas reculant mêler
la sueur à la sueur le sang avec le
sang
au long dîner de ton toi épuisé
Comme chaque fois tu tiens
entre tes mains toute ta vie
cette mémoire de rien du tout
cette vie la tienne autant qu’au receleur
le bracelet dérobé
Tu ne vas pas reculer
Tu déposes, brume brûlante
ton espoir ta croyance
ton dieu supérieur et tes idoles
paniquées
tu alignes près du ring
toutes tes superstitions
le pendentif d’os cannibale
la tête minuscule d’un sorcier
vaudou terrassé par sa propre magie
le miroir dont on dit qu’il renferme l’image
immortelle
de Nicolas Flamel
le Saint-Suaire acheté
à l’ombre du grand temple
auprès d’une jeune juive aux cheveux
teints orangés tant dorés que tu les pris
pour la moisson et la mort
une croix toute tordue
d’un martyr égyptien qui refusa
d’embarquer avec les Dieux
Tu te signes tu ne recules pas
à la montée des eaux tu ne crains pas
le dégel du continent arctique
le tonnerre des neiges fondues
dévalant à vive allure prédateur
blanc insatiable
Toi, séisme le poing pied
la main elle passe tu la devines
la main passe lentement lente la main
qui passe t’effleure la main qui passe
t’effleurant cette main dure sévère
lente à mourir cette main comme
les cheveux roux d’une vieille juive
un jour à Jérusalem qui vendait aux
naïfs l’ombre la cendre du Christ
il fallait regarder les mains
de la vieille juive
rouges les mains rouges les cheveux
du sang du sauveur
la main touche
quel espace ouvert là
soudain
quel abîme
sépare en deux le doux le dur.
Tu entends au loin des voix inhumaines
comme le chant aphone des anges déchus
le froid soudain t’entre dans la peau semblable
à dix mille clous te perçant les membres
te voilà serrant les dents la main revient
tu distingues dessus l’ombre du sauveur
tu mords la main tu bois le sang de la main
tu entends de l’autre côté l’hurlement vivant
de celui qui tient sa main
la mâchoire mâche la main maintenant
dans une étrange mare de baisers et de brisures
ta main à toi se lève ta main à toi affamée
d’espace parcourt le vide à une vitesse inouïe
quand dans l’air accourent tu ne les comptes pas
d’autres mains sèches ailes dures polies par l’effort
par la mort
on te parle
comme si tu ne pouvais plus
entendre
comme si tu ne pouvais plus
sentir
tu demandes

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  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
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