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boudi's blog

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10 juillet 2023

L'arpenteur

Parfois, parce que mon rapport au temps, comme je l’écris si souvent, me rend tout futur inenvisageable, j’aimerais vivre à perpétuité dans des instants, ceux de grâce le, disent les musiciens, sweet point.
Au parc Monceau, avec K., je connus un de ces moments là, ô temps suspends ton vol, qui, instant, recommençait souvent, durant une heure, décharges répétées, douces ou dures, tendres le plus souvent. Pour moi, je lui confiais, tous ces prénoms, toutes ces initiales répandues sur mon blog ne constituent pas seulement une façon de parler de moi, de revenir à moi, ces mentions, presque des invocations en réalité, affirment de qui je parle, leur donnent une texture, une solidité, celle des mots, peau véritable pour qui, poète, passe sa vie à se barbouiller de verbe. Si les femmes, surtout, se concentrent ici c’est que je passe le plus clair de mon temps entouré de femmes, parce que, le plus souvent, avec elles je me sens bien, mieux de ne me sentir pas le devoir de jouer un rôle ce qui pour, et c’est faire erreur sur moi, se perd en séduction, paraîtrait une contradiction. C’est que je ne séduis pas, j’avance peu de gestes, je tends rarement ma bouche, avec les filles, pas toutes, évidemment, celles dont j’aime l’odeur, la conversation, le regard et la petite dissonance, ce truc, comme une dent légèrement ébréchée dont on ne voit la fêlure qu’en approchant de près. Je cherche cette proximité, ce point de vue d’où l’on voit tout. Moi, tout entier livré, sans dissimulation, moi, avec la maladie, les efforts, les ratages, moi avec la superbe, aussi, la soie, les mains jointes suppliantes, moi avec le geste prodigue même les poches vidées - les nuits longues épuisent le salaire. Avec les garçons, l’ennui toujours finit par poindre, cette impression de devoir, sans cesse et toujours, me comparer, me mesurer, comme si toute conversation, y compris chez les gays - je ne connais pas assez d’hommes trans pour les inscrire ou les exclure de cette typologie - imposait une toise, un mètre, une balance, que, toujours, une évaluation, un contrôle surprise pouvaient surgir. Probablement que, beaucoup d’autres types, avec les filles, se sentent, parce que charmer, pour eux, signifie mentir et truquer, ce devoir de jouer pour commettre leur piètre larcin, une nuit de baise ou l’amour feint.
Ces prénoms ici m’accompagnent, à égalité avec moi-même, à K. je décrivais que, chacune, jalonnait ma vie, en figurait une étape mais aussi une partie du chemin, point autant que ligne, que seule leur empreinte - forme et largeur - la profondeur du sillon, les différenciait. Elles ne figurent pas des sortes de trampoline qui me permettent, à leurs dépends, de bondir sans arrêt hors de moi, elles me dédoublent, m’enchantent et, même, me gracient d’une peine sur moi, malgré moi, pesant. 

Il me souvient, alors, les truffes accompagnant les pensées, de moi, dans ces vérités révélées qu’offrent les psychotropes, soutenant auprès de Louis que nous pouvons choisir ou bien de creuser, dans le monde, une infinité de trous ou bien de se consacrer au forage d’un seul, que les deux, qui volage ou sérieux, qui séducteur ou éthique ; Johannes ou le juge Wilhem. J’ignore qui trouve le bien précieux, si toutes les profondeurs, à égalité, après un temps conséquent, recèlent de richesse (et si creuser en était déjà la richesse, la découverte des pierres singulières, de la matière inconnue, rêche, connue des seuls aventuriers des gouffres) ou si, à force de multiplier son geste nous apparaissent maintes pierres précieuses, éclats de vérité ?

L’instant, avec K., durait, se renouvelait, je n’aimais pas ce jour, la forme de mon corps, j’éprouvais envers lui une distance insupportable, le désir naissait, malgré tout, à l’intérieur de mes membres, et nous nous embrassâmes d’un doux, bon, profond baiser, ceux qui sentent la fontaine, la cascade, un peu la forêt après le passage des loups et qui abandonnent une goutte de peur et une mèche brutale. Il y avait ce côté, quand, ouvrant les yeux, au milieu du baiser, je la voyais elle, son visage au-dessus du mien, les yeux grands ouverts, scrutant, je me demandais qui voyait, alors, le mieux, celui qui, les paupières closes engendrent à l’infini le moment ou qui, prudente ou surprise, le regarde en train de se faire.

 

Temps suspends ton vol, je dis, ce moment si répété dans sa grâce, c’est par la découverte, lointaine, de son corps, ses hanches contre la main, une apparition, toujours d’une autre forme - belle, charmante - hors de la vision, de ce sens si fortement gaspillé, usagé à l’infini, dans la main qui serre et entoure, la pression plus ou moins forte à la taille, cette apparition, plus encore que par les mots.

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10 juillet 2023

Balthazar

Nous parlons avec J. d’organiser, pendant l’été, une longue marche - le syntagme m’évoque Mao, la révolution - elle me rapporte la quasi-tragique expérience de E. qui s’essaya, lui aussi, à ces longs dangers pédestres, parcourant, une petite bouteille de Vittel comme seul viatique, le chemin de Stevenson subissant les affres logiques de qui tente l’aventure si peu préparé, si mal armé, exposa sa vie à la mort et ne s’en sortit que de justesse, trouvé là par des randonneuses mieux équipées, elles prévinrent les secours qui le sauvèrent. J., me dit que, forcément, c’est un truc de mec, ces équipées hasardeuses, les risques démesurés pris, surestimant sa force tout en, avec plaisir, exercice de la bite et le couteau, s’exposer au danger pour jouir d’en triompher. Sur Twitter Léna, à la suite d’une étude qui le démontre, rapporte que, durant les randonnées ou toutes activités physiques au long cours où le danger règne toujours proche, elle ne connut la menace vitale qu’accompagnée par des hommes, ceux-là, surestimant leurs forces, continuant après les heures raisonnables à poursuivre la route ou pensant prendre à travers champ un chemin déconseillé à cause des trous de boue ou des serpents. Cet esprit téméraire des hommes contre la prudence des femmes permet, dans des circonstances moins…triviales, de découvrir de l’imprévu, d’entamer le normal, le connu, pour, par cet excès d’inconscience et d’ambition virile, inventer le monde. Ceci, cette témérité, associée, par accident et éducation, aux mâles, concerne, aussi, autant, surtout, l’optimiste, celui qui, par nature, diminue le danger et estime plus fortes ses chances que tout calcul diminuerait. Les inventions, comme les morts parfois, sont à ce prix ; les femmes, conditionnées à la prudence, à ce qu’on appelle, aujourd’hui, le care osent moins à l’exception de quelques êtres dégagées de ces déterminismes - de plus en plus je crois.

J., propose que, après un bref entraînement, nous suivions les traces de Péguy, nous rendant à Chartres, épinglant sur la carte des GPS, les étapes, c’est à dire, elle précise, des hôtels avec baignoires, seules à même de soigner ses jambes endolories par l’enfer. Je lui précise, pour avoir pratiqué assez la randonnée et connaître de plus habiles que moi, que, ce qu’elle évoque, une marche de plusieurs jours, avec entre 20 et 30 kilomètres chacun d’entre eux, blesse les pieds qu’importe les bains ou les capsules de cryogénisation mises à notre disposition. La marche blesse mais, par bonheur, après le deuxième jour comme me le disait l’ami tchèque capable de marcher tout un été (à ma plus grande incompréhension), lui aussi, malgré l’expérience, connaissant les diverses blessures, la sensation de la douleur disparaît. Les exilés, quant à eux, marcheurs éloignés forcés de leur terre d’origine, ne perdent jamais leurs ampoules au coeur et, toute la vie, souffre de cette longue distance parcourue. 

Nous regardons ensemble les petites randonnées en région parisienne, ces GR accessibles par le RER, mercredi, peut-être, selon ses disponibilités, nous amorcerons nos premiers essais.
J., après l’apprentissage, après Péguy, envisage aussi une autre marche, plus longue, avec un âne, pour rire je lui dis que, chacune des aventures, déjà, grâce à ma compagnie, comprend un âne et, aussi, par la sienne, une mule (ou du moins sa tête). Enthousiaste ça ne coûte que 850 euros par personne âne compris, somme que je ne trouve pas pouvoir, si légèrement, être précédée de la préposition limitative et heureuse que. Elle ajoute, interloquée, c’est le prix d’Hydra. Je préfère Hydra, la Grèce, les souvenirs de Léonard Cohen, tant pis pour Balthazar (l’âne déjà nommé). Elle admet, aussi, préférer Hydra, se prenait surtout à rêver de, cette année, débarrassée des couillards comme elle appelle ses exs et de façon plus générales les êtres qui l’encombrent aujoud’hui ou au passé, dont les goûts n’allaient qu’aux hôtels de luxe et au confort, profiter de ma souplesse en tout - être le plus gentil - pour tenter d’autres expériences. De les lui offrir, déjà, en rêves et en possibles, vaut, probablement, déjà, un âne. 

7 juillet 2023

a

mai 2023 archives

 

Le flux de conscience, je me demande si, abandonné lui, dans sa forme, disons primitive, lorsque j’écrivais, par exemple mes, poèmes minutes, révélais-je, alors, les pensées, le langage inadmis ou, cette expérience ne produisait un propos que lié à la situaiton 

 

Le café du père Tanguy, sur la place Toudouze, juste en bas de mes fenêtres, incarne parfaitement l’idée de Pigalle devenue SoPi. Le lieu est joli, élégant, raffiné, même. Le motif des chaises en (faux?)osier s’accorde à la couleur des tables, un beau vert émeraude ; accord répété sur les parasols et la carte, redoublé par la végétation qui s’échappe de pots situés en hauteur, entremêlés à des cages de chanvre où les lampes projettent une douce lumière orange.
Il existe, à Paris, de nombreux lieux en toc, qui se donnent l’air, ces restaurants qui ajoutent quelques poussières de paprika sur le poulet surgelé, les petites billes de sauce au chocolat sur la Tarte Tatin industrielle. Le Café du Père Tanguy ne correspond pas à ces lieux là, il ne correspond pas non plus, à ces endroits qui imitent, le cool, le contemporain, le moderne. Ce lieu, au final, ne fait pas semblant, cependant il dupe. Sa profitabilité limite son élégance, sa mauvaise foi et sa truquerie, il la tire de son bilan comptable. Ils servent le café dans d’élégantes tasses au liseré doré, à la soucoupe d’une couleur chaude et cassée (tasse couleur veine, souscoupe jaune aujourd’hui), au-delà des apparences le café à 2,5 euros (prix moyen du quartier) ne vaut rien, le comptoir richard qu’on ne sait être du café qu’à l’amertume qu’il dégage. Le café résume le lieu qui, lieu, ajoute sans cesse à la réalité de ma description. La carafe d’eau imite les cruches à vin de l’antiquité romaine. Les cocktails vous parviennent dans les verres - le contenant - propres à satisfaire les barmans les plus exigeants. L’alcool employé, quant à lui, appartient à ceux sans saveur, grand public, malgré le prix, pourtant, des cocktails égal à celui du Sister Midnight où la création côtoie le luxe.

7 juillet 2023

(avril)

avril 2023 : je publie les textes écrits il y a longtemps, il s'agit d'archives

 

Lorsque je suis, récemment, entré dans la pire crise de mon existence, après avoir reçu, de certains, un soutien celui-ci s’est étiolé parce que, un mois durant, et pas davantage, un mois terrible, certes, mais un mois seulement, la rage habitait mes mots sans jamais rejoindre ni mes actes, ni mes gestes. Entre dire et faire il existe, souvent, un pont, en mon cas, ce pont, j’en coupais les cordes.

A longueur de pages, j’écrivais, pourtant que dire prévenait le faire et tout le monde entendait, en ceci, une menace, tandis qu’épuisant, verbalement, l’éventail des possibles atroces, je les expulsais de moi, leur rédaction valait, justement, absolument leur neutralisation. Or, tandis que, pourtant, l’abstention réelle eût du témoigner en ma faveur, tout le monde s’exclamait que, non, définitivement, avoir dit, déjà, c’est avoir fait. Comme si, dans l’état de crise qui me parcourait, cette épilepsie de la raison, me retenir moi moi-même, seul moi me retenant, n’épuisait pas mes forces et, plutôt que de m’attirer les récriminations, eût du appeler les félicitations soulagées de ce monde qui me conspuait.

Je le répète, encore, le catalogue de nos inactions n’est pas celui de nos ambitions, les écrire les nie. Il ne me restait que ça, parce que, je me retrouvais face à des décharges gigantesques d’injures et de mensonges et, personne, plus le temps passera, ne pourra le nier. Personne.

Il me semble, pourtant, que cette barrière étanche édifiée entre ces deux façons, dire et faire, m’élevait, que son érection me coûta une énergie folle, il me fallût trouver assez de satisfaction dans l’expression verbale qui, rappelons-le, demeure mon art, pour me distancier de tout acte concret. Qu’on ne me rapporte pas la performativité d’un dire, parce que, je vous assure, dire que l’on aurait pu casser la gueule d’un type et effectivement la lui casser fait autrement mal au nez.

Au pire, vous eûtes à en souffrir l’exposition publique de vos noms sans, jamais, qu’aucune publicité n’exista, AUCUNE. Je ne nie pas l’angoisse éventuelle que certains ressentirent, je leur dénie, par contre, le droit de se dire harcelé quand je subissais des déferlantes de haine. Encore, lorsque j’écrivais je n’ai payé aucune régie pour accroître le trafic de mes pages, je ne menaçais pas, je répétais que, vraiment, je me contenterai de ça. Vous preniez un engagement pour une prétérition.

Des choses insupportables, la primeur d’autres récits me blessa, ils gagnaient en raison de se voir exprimés les premiers et, pourtant demandant parfois que leur existence demeurât exclusive aux interlocuteurs, furent répétés. Tout déplacement, la poésie nous l’apprend déjà, change le sens et l’altère.

J’apprenais de nouvelles choses terribles, la première, douloureuse le chantage au suicide. Comment, celui qui faillit effectivement se tuer, qui porte ça en lui depuis sa naissance pouvait le mettre réellement en jeu.

L’autre, tout aussi triste, voulait que je vivasse mal la rupture tandis que je vivais mal l’abandon et la trahison, qu’importe les motifs, aucun, à mes yeux ne les eurent pu justifier. Aucune raison, à mes yeux d’escatologue, ne pouvait tenir.

Comment pouvais-je, par ailleurs, vivre mal, quelque chose qui ne me fût jamais, en soi, annoncé. Le deuil pour, commencer, par un certificat de décès. Cette faute, pourtant, n’entraîna aucune excuse. Depuis le départ, pourtant, je n’avais besoin que de ça.

Lorsque L. ou Y. me demandèrent si je voulais rester avec Marie-Anaïs après ses errances, je leur répondis, sans peine non. Sans acter, ici, le rompre, qui ne peut exister sans, disons, concile. Ce me rendît d’autant plus insupportable ce je ne supporte pas la rupture, parce que ma révolte se situait ailleurs, que la fixer sur la rupture empêchait de penser le reste et une éventuelle culpabilité ; cette réflexion ne réclamait pas une condamnation, elle réclamait, comme tu me l’exigeais des mois, une méditation franche et douloureuse. Tu ne t’y essayas pas. Comment pouvais-je le voir comme autre chose qu’une fuite. Qu’une trahison de plus. Je cherchais à réaccorder le réel. J’y avais droit.

Je ne supporte pas les rumeurs, les paroles rapportées et déformées, je ne supporte pas le dédit et les justifications de celui-ci. Je ne supporte pas, aussi et surtout, que, si un mois, je devins fou, encore, il ne s’agissait que d’un pauvre mois quand, dans la figure, je me prenais un tel déchaînement, que j’en mourus, littéralement et que, ce mourir, se voulait aussi soulagement des uns et revanche contre les autres. J’ai craqué un mois. Et, vis-a-vis de Marie-Anaïs, j’ai compté, dix jours au maximum. Sans reconnaissance, jamais, de ce que je me pliais à toutes ses exigences. Ni pardon, de sa part, de n’avoir su leur accorder, alors, la dignité que je méritais.

Les violences psychologiques prennent des formes diverses. Le silence et l’évitement, ne provoquent pas moins de dégâts que le cri. Le second subit seul les admonestations en raison de son existence publique. Nous ne condamnons que ce que nous voyons. La parole du fou, à cause de ses exagérations réputées, ne vaut rien. Je ne m’en fiche pas. Je ne m’en fiche pas parce que, voyant les réactions autour de moi, parlant aux gens, je me rends compte de ce qu’un récit unique et exclusif s’est désormais installé. Le tien. Lorsque je mettais en lignes nos échanges il s’agissait, pour moi, de montrer que, oui définitivement, tu avais bien dit ce que tu avais dit.

Marie-Anaïs, lorsque je lui exprimai que la disqualification qu’elle faisait subir à mes propos à cause de leur violence, s’apparentait à celle subie par une femme déclarée hystérique, elle se révolta disant c’est moi la femme donc c’est indécent, or, l’analogie reposait sur ce que, ici, le fou, puisque cet état m’était rappelé, se voyait renvoyé à sa condition de fou, disqualifié par elle.

 

Je garde profonde amertume de ces faits, de ces paroles rapportées, de l’absence totale de considération pour un être, qui en quelques mois, vît, son monde s’effondrer, ses liens avec le réel se distendre.



(R., la seule fois où le dire - et ce jour là je n’avais pas dit justement - allait se changer en faire, l’en empêcha. Tout ce que je savais, à ce moment là, je le connaissais de M. ou de A.).


7 juillet 2023

histoire de la violence

Je me souviens de Guillaume, en 6e1, qui, pendant les pique-nique, choisissait toujours, après le premier, des chips saveur bacon, pour éviter que Mohammed, surtout lui, n’en demande et de devoir vivre avec la pression du refus, l’insistance de Mohammed. Cette stratégie, en réalité, eût pu s’avérer inefficace si la nomination bacon n’excédait pas la réalité matérielle - jadis - de ces chips qui, en général, ne contenait pas une once de porc. Guillaume, j’y pense, est le premier garçon que j’ai blessé en le frappant, j’ignore, le motif, je me souviens que nous nous tenions dans la partie boisée de la cour de récréation, que quelque chose avec Alexandra se déroulait, et que, serrant mon poing, je l’abattais sur le front de ce garçon bien plus grand que moi. Il en résulta une énorme bosse sur son visage, et, après un bref échange, il me précisa je te dénoncerai pas. Je ne me souviens pas des exactes circonstances qui retinrent sa délation, je sais, par contre, qu’il ne s’agissait pas de la peur. Il me tenait, je crois, et ce coup me servit à me défaire de son emprise. Je sais que je l’ai frappé, avec le poing, parce que je voulais connaître ce que ça faisait. Plus jamais je ne frappai quiconque au visage, si, depuis, je me suis battu de nombreuses fois, il s’agissait plutôt d’empoignades et de bousculades, violentes, parfois mais qui n’attentèrent jamais à la face. Ou bien, alors, seulement, dans cet art brutal, du krav maga, mais, jamais mon poing nu ne s’abattît sur aucun visage. La sensation, d’alors, ne m’a pas quitté, la résistance du front, le choc sourd des phalanges. Ce coup, j’ai détesté le porter. 

 


Je liste, ici, les ingrédients des chips carrefour bacon : 

 

Pomme de terre déshydratée 52%, huile de tournesol, amidons (blé et pomme de terre), sirop de glucose, farine de riz, sel, dextrose, arômes, émulsifiant: mono - et diglycérides d'acides gras, huile de colza, paprika, oignon en poudre, ail en poudre, arômes de fumée, colorant : extrait de paprika.

 

Je me demande quel est le statut jurisprudentiel, de ces aliments présentés comme contenant du porc et n’en contenant pas. Si en Islam, sans contrepartie rédemptrice, la consommation involontaire ou par méconnaissance d’un aliment illicite, n’entraîne aucune sanction est-ce que, en miroir, la consommation d’un aliment réputé et présenté comme impropre, doit être, à ce titre considéré comme tel, indépendamment de ses qualités réels ? Un interdit putatif pesant sur l’aliment ?


En droit français, par exemple, dans son aspect théorique du moins, la vente d’une substance présentée comme stupéfiante et qui ne le serait pas en réalité est sanctionnée de la même façon qu’une substance classée à ce titre. Ainsi, pourrait être jugé pour trafic de stupéfiant celui vendant des fraises tagada en les présentant comme de l’ecstasy. Gérald Darmanin et ses troupes, d’ailleurs, démantelèrent récemment, un trafic de fraises tagada pensant abolir un trafic d’X, qui, hélas, ne permirent pas la protection de la jeunesse, mais satisfît Haribo ravi de voir cette concurrence déloyale s’achever. 

 

Ainsi, certaines substances consommées pour leurs effets psychotropes sont vendues, sans que l’acheteur ne soit dupe, bien au contraire, comme de l’encens. Il en allait ainsi, du moins dans les années antérieures, de la sativa, herbe à fumer, ou plutôt, lorsque vendue à par-fumer. 

 

Puis-je, musulman, consommer, sans faute, un aliment qui imite le porc sans en contenir si je sais cette absence ? Ou bien, la présentation domine la réalité, comme si, celle-ci, portait un risque trop grand. Existe-t-il, alors, un principe de prudence, excédant, une stricte lecture des exégètes musulmans ? Se donner le plaisir de l’arôme porc c’est déjà s’engager dans la voie du péché, les vegans, eux, ne souffrent pas de pareils complications, leurs produits qui dédoublent (viande, nuggets etc) les aliments animaux servent, en effet, à compenser la perte de qualité de vie qu’induit leur éthique. C’est que, en ce cas, le vegan est le seul à choisir son éthique tandis que le musulman, lui, se soumet à une croyance établie par d’autres, une vérité absolue qui n’admet, sous peine de l’enfer, aucune contradiction.


Je pense, continuant sur ce registre, à Tristan, en 4e2 qui, las de donner, sans recevoir, élève trop parfait, des copies doubles pour les devoirs sur table, les proposait à la vente. J’ignore si cette initiative lui venait en propre ou si ses parents l’encouragèrent pour ne pas dire l’y contraignirent ? Il me semblerait toute fois curieux qu’un adolescent exprime, auprès de ses parents, son immense frustration de donner sans fin des copies doubles à ses camarades. Je crois qu’il indiquait, aussi, sur son bureau, sur une feuille de papier (se la paya-t-il ?) dressée en pyramide, comme lorsque nous affichons, au début de l’année, nos prénoms pour les faire plus vite apprendre à nos profs, n’être pas distributeur de copies ou quelque chose de cet ordre.
J’imagine, il est vrai, l’immense lassitude de se voir, sans cesse, interpellé à cette seule fin.

Je rêve, souvent, quant à moi, de rapporter à ma mère le harcèlement scolaire violent dont je fus l’objet au cours de ma scolarité et, surtout, en 3e8 à Passy, interne, en ce temps là. La déformation, comme je l’écrivis, des résultats scolaires autant, surtout, plus grave, du rapport aux autres. Un manque de doigté, une forme certaine de brutalité. 

 

Je rêve, souvent, de cet aveu que je ne confesse au monde que depuis quelques années, depuis ce moment, à l’été 2019 où je me refusai, radicalement, au mensonge. Ce principe se délaie, évidemment, avec le temps, non parce qu’il s’userait au contact de la réalité, mais, bien entendu, parce que la vie, plastique et mouvement, nécessite toujours des ajustements. Comme je l’écrivais, auparavant à propos de Marine, un principe exercé radicalement porte, paradoxalement, sa corruption. Qui ne s’adapte meurt, voilà au moins une leçon de Darwin à ne jamais oublier. 

 

j’ai depuis confié à ma mère cette époque

Je pense, étendant, me souvenir de ce que Chloé me rapportait, quant à elle, n’avoir jamais eu à souffrir de harcèlement parce que, notamment, les personnes les plus populaires, s’y refusaient. J’admettais, jadis, comme possible son énoncé avant de me raviser, elle n’existe nulle part cette absence, elle est consubstantielle à tout groupe. Qui l’ignore ou bien joue l’aveugle ou bien, pire, participe au massacre. Je ne pense pas que Chloé y participait ou, bien sinon, par cette abstention, qui, reconnaissons-le, y contribue.

De Chloé, c’est bien la chose curieuse, encore, qui me remonte ici, je ne comprends pas le blâme, au point, à force de tourner dans ma tête nos conversations, imaginer qu’elle me confonde avec Pierre-Adrien dont elle mJ’ignore s’il s’agît, alors, d’une sorte de principe mis en oeuvre aujourd’hui, pour mal me colorer ou m’assimiler à Pierre-Adrien, j’ignore, aussi, si, considérant son âge d’alors, elle refuse toute entente possible. M., pourtant, peut confirmer, qu’à ce sujet elle me mentît. 


Je m’interroge, vraiment, à cause, aussi, de ce que trouble toute résolution de ce qui aujourd’hui compte, compte vraiment.

Si de Margot, il s’agit, bien entendu d’une revanche des deux mots qui la hantèrent pour la vie, et, quoi qu’injuste, est au moins intelligible. Disons, qu’avec elle nous sommes à 2-1 en sa faveur. Sa volonté, très cruelle d’adultère, ma réponse des deux mots, aujourd’hui son attitude.
Je me souviens, aussi, des excuses que je lui présentai, en 2014, à ce sujet, à cause de la disproportion entre ce que je souhaitais faire et ce qu’elle endura. Je me souviens, aussi, qu’apprenant alors ma relation avec Marie-Anaïs, me demandait de l’embrasser de sa part.

J’ignore, aussi, de quoi il en retourne totalement, in fine, alors, son copain, suivant, avec lequel elle souhaitait me tromper, et au final, pour qui elle me quitta, la ruina à peu près dans l’appartement qu’ils occupaient ensemble et dont elle assumait toutes les charges.

J’ignore, oui, vraiment, si, de leur part à elles, je ne me trouve pas comme le concentré, d’autre chose, le représentant, d’un mal plus général. Pourquoi pas, après tout ? Mais, demeurant un individu, et non un principe, il semble tout aussi normal de ce que je veuille me défendre.
Marine ou Esther, par exemple, appartiennent, aussi, à cette catégorie. L., lorsque je blâmais Marine - la faisant elle aussi représentante de toute la part injuste - me reprochait d’aller trop loin, que, toutes mes prolepses de menaces valaient quand même menaces.

Si, j’ai renoncé, grâce à R. (et je l’en remercie) à ce véritable projet funeste, il ne me semble pas incongru, d’aussi, expliciter, pour moi-même et le monde, les motivations de certaines qui ne correspondent pas seulement à la vérité. Que, j’en suis sûr, ces personnes doivent aussi, et pourquoi pas grâce à leur union actuelle, obtenir et réclamer la justice qui leur est due. Je refuse de porter sur moi, Marine, Esther, Chloé, ceux que d’autres vous firent. Parce qu’il est aussi question de ça.

Marine, par exemple, utiliserait, pour me jauger aujourd’hui, des actes très anciens, si elle peut considérer - je ne lui reproche en rien - que ceux-là trop infamants ne peuvent jamais être séparés de l’humain, elle ne peut pas, pourtant, nier celui que, maladroit, changeant, mauvais et bon, je fus aussi pendant ces douze ans. Parce que, quoi qu’elle dise, elle me vit changer. 

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7 juillet 2023

lol

Pathétique jouisseur tu te jettes dans le feu où
tu crois trouver ta patrie toi fait sans rien retourne

à la cendre cadavre au trou perdu l’ascension 

plate tu ne démérites pas pourtant

 

au plaisir toujours pris écrivons

toujours prêtre

ces offices païens les mains 

marquetées les ridules petites

soi narthex comme le long

poème de celui fou bientôt

ou déjà tout en paresse la folie

avec lui impatiente le dévora 

de grandes bouchées dès

l’aurore 

 

pauvre feu où tu te jettes de bouche en bouche

tout est affaire de décor / changer de lit changer de corps /

à quoi bon puisque c’est encore moi / qui moi-même me trahis

cette joie brusque soudaine la main posée sur la taille la sensation

des muscles attachés aux hanches 

le grain de beauté s’agitant sur le sein au rythme de la respiration

 

tu ne démérites pas j’écrivis j’écris 

tu ne démérites pas tes doigts bougent

suivent tu ne sais plus quel chemin 

peu visible 

ainsi aveuglé tu le parcours quand même

la bouche sa forme taillée dans l’étoffe lointaine

 

pathétique jouisseur je me dis la bouche pleine 

à la table voyant au loin tous les désastres engloutir

puis il y a la beauté après bien après avant ou pendant même

l’orgasme

le grain de beauté

qui bouge comme un plaisir fuyard

au rythme de son souffle

4 juillet 2023

Onlyfans

 

En ouvrant Snapchat, je vois que S. a posté une story où elle redirige vers un linktree sur lequel je ne clique pas. J’ouvre rarement, sauf pour me cultiver quant à Bassem, cette appli. Nous n’avions plus, avec S., depuis plusieurs années maintenant, qu’une relation distendue et, regardant la date, nos derniers messages remontent à trois ans.

Je lui écris, elle m’apprend qu’elle vient de se marier que de justesse nous nous ratâmes parce que son voyage de noces en Europe la fit passer Paris qu’elle adore tant. S., vit aux Etats-Unis, à Atlanta, adore la France et les chiens, adopte les plus abîmés par la vie. Son dernier chien, j’oublie son nom, il me reviendra (je croyais me souvenir, j’allais écrire Chico, sans certitude, en remontant notre conversation WhatsApp, Chapo, il s’appelait Chapo), avait été abandonné et maltraité. Elle le recueillit avant qu’un cancer ne le dévore. D’abord une jambe puis la vie. 

 

S., m’émeut, je lui avais offert les poèmes de Carver et le paysan de Paris traduit en anglais. Nous conversons toujours en anglais, elle écrit de la poésie, que j’aime assez, peut-être à cause de ce qu’en anglais tout résonne miraculeusement. Cette langue est un instrument de poésie. Elle parle, pourtant, français. 

 

Elle me déclare que, sa famille is struggling, je ne sais, si en français, nous avons un équivalent pour décrire les galères financières. Si le sens précisément de ce mot ne tire pas sa couleur du rapport protestant, de destinée manifeste, à l’argent. 

 

Son linktree compte plusieurs liens, son snapchat, son instragram et son OnlyFans. La souscription à son OF coûte, je crois, 9,99e. Son Instagram, s’il lui permet de garder contact avec ses amis, lui sert avant tout de vitrine publicitaire, redirige, souvent, vers son OnlyFans, par ses stories elle laisse entendre des promesses de rapports virtuels, plus tard et ailleurs, contre autre chose que du temps d’écran. Elle propose, parmi les services d’être online 8pm-2am, pour discuter en français, anglais et espagnol, ratissant, par là, le plus large possible, l’important, pour son interlocuteur, demeurant, essentiellement, de s’exciter - érotiquement, amoureusement ou sensuellement - avec elle. Nous sous-estimons, de façon générale, le profil des clients des travailleuses du sexe, une part d’entre eux y recherche une forme complexe d’affection et d’illusion amoureuse, ce jeu de dupe s’entretient de chaque côté de l’écran, le rôle, ici, de la TDS étant de suspendre, au maximum, la crédulité de son client, de dissimuler à lui-même (se prenant aussi au jeu?) que le spectacle est bien un spectacle. Que, leur rapport se situe - quoi qu’en disent les théories de la domination - dans un équilibre toujours changeant, le pouvoir n’appartient pas toujours et définitivement à celui qui dispose du moyen économique, cette dépendance, parce que la TDS dispose de plusieurs clients, ne correspond pas à celle des maîtresses ou des lorettes, surtout, et les maîtresses ici, plus dépendantes, certes, plus puissantes aussi en disposent avec plus d’abondance, les TDS jouent, à leur guise, de l’amour, titre précieux, bien davantage monnaie que métal précieux, ne possédant de valeur que, exclusivement, celle qu’on lui agrée. La subordination économique, la première dépendance, se renverse quand l’amour, bien joué, c’est à dire, en quelque sorte, investi, s’étend irrésistiblement.

J’ignore si Sarah parvient, aujourd’hui, à produire ces formes de dépendance, ce qu’elle vend, marchandant sa personne, est du travail et pas de chirurgie, une ode au naturel (c’est à dire pas de chirurgie du corps tandis, qu’en réalité, elle s’offrit une rhinoplastie). Le rapport maintenu par ce biais là, celui d’Instagram entre elle et moi m’interroge puisque, par nature, je ne suis pas le destinataire de ses stories qu’elle adresse à ses prospects tandis que moi, son ami, ne les emploie, les stories, qu’à des fins phatiques, un moyen de conserver du contact, par des réactions, coeur ou flamme, et quelques mots parfois, donnant à ces stories une double dimension, celle du contenu - l’adresse aux clients - celle de l’usage abstrait et jamais déclaré des stories : maintenir le lien. J’emploie essentiellement Instagram à cette fin, maintenir le lien sans me lancer dans les laborieux ça va quoi de neuf haha. 

3 juillet 2023

Créma-torium.,

(samedi)

 

Complètement apathique, le corps penché sur la chaise du bureau, une pile Energizer, de travers, une seule, s’y tient immobile. La peinture de C., qui ressemble à un loup ressuscité par un nécromancien, se nourrissant de miasmes, les bijoux répartis, en désordre, la télécommande de la climatisation d’origine allemande (fabriquée en Chine), éteinte, le logo Suntec, le bouton rond, orange, de la mise en marche, la nouvelle lampe dont C. dit qu’elle ressemble à une lampe de vampire, j’ignore si les vampires s’éclairent à l’électricité ou s’ils préfèrent dans leurs châteaux des Carpates le charme désuet des bougies et des chandeliers, la base de la lampe est ronde, je ne sais quel métal la forge, la lampe, plutôt petite, pèse assez lourd, depuis sa base le métal s’affine en une fine tige simulant une branche, deux feuilles taillées grossièrement, inamovibles, y poussent — ont fini de pousser — puis la branche se recourbe et plonge, alors comme un entonnoir renversé, l’abat-jour, jaune et transparent, prend la forme d’un polygone aux surfaces clairement délimitées, à droite et à gauche, deux petites pierres rouges, transparentes, comme une goutte de sang figée ou des rubis — du sang ou des pierres chères nous ignorons quoi le plus précieux — des veines entourent les pierres de quatre côté donnant l’illusion de les tenir et non que ces pierres sont serties, le téléphone charge sur l’ordinateur avec le câble USB-C, mon câble USB « normal » — parce que j’ignore s’il possède un autre nom — USB-B peut-être — mais que serait l’USB-A — malgré les promesses faites par Amazon, ne fonctionne plus, je ne possède pas non plus, radinerie quant aux choses que l’on ne devrait payer, comme les tubes de lubrifiant ou les capotes, de dépenser 30 euros pour ça, un adaptateur USB-C, 17h29 chargé à 92%, deux barres de Wi-Fi sur trois, les clés, celle de la porte parallèle au bureau, celle de la boîte aux lettres, plus distraites, un peu plus haut, le boîtier des AirPods, chargé, lui aussi, par le câble USB-C directement sur l’ordinateur, batterie à 75%, le MacBook Pro M1 possède une longue autonomie grâce à son architecture parfaitement intégrée, Apple conçoit, symbiotique, le software et l’hardware, comble de l’optimisation, en face de moi, une punaise enfoncée dans le mur, halo jauni, autour de son rond blanc, une page des Caractères, arrachée ou perdue, la carte postale envoyée par Julia de Cuba, où, elle reproduit par dessus la photographie que je décris : l’écran d’un iPhone, 22:42, mardi 23 août, 37% de batterie, la petite flèche qui signifie que la localisation est active, les 5 barres du réseau CUBACEL, le petit trait, en bas, qu’on doit balayer vers le haut pour déverrouiller le téléphone, l’icône, en bas à droite, de l’appareil photo, la carte tient par deux stickers GL, des Galeries Lafayette, quand j’y achetais mes gants en daim gris, perdus dans le RER A depuis, un jour que j’accueillais les Airbnb de Mehdi, un couple de russes, en venant de chez Marie-Anaïs, le chapeau Stetson, conservé, poussiéreux, sa plume perdue, si charmante pourtant, ce couple russe qui, pour commenter leur séjour dans la chambre de Mehdi, écrivirent — lui surtout — que c’était l’appartement de bachelors — ce qui agaça Mehdi, le maniaque, parce que, surtout, je m’étais déplacé, le jour de la perte des gants, pour aider ce couple à solliciter un médecin anglophone ou russophone pour la femme russe qui se sentait malade, il y a longtemps, au début de 2017, avant que l’on soupçonne toute toux d’être mortelle, je finis le texte avant mon départ, au café en bas de chez moi, puis je quitterai Paris, la tasse jaune et ronde, son liseré dorée, le café tout bu, la tache sombre, au fond de la mousse — crema disent les italiens — séchée, la soucoupe rouge, le sachet de sucre jamais ouvert sans sucre je dis toujours à cette propositon, pour accompagner mon café, le verre, trop pettit, avec son faux-fond loupe qui donne l’impression d’un contenant plus grand, un peu, comme tout ici, paraissant mieux que ça n’est, la table verte où j’achève ce texte, tout est de bon goût ici, délicat et, comme je l’écrivis déjà, creux, sans vie, ici, ça ne sentira jamais la merde, l’iPhone posé, son verso fendu, à cause de la chute, dans l’escalier de chez Hannibal, samedi, ses escaliers glissants, parce que chaque marche alterne du carrelage et du parquet, ce qui, bizarrerie, me semble piège à tous les maladroits, c’est à dire à ceux qui, ethylisés comme moi, et élégants, en talons, l’ordinateur bientôt fermé voulez-vous vous connecter à l’iPhone de J., il me demande, pour pallier l’absence de Wi-Fi, je me connecte, pour poster ce texte

1 juillet 2023

INSEE

Puisque j’écris sans plan tout en m’animant d’une intention, mon récit s’éloigne toujours de la proposition initiale, écriture de digression, d’idées surgies, cet aventurier bohémien, marchant vers un emploi promis par je ne sais quel oncle d’une ville moyenne, distrait par l’insecte aux couleurs étonnantes, le suivant, prenant pour emploi, les chemins de traverse et les trous de verdure. Je rate alors le rendez-vous d’importance, celui concédé par pitié et devoir, créant de l’embarras.
Tout à l’heure je voulais écrire à propos de mon ex-belle mère qui, dans la rupture, constitue la plus grande consolation ; dans Eumeswil Junger, parlant des plantes venimeuses, classe, la mandragore, je crois, comme la seconde espèce la plus venimeuse après les belles-mères. Cette femme empoisonne les existences différentes, brutalise dans ce qu’elle imagine une rectification. Cette femme s’exprime par sous-entendus et double-sens qui ne dupent pas et, souvent, mêlent à l’embarras la colère. Elle possède le don de vous arracher vos moyens, elle touche des zones hésitantes en chacun, ces décisions, ardues et âpres, d’une vie différente de celle obligée et conseillée. Parfois, par épuisement, nous pourrions nous rendre à ses raisons ici, il ne s’agit pas de se rendre, comme je le disais à la morale de Marie-Anaïs que j’estime juste et que je peux choisir, qui me donne la possibilité - au prix de la dispute peut-être - de m’en détourner ; l’ex-belle mère, à l’inverse, commande une reddition sans condition, traité inique puisque ne dépendant que de sa raison, banissant le reste par un mélange d’injures et de disqualifications morales, de convocation de toute une masse spectrale — qui nous répugne au dernier degré — les jeunes collègues qui pour nous représentent plus ou moins de la brique sale. Nous discutions avec C., fille très riche, possédant un grand appartement dans le VIème, de ces pressions sociales, de ces vies, si peu enviables, gluantes et pathétiques. L’ex-belle mère, ne voit pas ceci, elle ne mesure la réussite qu’aux tranches d’impositions, aux statistiques de l’INSEE. Irrésistible Normalité Souhaitable Et Enviable.
Longtemps, parce qu’elle épiait ce que j’écrivais ici, et le jugeais — qualité consubstantielle de sa personne —  je m’abstenais, je me censurais, à son sujet, évidemment, sur le reste de ce que moi je vivais, oeil malfaisant de Sauron.

Lorsque le frère de Marie-Anaïs prospectait avant l’achat de son appartement, elle le mentionnait publiquement, sans que ceci n’intéresse personne, pour, par contraste, signifier combien Marie-Anaïs et moi ne correspondions pas, pensant, par là, nous anormalisant, tenter de nous redresser. Au mieux Elle dresse. Marie-Anaïs, longtemps, ne rétorquait rien à ces implicites parce que, le miracle de qui maîtrise vicieuse ces manières, permet, de se dégager, de prétendre que l’interlocuteurice a mal compris ; qu’elle est parano. Désormais, plus encore maintenant, Marie-Anaïs n’hésite plus à le signaler. A raison. Butée, auparavant, refusant de se rendre à sa mère, elle répond, désormais et contre-attaque. Elle se fait sa place. L’ex devra s’y faire. 

 

butée, marie-anaïs, propriété réversible, la protégeant des assauts trop violents et négateurs, lui empêchant, dans des moments critiques, toute remise en question, avec des conséquences, lorsque la tragédie exploite toute l’âme, excessives ou mortelles.

Je n’écriai (je voulais écrire écrirai) jamais à cette femme parce que, tout mot reçu de moi, qu’importe son fondement réel et antérieur à la rupture, se verra par elle disqualifié. Alors, je me permets ici d’élaborer ce théorème d’elle. Il y a deux ans, à la Norma, à propos de mon roman tortueux, où je souhaitais faire, comme conclusion, une place à Marie-Anaïs — c’est à dire à l’espoir — je n’omettais pas de mentionner l’ex — Marie-Anaïs bien moins ex que sa mère — qui ne pouvait voir en sa fille autre chose qu’un prolongement, comme si au-delà du seul patrimoine génétique, l’ex — désormais ex référera à l’ex belle-mère — elle partageait le même utérus, la même capacité de gestation et d’engendrement, un cordon ombilical, attaché pour toujours. Sa fille la continuait et la dédoublait ne mesurant pas, alors, combien par là, elle la torturait mincis, mincis, mincis, ai un vrai travail, trouve toi un autre mari (quelle ironie aujourd’hui). L’exx t ne vit que par injonction, son être commande, elle irradie sans, pour autant — amusant — s’espérer la place suprême, elle accepte son sort, j’ai un bon salaire admire sans l’envier Bernard Arnault, il valide son système, sa place, dans la hiérarchie, ne tient pas aux triomphes les plus purs, à la gloire ni même à l’espoir. Elle convoite un ordre qu’elle ne saurait définir puisque, mise à la question, elle ne cesse d’éluder, sans pouvoir jamais, pour autant, varier.

30 juin 2023

Air France

Je me souviens cette fille, la péniche, l’X., une fille, le prénom commençait par S., nous nous trouvions sur le pont, l’eau scintillait à cause de ce que l’X. fait tomber sur le monde une lumière de théâtre, elle ne me plaisait pas tellement, du moins la question ne se posait pas en ces termes, dans la langue de l’X, posée j’y eus répondu par le haussement d’épaules, S., sur le pont, me dit tu es bien entourée parce que des amies m’accompagnaient et que la nuit, pour les garçons, les amies filles deviennent un halo enrichissant, des mots banals, elle parle la langue des autres. S. me dit, j’ai froid puis, après une pause, ah si seulement quelqu’un pouvait me réchauffer. S. répète cette dernière phrase, moi je lui parle des vaguelettes dans la Seine, puis, cédant à son implicite, je l’embrasse, en moi, ça fait comme une tempête, le plaisir insensé de n’importe quel baiser, ici, j’embrasse la substance dans cet éblouissement chimique j’embrase mes synapses qui font l’amour avec mon coeur. Ce moment, qui ne voudrait le revivre ? J’ai envie de t’embrasser encore, je lui dis, elle répond, encore dans sa langue des autres, toujours, pour ça il faudra se revoir, nous échangeons nos numéros de téléphone que nous n’utiliserons pas, ni elle, ni moi. En bas, sous le pont de la péniche, un collègue de S., me dit d’elle c’est une chic fille, ou quelque chose de ressemblant, leur langue, encore, elle. Je lui demande tu me paies une bière tu sais ce que c’est la vie d’étudiant. Lui, travaille à Air France, comme S., il me répond non, je n’ai pas été étudiant. Cette bière, je ne la désire pas vraiment, comme je ne désirais pas S., j’expérimentais, par cette demande, la capacité à obtenir, par le sourire. Pas plus.
J. se moque de moi, en me lisant, dit, tu ne parles que de Marie-Anaïs dans des textes larmoyants ou de sexe. Curieux qu’elle voit, dans ces rapports sensuels ou amoureux, du sexe ou, le faisant commencer très tôt, dès la tension ressentie, même solitaire, étend le sexe, à toute mention du désir. Sacrée J. 

(texte débuté il y a trois mois)

30 juin 2023

Le ?

Douloureux, ces textes, gardés sur l’ordinateur, retenus, parfois, au dernier moment, considéré, soi-même, du dehors, pourtant, comme la crapule sans pitié, retenant, retenant disant retenant accusé de dire retenant de menacer quand dire là encore c’est ne pas faire et maintenant même dire ne pas dire des mots là présents, ces dizaines d’onglets sans-titre lorsque j’ouvre Pages. J’enrage de devoir tenir et tenir pourtant sous des huées, dégueuler, faudrait-il ? La rage, passe, je la polis, je me divertis.
Ces derniers jours, sinon ces problèmes d’argent à cause de je ne sais quelle horreur, me dénonçant, en vain, puisqu’aucune illégalité, suspendant, toutefois, l’arrivée d’argent sur le compte. D’où ce billet, d’où la rage, dans la sécheresse soudaine, ce dimanche de canicule étendu jusqu’au RIB. Le calme, tout de même, quelques mots échangés, de purs échanges administratifs, avec Marie-Anaïs, avoir de ses nouvelles, savoir que l’amour lui vînt, deux semaines durant, me réjouit. J’ignore, encore, si, écrivant, ici, je peux dire davantage. Avec K., au nouveau café grec de la rue des Martyrs, nous discutions de ce pouvoir dire, qui, chez moi, entretient un lien avec mon impudeur, déplacé, étendu aux autres, dans impudeur, entre le concept de scandale, comme dans pudeur, celui d’une prude réserve. La vie bien vécue, socialement la plus juste, se situe entre les deux. Probablement. Je me soumets toujours aux avis de Marie-Anaïs, je dis soumets parce qu’ils n’emportent jamais mon entière conviction, qu’ils relèvent de la croyance, comme dans la religion nous suspendons, croyant une vertu nous échappant, les voies du seigneur sont impénétrables. Dans ce cas, je choisis, à quoi je me rends, ce terme, emprunté au langage militaire, dit bien ceci, une forme de renoncement. Marie-Anaïs me disait c’est mieux de pas être un connard. Disons que ma situation actuelle indique que, probablement, connard véritable, sans retenue, cruauté toute entière, je serais bien plus heureux. Or, je ne le peux ni ne le veux, je m’épate moi-même, conversant avec n’importe quels tiers, de ne faire varier en rien mes opinions féministes, par exemple, et, exposant ma situation, je ne reviens sur rien. Si j’y apporte une mesure, elle provient de la raison, à laquelle Marie-Anaïs adhérerait tout autant. Marine exemplifie moins une dérive, ce serait grotesque, qu’une idéologie. Je le déplore sans considérer ceci tellement important dans la gestion collective des rapports de domination actuelle. 

Ne pas insulter François B., lui envoyant mes déjections, se situant au niveau N+1 de son art, pour contenter Marie-Anaïs m’embête encore aujourd’hui. Si au niveau moral et individuel, sûrement, elle a raison, au niveau personnel, de mon déploiement intérieur, elle a tort, or, ce je compte, compte, en la circonstance parce que ce n’est pas si grave. 

Cette question de la morale par le truchement d’un tiers peut déranger, qui maître nous orientant mal, engendre un monstre soi-même. Nous demeurons responsables, quand perdus ignorants, de notre loi. Maître, je m’amuse de ce mot qui ne se mobilise sans éclat de rire.
Je me sens, aujourd’hui, particulièrement bien, le désir, ce guide de toute ma vie, me revient, comme une vague violente, le baiser, un autre, celui-ci, dans le salon avec P., qui mannequin gracieuse, bouge dans le salon, comme un spectre défilant, prenant, dans la tendresse, des poses réelles, de statue profonde, le baiser avec K., quand notre désir brûlait, mutuel, sobre cette fois, de chaque côté de la table, la mousse de l’es(x?)presso passant, révélant le noir liquoreux, l’arbre factice, olivier forcément, d’où pendent les bouteilles blanches et jolies, de l’huile Kalios du nom de la boutique, nos corps gênés par les poteaux. Le ventre, mon ventre, qui brûle, ces retrouvailles avec la flamme, l’amnésique homme préhistorique, qui perdant, le souvenir du feu, de la fabrique du feu, trouve, loin de ses mains, hors de lui, la foudre répétant tapant autour de lui, embrasant. Puis, le départ, je ne peux aller ce soir à la signature du livre de O., sa directrice de thèse, nous marchons ensemble jusqu’à la station de métro Notre-Dame de Lorette, K. doit s’arrêter à Saint-Sulpice. Mon corps dénoué, ce corps, si souvent maladroit, que je sens en ce moment, souple et précis, qui dans le prolongement du désir, sait à nouveau s’animer, l’au revoir d’une bise, glissante ou gisante, dans le cou, après son début, la joue, avant l’oreille, où ça frémit, entre le frisson et l’amour, puis le contact des lèvres, le rouge, troublant son teint, moi jeune homme passé je ne suis plus comme à son premier rendez-vous, qui y ressemble. La douceur de la bouche qui abrite la langue, l’incertaine prochaine fois.  

26 juin 2023

découvert

Je vais mieux, malgré le périple administratif où je me trouve, la question du logement pèse, en chacun de nous, par quoi la société, toujours nous tient. Il faut se faire aux changements, dit-on, je peux garder l’appartement, calculs effectués, mais à quel coût social. Vivre avec un inconnu, de temps à autre, pour la première fois dans cet appartement que je n’ai jamais occupé qu’avec des personnes que j’aime.
Je dois garder cet appartement parce qu’au vu de ma situation administrative, de mon absence de revenus actuelle, je ne pourrai, en région parisienne, rien trouver. Revenir chez les parents, à mon âge, me tuerait. Le monde y est doux mais d’y passer quelques jours, parfois, me tue, me ramollit, m’expulse, aussi, de toute sensualité de toutes possibilités d’ivresses maisons, de fêtes, de retours baroques.
Alors, je dois tenir, inventer ici, parce qu’il n’existe pas d’ailleurs, pas d’autres villes sauf, peut-être, Marseille où je connais des gens, assez de gens pour me refaire une existence sociale. Là-bas, même, se loger devient difficile sans dossier solide, or mon dossier ne présente aucune solidité, il est l’avant dernier grade de la fragilité. Si j’ai pu emménager ici, c’est grâce à C., qui se portait garant, parce qu’à l’époque, Mehdi et moi possédions une carte d'étudiant, la loi ELAN, qui visait à limiter le pouvoir des bailleurs sur les locataires, interdisant l’exigence de garants pour le locataire en CDI/fonctionnaire, entraîna cet effet pervers que, les bailleurs, préfèrent que leurs locataires, pour de petites surfaces (studio/deux pièces) disposent de garants - soient donc étudiants - plutôt que de salaires.
Mickael en fit les frais, cherchant à se loger à Paris, malgré son statut de fonctionnaire et le « 3x le montant du loyer » ne trouva jamais rien et dût s’exiler à Saint-Denis.
Aujourd’hui, non étudiant, je ne peux donc me réclamer d’aucun garant et, en conséquence, ne trouver nulle part, aucun logement. Sauf à envisager un trou à rats dont personne ne voudrait parce qu’insalubre autant que trop cher. 

Je ne vivais pas au-dessus de mes moyens comme certains, courageusement, y parviennent. Le découvert du père de X. is over 9000.
Simplement, je fais les frais de mauvais calculs, de retards, de rattrapages, nulle incurie de ma part, une cruauté à rebours. Inattendue et, comme tout ce qui me survient aujourd’hui, à contre-temps. Nous n'échappons pas aux serres des vautours institutionnels, même quand nous ne trichions pas ou que nous ne pouvons assumer, aujourd'hui, sans drame, les conséquences de notre maladresse ou, même, ici, de notre incompréhension.
Je pourrais dire que, oui, et c’est vrai, nous avons profité de la vie avec MarieA, c'est vrai, que Mickaël, quand il apprenait notre rupture, me disait, parce que ça lui importait (que désormais, pour une raison…administrative) ça compte, mais c’est toi qui payais tout. Nous faisions, chacun en fonction de nos moyens et, moi, à ces moyens j’ajoutai, depuis des années, la ruse.
En cette matière, nous fîmes de notre mieux, à la limite, dans un plaisir partagé. Rôdait, en secret, muette et stricte, l’administration. 

Je vais tenir le coup. Puisque, désormais, je décide de ne pas mourir. Pour quoi faire ? Je l’ignore encore, j’ignore même si je trouverai, jamais, quoi que ce soit.  

26 juin 2023

Matière

L’appartement sent le propre, les vitres laissent passer un soleil sans tâches. Je déteste laver les vitres, pourtant, je m’y mets. Pour passer le temps, pour changer ce que je vois, sans bouger. Le monde, ainsi éclairé, donne un autre plaisir. Je déplace les objets puis les réinstalle dans leur position originelle. Pas parce qu’elle vaut mieux, les deux se valent, pour transformer deux fois.
En ce moment, pas la force de m’occuper, toujours, des tâches administratives, je reste muet face aux transformations qui m’accablent ici, les relances d’EDF, l’obsédante question du loyer, le contrôle inattendu comme celui, il y a sept ans, face auquel je me sortais de justesse, à l’inverse de Victor, qui connût, alors, les foudres imparables et sourdes des administrations.

Il faudra gérer, après, encore, la répartition des objets, à ce sujet, je ne crains pas vraiment les disputes avec Marie-Anaïs, certaines choses, forcément, feront débat, un débat sans importance. Je redoute bien davantage sa mère, qui voudra, forcément s’en mêler, établir des calculs objectifs, servant essentiellement son intérêt, sans concevoir ce que ça veut dire, cette division, que le sens ne relève pas uniquement de je ne sais quel titre de propriété, que les choses, comme la vie, s’enracinent et s’entremêlent et dépassent les quotités de son (pauvre) imaginaire. Je n’aime pas l’idée de l’arrachement des choses, sans inquiétude ni même angoisse, parce que Marie-Anaïs et moi nous connaissons parce que, il y a cette vérité vraie, toujours cruelle pour moi, matériellement elle se rétablira plus facilement que moi, sa mère, au-delà (ou en raison) de sa conception clanique des rapports humains, lui offrira, un temps, les secours nécessaires. Plusieurs dizaines de milliers d’euros attendent Marie-Anaïs pour, si elle veut acheter ou ouvrir une librairie, ce peut être un viatique. Marie-Anaïs n’est pas mesquine (et je ne doute pas que Myriam non plus) elle connait mon état et agira en conséquences comme, lorsqu’elle vînt par surprise (je cauchemarde encore de ceci, elle le comprend, entrer par surprise chez quelqu’un est pire que claquer la porte, confère de l’insécurité à chez soi, moi, qui, depuis enfant redoute la nuit  et les voleurs) tout en le regrettant sachant que je le vivrai mal.  

Je ne connais pas cette chance des secours parentaux ou au prix de leur sang, je la connais moins encore, maintenant que, prostré, tout travail devient impossible. Je ne réponds pas au dernier mail reçu qui me propose dix jours de travail. Hébété la date limite s’approche, passera, sans que je ne puisse agir. Mon énergie je la dispense, une fois par semaine, à sortir et danser, lorsque je le peux. Pour boire, aussi. L’alcool solitaire, heureusement, me quitte. L’appartement est propre, je ne parviens presque jamais à cuisiner, j’ai pris six kilos moi que le gras répugne tant. Héritage de ce mois de novembre paralytique quand commençait le traitement anti-dépresseur. 


Délitement froid, l’anti-dépresseur me sauve, chaque jour, la vie, il éloigne de moi le désespoir, sa brutalité soudaine qui, auparavant, me jetait la tête contre les murs.

 

Je dois reprendre le sport sans changer réellement mon régime alimentaire. Je déteste les privations. En ce moment, je me contente d’un repas par jour sans mincir pour autant. Par souci d’économies. C., paie nos sorties ou M.

23 juin 2023

fait lin.

Le désir s’absente ou, plutôt, emprunte la porte dérobée. Son aspect d’imagination, de prescience m’échappe, désormais, une action concrète, palpable, devient seule capable d’en produire le mouvement. Si je caresse les seins, l’excitation, animale presque en ceci, monte, si j’embrasse avec la langue, mais il faut que la langue soit chaude, le désir, encore naît. L’alcool rend parfois la langue des filles tièdes ce qui, par une sorte d’angoisse automnale, fige mon envie. L’érotisme disparait. Hier, parlant du désir avec V. qui, lui aussi, en découvre la distanciation, il s’amusait de ce qu’il nommait mes dissonances cognitives (je le reprenais sur la prononciation de cognitif qui se prononce coguenitif et non, comme la plupart de gens le croient, coniitif) parce que, ne pouvant m’empêcher de séduire et de frôler, je ne souhaite pas m’aventurer au-delà de ce bord des lèvres, sans crainte aucune non même celle de bander. Les frôlements, comme je l’’expliquais, le contact des seins ou des fesses, m’excite. V. s’en amuse, aussi, parce que chaque fois, avant justement, ce qu’on nomme fatidique, je lui propose de rencontrer ces filles afin, que lui, m’en détourne, justement, ce qu’il se refuse à faire non parce qu’il ne ramasserait les restes par orgueil masculin, simplement parce que ces filles, déjà éprise, ne, pense-t-il, ne lui jetterait qu’un regard amical. Il se trompe, évidemment, sa beauté éclipsera d’évidence le souvenir éthéré du poète des fausses aventures. Fausses aventures parce qu’il me faut, tout le monde l’ignore, le pressent parfois, beaucoup d’élan avant de me jeter contre la bouche. La première nuit que je passais avec M., il y a des années maintenant, qui venait de Bordeaux et trompait son époux pour la première fois, je lui demandai en avance de, une fois dans la chambre, me sucer ; exigence moins née de l’envie de pouvoir et de soumettre que de la certitude, alors, de ne pouvoir, moi, rien oser face à son existence concrète. Je divertissais de mes peurs. Celles-ci, tenaces, l’alcool longtemps, les drogues plus encore, l’extrayèrent de moi.
Au final, je n’ose que peu, je crains tout changement tout en provoquant, à l’infini, les bouleversements les plus totaux.
Le manque d’audace paralyse le désir, l’empêche même de naître, E., jadis, la très jolie russe, venue de Saint-Petersbourg, je l’embrassai en me causant à moi moi-même une grande et terrible violence, je me souviendrai toujours, la même chose avec J. de Garches, ses yeux clos, les muscles frémissants, la joie curieuse. D’elle je me souviens, souvent, du dos musclé, des bras fins, la bague en topaze, sa manière presque sans accent, de dire Maman et Sciences Po. 

Je le sais, de sources sûres et variées, je suis un bon amant. Ce que me disait, quand je l’embrassais dans le cou, M., sur le canapé dans le salon, parce que je parcourais son cou de baisers joueurs. Le matin, après la nuit sans sexe, parce que, moi, fatigué, le désir courbaturé et le moindre obstacle - ici son embarras à cause de son sang et de ce que mâtines sonnaient - me détourne de baiser. Je n’écris pas, ici, sexe, parce que Marty, notre idole à J. et moi, emploie ce mot, toujours, pour parler des organes génitaux ce qui nous paraît, plus que ridicule, répugnant. Marty, écrit aussi, mon coeur se gonfle comme mon sexe. 

Embrasser M. le matin ne me causait aucune peur, le premier, lui par contre, assis tous deux sur le tapis neuf, m’effrayait un peu, je jouai, couard, le bravache ; ne manquant pas de courage je me mêlais à sa bouche, finalement, je commandais dans le lit à son corps de se dénuder, puis nous dormirent, blottis, tendres. Au matin, je ne sais quelle aisance me saisissait, ou, bien si, cette assurance étrange la mienne de quand je me crois sans danger, de circuler dans le monde avec grâce. Ce moment, précis, exact, où l’on tombe si souvent amoureuse de moi. 

Je ne baise pas toujours bien, parfois les sexualités ne permettent pas de rencontre. V. et son accent aiment la violence, elle griffe, mord, je n’aime pas les blessures ni mêmes celles de l’amour. Trop vieux pour ces fauveries. 

Mon désir s’il apparaît parfois ressort d’une excitation presqu’intellectuelle, d’un penchant vers la beauté, vers la femme, dont, nombre des individus en constituent les nobles représentantes. Rien ne me rend plus heureux que la proximité des filles, que la sensualité des filles, que la salive des filles, du baiser timide, à la lèvre brillante à peine du dernier bisou à J. qui sur la plage me demande de lui cracher dans la bouche. J’aime, aussi, avec passion, l’odeur de la baise, cette odeur âcre un peu, difficile à décrire, née, surtout, des moments de plaisir intense. J’ai connu des femmes, parfois, qui ne dégageaient pas cette odeur, desquelles je ne sentais que la transpiration amère, cette fille, je ne sais son prénom, Irlandaise, demeure en ma mémoire, tout, avec elle, revenait à du faux, lorsque je m’apprêtais à la lécher (je me demande comment elle le devina, elle court-circuita une pensée) elle murmura i don’t like to be licked. Alors je m’abstins, le sexe était nul, pour nous deux, nous avions utilisé une capote, je m’étais forcé à jouir, nous accomplissions ensemble une performance qui ne regardait aucun de nous deux. Jean-Maxime, dans un éclair génial (Mickaël disait je ne pense que par fulgurances) annonçait nous ne baisons que des contextes. Cette phrase me porte.
Les filles, souvent, n’aiment pas qu’on les lèche (gramahuche disait Baudelaire) la première fois, à cause de ce que leur sexe, dans leur imagine sent parce que, souvent, ceci leur a été signalé ou, même, que ça aurait pu leur être signalé, ce pèse ; I. (ici, Je m’amuse, avec l’jnitiale) s’excite en léchant et respirant sa cyprine (je déteste ce mot, je déteste aussi « mouille »). Les plus audacieuses, Karine, par exemple, j’écris sans retenue son prénom tant cette femme demeure loin de moi, par-delà toutes les périphéries, l’attend la première fois, ne l’exigera pas, y mènera peut-être. M., aussi, s’agace de ce que les garçons, si peu, le pratique. J’allais écrire mehdi etc. C’est un sujet sur lequel, plus tard, je reviendrai, parce que ce rapport aux femmes, de façon générale, m’intéresse. 

M., considère qu’un garçon sur dix, à peu près, lèche que parmi ces dix pourcents nombre d’entre eux le font mal. Je n’excelle pas en cette matière mais, plein de bonne volonté, je me laisse guider avec plaisir, il est difficile de guider bien davantage que de se faire guider, d’ailleurs. Guider, orienter, ne signifie pas obliger, forcer ou dominer, il s’agit d’indications, légères qui réclament, aussi, la connaissance de son propre désir, le trait d’union qui le lira au plaisir. 

TBC

 

 

 

 

21 juin 2023

Dés-Insta.

Curieuse mise en scène permanente, de moi, lorsque, sur Instagram, je poste les tentatives de vie, ces minces respirations, au milieu de sombres marécages. Je ne me débats pas, à intervalles réguliers, de moins en moins fréquents cependant, une espèce d’aspiration me mène au monde puis, me rejette, plus loin, cette fois. Les choses administratives m’échappent et se délitent, je ne peux plus en régler aucune. Elles m’asservissent sans qu’aucune d’aide ne me porte le moindre secours parce que, la réclamer, encore, s’apparente à une chose administrative. Je parle et je dois, à chaque mot, me défendre, me justifier, argumenter. Force dont je suis dépourvu, alors, au lieu d’assurer cette existence pratique, je la condense, quelques instants, dans la fausseté virtuelle, quelques éclairs temporaires aussitôt dissipés, appelant, déjà, les suivant, plus coûteux. La foudre se tarit, le ciel se vide. Depuis dimanche, je ne peux plus rien poster sur IG, la fatigue même de cette fugue me domine. Parce que ma vie même en vitrine m’épuise trop. Les documents non lus s’accumulent sans que le seul important ne parvienne jamais, le bientôt qui, de plus en plus, s’associe à un ‘?’.

Mes mises en scène jouaient le double sort de rassurer et de prétendre. Le premier m’épuise, le second m’ennuie.

Les factures me débordent, leur ombre écrase, elle piétine moi, moi-même dix fois, le pilon qui broie dans le creuset cette force vaine, elles tombent, pluie acide, par surprise, les dépenses imprévues et vitales, nécessaires, les courts-circuits, l’air hébété que tout casse. D’hoquets en hoquets je survis dans ce désordre, le regard vitreux que rien n’éclaircit. La comédie, je la joue, encore un peu, jusqu’à…jusqu’à quoi ?

La colère, aussi, elle me quitte, tout s’y apparente. Pourtant, si j’admets calmement, plus calmement les choses, de grands espaces s’ouvrent parfois. Mais la vie administrative m’emporte, ressac de nuit comme de jour. La marée sans repos brise le corps fatigué.

Je relis une phrase, écrite il y a onze ans, que facebook me montre,  Est poète le tricheur aux cartes qui, couvert de plumes et de goudron, parvient á faire croire qu'il est un aigle ou un ange.

Epoque, de moi, le génie, quand la littérature, les mots, la poésie me couraient dans les veines avec aisance, sans lourdeur, aérien, puis je me suis érodé, par peur, fatigue, maladie.

 
Le désespoir, lui, refait jour. Il a pris son temps pour monter son embuscade. Les cauchemars me quittaient, ils reviennent. Chloé, à nouveau, obsédante, à cause d’autres souvenirs. Une main. Un poing. Je me demande, à nouveau, si elle ne me confond pas avec Pierre-Adrien. Parce que tout me demeure, avec elle, incompréhensible. Que la courbe des incompréhension commence par elle, continue par Margot. Après ? Après j’attends d’entendre.

Je rêve, parfois, de Marie-Anaïs chaque fois que j’en rêve, elle entre par surprise dans le lieu où je me trouve ou bien elle rejoint un évènement où je suis déjà présent et, souvent, sa famille avec. Avant, je me disais souvent, que ma vie serait parfaite à deux conditions : si la mère de Marie-Anaïs nous foutait la paix si, ensuite, je pouvais vivre mes amours libres sans contrainte. Ces deux conditions, aujourd’hui accomplies, ne le sont que celle qui les conditionnaient ne se maintienne. J’imagine que, par ailleurs, cette situation a pu rapprocher la mère et la fille parce que l’amour de la mère, pour tortueux, malade et mutilant, n’en demeure pas moins total, ce qui écrase souvent, ici, peut se faire plus léger. Par le drame, sûrement, aux yeux de la mère, un instant au moins, Marie-Anaïs devient plus autonome, plus indépendante, tout paradoxalement, qu’au moment où, elle réclame le plus d’attention. 


Ce que je me dis, aussi, après le tragique soubresaut, que, pour elle, au final, c’est mieux, je veux dire que cette violence, même, permet de justifier sa relation nouvelle, malgré tout ce qu’elle portait d’obstacles sociaux évidents, qu’elle rend, pour un temps, impossible toute critique, l’important étant, pour sa famille, qu’elle aille bien, qu’elle se repose. Cette crise court-circuite toute protestation, toute inquiétude, ou, disons, nous sommes, elle et moi, dernière curieuse union, le coeur interprétatif des événements ; elle pour l’inquiétude suscitée par qui l’aime moi comme le responsable du drame.
Deux points qui par leur radicalité émotionnelle excluent tout autre terme, tout autre commentaire du moins, des tiers termes. Je me demande si Marie-Anaïs s’aperçoit de ceci. Probablement que oui, malgré l’immense fatigue qui la saisît. 

18 juin 2023

Point, à la ligne .

Récemment, A. fêtait son anniversaire et je m’abstins de lui souhaiter, parce que, pour espérer que des liens brisés se ressoudent, il faut attendre. Nos liens, brisés, par un en dehors de notre relation, par un récit et des impressions qui lui vinrent de l’extérieur. Rien de moi à elle, au contraire presque. La douleur, la douleur vraiment immense quand, peu après le suicide, elle se proposait, dans une attention qui me toucha, de me consoler. Alors, je ne compris pas, le brusque changement, le gel autour de moi né du rejet soudain, brutal, qui, sans explication portait tous les possibles, trop des possibles. Ne pas lui souhaiter son anniversaire, voyant ses stories sur instagram, sa joie manifeste, me blessait, que les personnes décevantes s’éloignent, voilà bien peu de colère, que d’autres, à l’attachement sincère, s’éloignent, que leur vie nous apparaisse sans que l’on puisse dire un mot, abîme et nie. Je me suis tu. Pourtant. Parfois, je ne peux m’empêcher, vieille habitude ou tentative, de liker ses stories, dire un petit j’existe.

Attendre, me conseillait L., attendre pour…prouver que je ne me confondais pas avec le récit fait de moi qui effara tant A. Attendre, donc. A raison, probablement, parce que les êtres humains fonctionnent ainsi mais qui sent la terrible injustice et la proximité constante de la mort, j’allais écrire la mort, j’ai écrit la mort, non alors de la finitude plutôt, du non-futur, ne peut supporter cette abstention. Attendre, oui, comme espoir, donc bientôt, donc futur, donc temps, toutes ces choses par moi ignorées, inconnues, douloureuses.

Cependant, récemment, je lui écrivis un long message, important pour moi, pour faire le point, à ses yeux, sur moi que, plus tard, si plus tard peut exister, ce message en forge le premier mouvement, le dépôt qui, germera ou gèlera.

J’ignore comment elle le prît. Mon affection pour A., que rien n’éprouve, ressemble à peu d’amitiés par moi ressenties.
Elle ne dépend pas d’une longue histoire, c’est à dire d’une habitude et du devoir de fidélité que l’on se croit envers ses vieilles connaissances, elle ne relève pas non plus d’une répétition fréquente et intense d’aventures et de bombances communes.

Si elle ne trouve son origine et sa force ni dans l’espace ni dans le temps alors à quoi tient-elle cette affection ? Je dis, douloureusement, affection ici, retenant le mot amitié, parce que, ce dernier, implique une réciprocité pour le moment, au moins suspendue, au pire disparue. Elle tient, probablement, à un moment particulier de mon être, de mes changements intérieurs dont, malgré elle, elle pût être le témoin en même temps que l’amitié naissait. Je l’adore, sincèrement, sans rancoeur dans ce rejet que je comprends, que j’admets, qui blesse malgré l’accord de la tête. Avec elle, tout ce que je portais de sordide en moi, près d’elle, du moins n’existait pas, si elle me vit bouillonnant parfois ironique et non sans cruauté (ah, le club des poètes), elle ne me vît pas sordide, elle me connut débarrassé de l’horreur, cette fripe pourrie, galeuse.
Perdre A., étrange pour qui ne vit pas en moi, appartient au pire, me retourne moi contre moi. Quand elle m’écrivit de durs messages je restais sidéré, je me souviens, je marchais (arpentais ?) sur le boulevard de Rochechouart, je ne sais plus ce que j’y faisais, si je sortais du Louxor ou de chez Valentin ou, plus simplement, d’une balade. Je me souviens que le soir tombait, je me souviens, aussi, que je voyais sur le chemin, les petites affichettes apparaissant régulièrement d’un écrivain cherchant sous pente une petite chambre qu’il réglerait en cash.

Je pense souvent à A.

Ca m’a fait mal, quand elle n’a plus voulu me parler parce que, je croyais, envers elle, avec elle, toujours je me montrai très exemplaire. Sans affectation.
J’aime, chez A., la façon d’avoir envie ou, parfois, de s’indigner avec exagération, comme ce soir où elle tombait presque déjà amoureuse de L., en entendant le mot sous-continent indien, croyant, à cause de l’ivresse, que le préfixe sous établissait une hiérarchie ethnique et non une position géographique. J’aime, qu’elle aime s’amuser que, bien sûr, en elle le règne poétique ne s’achèvera jamais. J’aime, en elle, le sens naturel de la fête, une pente que le travail n’a pas entamé. Nous ne manquons pas de différends, quelques uns profonds, nous ne manquons surtout pas d’un espace commun, d’une façon assez semblable d’aimer. Je termine avec difficulté ce texte commencé il y a plusieurs semaines, je le veux exact, il se gâche. La dernière fois que je l’ai vue, c’était après sa rupture, elle m’a dit, je risque de pleurer, on parlait de polyamour, des formes divergentes prises par lui, du conflit qu’il implique. J’avais trouvé, par hasard, son profil OkCupid, il y a toujours une étrangeté à croiser nos amies sur ces plateformes, observer leur mise en scène, je me souviens, j’avais souri, quand, dans ce qu’elle cherche, elle énoncait, du sexe.


Et puis elle m’avait promis un resto. Et ça, je boude quand même. Elle me disait, qu’elle gagnait trois mille euros et plus, alors j’étais content pour elle. Et pour moi, ahah. J’allais, avec ma situation difficile, peut-être lui demander des sous. Pour, m’amuser peut-être, pour survivre plus certainement, pour alléger le véritable sacrifice de Marie-Anaïs, en ce moment.

Je souffre, dans l’écriture de ce texte, parce que ça remonte, ce que je ressens pour elle. Que, ma folie, ma folie d’un mois, un mois, je trouve, après ce que je subissais, franchement, ce n’était pas tant, ça demeurait dans le permis, dans l’excusable, même dans l’affection maintenue et l’attention. Imaginez, maintenant, une seconde recevoir des discours mélangés, changeant sans cesse, pour, à la fin des fins, en recevoir la version la plus atténuée possible. Mon frère, après avoir lu, le contenu de la réalité des reproches ne ressentit aucun soulagement, il entendait encore la menace, la condamnation, sans saisir, que, non, parce que ce que l’autre dit, ça en est la version la pire, celle à partir de quoi le débat se noue, si, si faible alors, moi mon récit, mes preuves, viennent en contrepoint. J’ai mal, A. me manque, ma folie me brisa, brisa des liens précieux, le sien, le nôtre, sa singularité, étoile polaire désormais moi me gelant. Oui, j’ai mal, quand C. m’invitait, pour mon anniversaire, à privé de dessert, je pensais à A., que peut-être nous aurions du y aller ensemble, que privé de dessert, punition des adultes aux enfants rebelles, que, oui, ça dit un peu.

13 juin 2023

Tu seras viril

L’étrange action, tardive en mon cas, de la setraline abstrait le désir sexuel dont la consistance, alors, tient davantage du souvenir ou du rêve, que de la pulsion amoureuse ou reproductive.

Le corps, lui, fonctionne comme de normal, il réagit aux stimulations habituelles, bander ne me pose aucun problème, éjaculer, par contre s’interdit, c’est à dire accomplir et achever ; entrer dans le destin reproducteur et le plaisir à l’acmé.

M. s’étonne que je m’indiffère autant de la sexualité, résumant celle-ci au rapport pénétrant/pénétré, comprenant mal que ce ne fut pas toujours le cas, je peux, désormais jouer, torero, avec mon désir et celui de l’autre, le surprendre par sa suspension. Avec M-C, nous jouions, souvent, à ce désir suspendu, balançant, retardant le moment de la pénétration, s’approchant au bord, jouant avec la limite du désir pour augmenter, après, celle du plaisir.

ici je supprime un passage que je déploierai dans un autre texte, ici, j’écris aussi qu’une pulsion de mort monte en moi, la même jadis de ce fameux post-coïtum animal triste, cette sensation d’une main osseuse serrant mon coeur.


M., je me sens étrangement bien avec elle, nous ne couchons pas ensemble, parce que je ne le souhaite pas, ce dont elle se vexe, pour la consoler, je glisse sa main contre mon sexe, l’assurant, ainsi, de l’absence de faute de sa désirabilité. Je me sens bien, étrangement, nous dormons ensemble, déshabillés, tendres assez, quelques baisers s’échangent. Le premier, c’était dans le salon, vers 4 heures du matin, elle soupira un enfin, un qu’est ce que tu attendais, qui, aussi, rappelait l’ordre usuel de la séduction, l’homme, quoi que même si son désir tarde à devenir certain, doit oser. Je ne sais plus si, c’était par jeu encore, je lui demandai si je pouvais moi l’embrasser.

Avec W., notre premier baiser, nous sortions d’un café, W., m’intimidait un peu mais trop forfantin, je n’en laissais rien paraître. Un moment, dans l’après-midi, elle me demanda pourquoi tu ne m’embrasses pas, puis nous nous embrassâmes. Paradoxalement, j’excelle dans les commencements, pas dans la prise d’initiatives. Je m’y force. Cette nuit, nous ne l’avions pas passé ensemble, j’avais dormi dans l’auberge de jeunesse Jacques Brel, de Bruxelles, la première et dernière fois. Dans la rue qui m’y menait, je voyais le symbole kabyle inscrit sur les murs. La seconde fois, nous en prîmes par la suite l’habitude montant en gamme, je réservai un hôtel 3*, l’hôtel Aristote, à proximité de la balle que Verlaine tirait sur Rimbaud. W., sortit une bouteille de vin - nous ne buvions presque jamais ensemble - et un préservatif féminin que nous essayâmes par curiosité, comme une expérience artistique que nous délaissâmes bien vite, préférant exercer nos talents manuels à des pratiques plus satisfaisantes. 

 

Le matin, ceci toujours me ravit, quand je l’embrassais dans le cou, sur le canapé, face aux livres, la lumière du soleil entrant par la fenêtre avant que les immeubles d’en face ne le brise - le salon, exposé Sud, brûle quelques heures par jour, les toits de tôle lisses et grises de Paris en augmentent la chaleur, puis le soleil passe sous l’immeuble voisin, il ne reste que la cendre.

 

Si je repense à mon désir sexuel, à la façon dont je dus le positionner face aux autres, me reviennent à la mémoire quelques épisodes. En quatrième, Arnaud abandonnait de son agenda des photos découpés de pin-up et proposait, à qui voulait, de les prendre. Je me portai volontaire parce que, ce faisant, j’actualisais ma masculinité, si mes pratiques correspondaient à celles des autres garçons, alors, j’appartenais au groupe. Cette pratique, transgressive au sens des règlements intérieurs et familiaux, permettait, ici, de respecter une appartenance plus forte et plus nécessaire. Je collai ces photos dans mon agenda, mes parents le découvrirent. Je ne me souviens plus si je dus les arracher, forcément, par contre, ils en tirèrent des conclusions erronées, ignorant, forcément, mon désintérêt pour ces images, l’impossibilité, pour moi, à cause de ce que la circoncision me mutilait jadis, de me masturber et de faire, de ces images, un usage autre que celui de conformité sociale. Par ces images je me signalais auprès des autres, me rassurais, moi-même, de ne pas être découvert, moins mutilé, parce que ceci s’avère trop complexe à découvrir, que moins, que pas assez. Je pouvais jouir, certes oui, du rôle exécuté à la perfection, me cachant à moi-même. Jouir, au final, seul, reproduisant, ailleurs, cette masturbation, d’un plaisir déjà adultère.

Oh, bien entendu, les autres garçons, ces collégiens, eux autant, par ces images, la provocation associée, jouaient aussi, en partie un rôle, dans le verbe haut et la verge droite, eux aussi se signalaient aux autres comme de bons hétérosexuels désirants et puissants. En dernier terme, après et en même temps que cette preuve apportée, moins les quelques dissimulés comme moi, ces garçons se masturbaient en effet sur ces images. Chose plus amusante, Arnaud et Gregory parlaient de leurs visionnages pornographiques et de leur absence successive aux toilettes. Je n’avais pas compris, jusqu’il y a peu, le motif de cette absence.

Deux ans plus tard, j’agissais enocre ainsi et doublement, d’ailleurs. Je possédais, enfin, mon premier téléphone portable. Un NEC, le premier téléphone, en France, en couleurs. Je prouvais, par cette possession, ma supériorité matérielle, il devenait signe de ma richesse prétendue, un mensonge, pour garder sa crédibilité, doit, régulièrement s’actualiser avec d’indiscutables preuves. Ces preuves, même modestes (et mieux encore de ne pas l’être), par effet d’attraction entraînent tous les récits vers le vrai, l’indiscutable, l’indubitable.

Je me souviens, aussi, d’un jour, assis à côté de ce garçon, Nicolas, être bizarre, sale, fumant du shit et, surtout en vendant, dénoncé, un jour par l’un de ces acheteurs dans l’enceinte de l’école. Je disais à Nicolas que mes parents me versaient, tous les mois cinq-cents euros d’argent de poche mensuels. Il répondit, incrédule, impossible et, alors, levait puis baissait la main, reproduisant, longtemps le geste, pour interroger la prof de mathématiques à ce sujet, réclamant cette censure adulte pour trancher notre débat. Je paniquai, je m’apprêtais à être découvert et si l’un des mensonges devait être trahi alors le reste pourrait, soudain, subir le doute. Mes mensonges, au sujet des phynances, tellement improbables, mais assénés avec certitude, ne tiendraient pas face à un doute méthodique, la moindre enquête m’aurait découvert. Alors je tremblai devant ce geste improbable, Nicolas hésitait, sûrement, devant l’incongruité du geste, sa place discutable dans un cours.
A ce moment Damien intevînt pour dire, à peu près, que s’il ne s’agissait pas d’argent de poche mais d’un compte d’épargne, alors, oui ça se tenait. Damien m’offrait une porte de sortie que j’empruntai en toute hâte, oui, voilà, c’était ça, exactement. Cette sortie ne correspondait pas, pourtant, à mon récit initial puisque je parlais d’argent de poche. Qu’importe, l’essentiel était sauvé, la focale déplacée, le mensonge, donc l’identité, préservée.

D’autres mensonges, plus absurdes, l’année suivante, je les commis sans émouvoir aucun soupçon, je prétendais, hackeur de génie, riche à l’infini, m’adonner les week-ends, à des combats de piratages informatiques dont le but consistait à abattre l’ordinateur adverse. Ordinateurs que je prétendais valoir des fortunes. Martin écoutait religieusement mes succès fantasmés, rêvant, lui, à seulement posséder une de ces machines entrée en fusion à cause d’un combat perdu contre un pirate habile d’Allemagne ou de Chine.

Avec mon téléphone NEC, je disposais aussi des premiers forfaits internets mobiles « utiles »,  à l’époque, pas de 3G, de 4G, ni de vaccin, seulement le E, de EDGE, internet mobile de faible débit. J’y pense, parce que, revenant de Marseille en train, passant par les campagnes mal connectées, le E majuscule s’affiche en haut de l’iPhone. Sur le téléphone NEc, en 256 couleurs, je téléchargeais des images floues de Pin-Ups, femmes en sous-vêtements, jamais nues entièrement, d’ailleurs. Lorsque mes camarades voulaient manipuler le téléphone, je faisais en sorte de laisser visibles ces images. Dans ce collège de garçon, ce faisant, je ne devenais pas un répugnant obsédé sexuel, je devenais un homme, comme tous les autres. Ils m’empruntaient, régulièrement mon téléphone, se signalant, eux aussi, autant que moi je me signalais. Nous nous prouvions mutuellement notre masculinité.

En quatrième, je me souviens d’Alexis, qui, parce que nous parlions de masturbation - lui ignorant que moi je ne le pouvais pas et moi ignorant ce en quoi ça consistait - me demandait par je ne sais quels détours, si j’étais précoce. Assimilant, alors, le terme à celui de l’intelligence, c’est à dire d’une qualité, je fanfaronnais de, oui, l’être. Lui non, plus, en réalité, inexpérimenté sexuellement, ne mesurait pas la portée du mot. Alexis, aussi, en cinquième, m’apprit, le mot cunnilingus, que, confusion banale, je pensais référer au nuage. Nous étions trois ou quatre ce jour là, dans la partie boisée et terreuse de la cour de récréation, derrière les algecos à cause de ce qu’une partie du collège était en travaux. Les autres élèves assistaient au cours de latin auquel Alexis, Maureen et je ne sais plus qui d’autre, ne participaient pas. 

 

pour me rendre au collège je devais prendre le bus 241 qui passait par le bois de Boulogne aux heures matudinales durant lesquelles les prostituées exercent encore, le bois de Boulogne compte, essentiellement, des prostituées trans, nous les voyions, hiver comme été, les jupes courtes le visage fardé arpenter les trottoirs, parfois nous les retrouvions à proximité du collège, le pénis énorme de l’une d’elles, débordait de sa mini-jupe, Laure, l’appelait un m’sieur-dame et le saluait de la sorte, pendant des années. Maureen, très grande avant l’âge, virile presque, un jour de banale dispute entre filles et garçons, m’agaçait tellement que je lui envoyai à la figure « t’as du volume entre les jambes », phrase entendue, probablement dans la bouche de Jean-François, obsédé sexuel dès ses 10 ans, ce à quoi, elle rétorqua, habile, « toi t’en as pas ».  

7 juin 2023

Saint-Georges et la grève du Dragon

Je considère, depuis mon emménagement dans le IXè, avoir trouvé, dans le monde, ma place, que cette géographie, dans un appartement que j’adore correspond à mes désirs les plus chers. Le quitter me déchirerait le coeur, tout changement s’y déroulant m’y altère. La fromagerie Chataîgner, en bas de la rue des Martyrs, qu’Yves tient depuis (si je me fie à societe.com) le premier janvier 1958 avec son épouse Annie, a vu toutes les transformations du quartier. Je disais à Marie-Anaïs que, le jour de leur fermeture, quelque chose en moi se briserait, je déteste toutes les faims (je voulais écrire fins mais ma bizarre dyslexie prend le dessus) comme je le disais à M., quand elle et moi nous soûlames à la maison et qu’elle voulait retrouver le VIè, cette année où tout se brise, comme une chose naturelle a aussi vu la fromagerie Chataîgner fermer. Après les vacances d’été, la grille demeurait fermée, longtemps, sans un mot, puis, en début d’année, un petit mot affiché sur la devanture remerciait les clients pour leur fidélité. Ce merci comme une oraison. Dans le quartier rien ne dure longtemps, ces remerciements d’adieu nous les trouvons à toutes les portes, au bout de cinq ans. Dans ma rue, le retoucheur, encore, seul, appartient à un monde ancien, le même en sursis, dans sa boutique ancienne où on ne le règle qu’en espèces ou en chèque bancaire ; lui aussi fermera, forcément. Il en va ainsi de la vie dont, moi, je ne supporte pas le passage. A cause de ceci, et, bien sûr, du sens qu’il a, je mentais sur mon âge, je ne pouvais me résigner à l’usure. Je tentais, qu’importe par quelle ruse, d’en limiter les signes apparents. Un jour, ça ne tient plus.

La fromagerie Chataîgner, après 65 ans d’existence a présenté son grillage clos, sa petite affichette, les passants et les habitués, glissèrent des fleurs et des mercis, comme pour une cérémonie muette. Sophie, La pharmacienne de la Place Saint-Georges, où je ne me rends plus parce qu’un jour elle me parlait mal, vit aussi dans le quarteir depuis, comme elle dit, toujours, et, la fromagerie Chataîgner préexistait à son toujours. La fromagerie où Yves et Annie faisaient le compte à la main. Yves, toujours casquette sur la tête, l’air bougon, la barbe un peu folle, les tâches de vieillesse, l’énergie toujours, Annie, aimable, bien maquillée, sans cesse, profitant de l’absence du mari pour se montrer généreuse, lui, radin, facturant tout, ne faisant jamais aucun cadeau, méfiant, un peu, bougon. Avec ce charme ancien qui, chez n’importe qui, nous paraîtrait insupportable, ici, l’âge, ce dont il témoigne, aussi, l’exotise.

Michel, l’épicier juif tunisien, de Tunis, de la goulette, Tunis centre, il ajoute aussi, lui aussi travaille ici depuis toujours, cette année il fête ses 66 ans. Un an de plus que la fromagerie d’Yves. Michel travaille six jours sur sept plus de dix-huit heures, il ne fait pas son âge, mais il fatigue, forcément et, aujourd’hui, ne trouve pas de repreneur pour son fonds de commerce. Aujourd’hui, aux épiciers tunisiens succèdent des épiciers bengalis ou sri-lankais, il leur cédera probablement son commerce. Je m’arrêtai pour parler avec Michel, récemment, alors que je me rendais au métro et que je le saluais rapidement, écouteurs aux oreilles, comme d’habitude parce que, l’été, il installe sur le trottoir un tabouret de bistro et discute avec les passants. J’ai défait mes écouteurs et j’ai parlé, et il m’a dit, alors tu as changé j’ai trouvé cette phrase amusante, les phrases que, les vieux amis normalement, vous disent, ou les parents, tu as changé, comme le quartier s’altère, sûrement, celui qui me ressemble, ma vie, aussi tout autant changée. Alors nous avons parlé de sa vie de juif tunisien arrivé en France il y a longtemps, je n’avais pas remarqué ses dents, il lui manque des molaires et quand il rit je vois luire un plombage, ceux qu’on faisait il y a longtemps. Maman, qui souffre des dents, compte de fausses dents, des couronnes (les appelle-t-on ainsi pour justifier le prix royal?) qui ressemblent à des dents naturelles. Il me disait, Michel, j’aime bien parler avec toi. Alors nous avons parlé, maintenant je m’arrête plus souvent et plus longtemps. Tout le monde connait Michel (d’ailleurs, je l’apprends, tout le monde me connait aussi), plusieurs générations, de grands parents, de parents et de jeunes enfants. Michel, m’a dit tu n’achètes plus rien puis j’ai bien vu que Madame était partie puis la pauvre puis perdre un beau gosse comme toi puis et tu as retrouvé quelqu’un.

Je peux faire, depuis mon arrivée il y a 7 ans dans le quartier, un petit fil des commerçants à l’ancienne. Il y a le cordonnier portugais de la rue Henri Monnier, son échoppe poussiéreuse, sale, ses prix deux fois inférieurs à la moyenne française, le fonds de commerce à céder depuis des années, en redescendant, il y a Michel, l’épicier, au croisement de Clauzel et d’Henri Monnier, juste avant la rue Notre-Dame de Lorette, si on tourne à gauche, c’est la rue Clauzel, le retoucheur turc auquel je n’ai jamais demandé le prénom. Je sais que, récemment, son fils s’est marié. Il y a, dans la rue, le grand parking marmoréen, un salon de coiffure qui semble de toute éternité et d’autres, eux, plus modernes, où les coiffeurs pour hommes, tous homosexuels, agitent avec talent et mépris leurs ciseaux. troc en stock a fermé, plus loin, encore, dans la rue Clauzel ma rue, deux boutiques, des dépôts ventes, à l’ancienne, vendent des pièces toutes diverses, certaines de collections. La dame blonde qui la tient, Monica, fume souvent sa cigarette sur le trottoir, elle parle avec Maxime, de l’autre côté de la rue, qui après avoir ouvert une boutique de vêtements, a décidé de la remplacer par une salle de sport, un de ces trucs hyper rapides, avec des machines qui ressemblent à des caissons futuristes. Je ne sais pas quelle promesse commerciale il formule. Monica est à l’ancienne, elle parle avec une voix rauque, reçoit de beaux vêtements, qu’elle adore faire essayer à C., parce que sa silhouette, est parfaite lui dit-elle. David, lui, a ouvert, un magasin de vêtements, une sorte de friperie de luxe, rue La Bruyère, il la tient avec son compagnon et sa fille, il l’appelle la débardeuse, a eu, me dit-il, du mal à trouver un local et aurait bien aimé s’installer Rue Clauzel. Ca m’émeut, chaque fois que le nom de ma rue apparaît quelque part, quand il suscite une émotion. La boutique de David, toute récente pourtant, deux ans je crois, m’a l’air d’exister ici depuis toujours. Elle se remarque parce que sur le trottoir un mannequin paré des choses les plus excentriques et toujours changé, se tient. Un peu comme moi, prince du quartier, comme dit Michel.

Michel, quand nous sortions avec C., avant d’aller au Silencio des Près, nous a parlé, nous étions un peu ivres et il s’apprêtait à fermer, pour une bonne nuit de sommeil, je lui demandai. Il était 23h et, me dit-il, le réveil sonnera à deux heures trente, pour qu’il aille se réapprovisionner à Rungis. Encore. 

 

Il y a deux mois, je crois, j’ai vu de la lumière dans la fromagerie Chataigner, et j’ai eu peur que la tragédie s’augmente de la destruction, une boutique de cookie, de madeleine, un lunnetier ou un marchand de saumon. J’entendais, régulièrement les perceuses, puis je n’ai plus entendu aucun bruit. Il y a deux semaines, étonné, j’ai vu la fromagerie ouverte, à nouveau. Tout le monde s’y pressait, tout le monde racontait, au nouveau gérant, l’émotion de voir, le nom intact Chataigner, encore affiché. Augustin, celui qui a repris la boutique, quand je lui exprimais, en mâchant dans la tomme de chèvre laissée à libre disposition, le soulagement (la joie?) de voir, ici, une fromagerie encore et non un marchand de lunettes, sourit, il me dit qu’ils y tenaient, Annie et Yves, à ce que ça demeure une fromagerie, qu’ils vivent juste au-dessus et qu’Annie, dès qu’Yves ira mieux, viendra faire la caisse parfois. Yves a subi un double ou triple pontage, sans quoi il aurait continué, jusqu’à la fin. Pendant, le COVID, encore, quand tous les vieux se terraient, lui, continuait de se rendre à Rungis, nous n’avons jamais autant parlé qu’à cette époque, le monde, rétracté, condensé en quartier, un monde d’un kilomètre sur un kilomètre.


La vie renaît, à Chataîgner, maintenant, est accolé le mot sauvages, les fromages sauvages, Augustin prépare, pour l’entrée un chèvre frais comme une crême brûlée, un peu sucrée, à mon goût, mais très belle. La boutique se ressemble toujours, le carrelage demeure le même. Mais maintenant les fromages ne sont plus exposés à l’air libre, tous se présentent derrière une cage en verre, obstacle transparent. Un geste de plus. Je me demande pourquoi, Yves, en 1958 devînt fromager, ce qui le guida, là, à cette profession. S’hérite-t-elle ? Trouve-t-on ce qu’on trouve comme les commerçants tunisiens de Djerba, achetant les épiceries arrivant en France, parce que réputés commerçants les djerbiens reproduisent ici leur nature ?

Le primeur tunisien de la rue des martyrs, au croisement de (?), vient aussi de Djerba, ainsi que tous ses collègues, nous discutons souvent. Il vivait, il y a plusieurs années, dans le XVIIIè, puis, souhaitant une maison pour ses enfants, en acquît une dans la région d’Auxerre, le forçant à faire plus de 4 heures trente de route aller retour chaque jour. Mais les arabes paressent, dit-on. Aujourd’hui, plus âgé, il lui manque lui aussi des dents, il reeménage dans le quartier, de l’autre côté de la butte, à Marx Dormoy. Ses avocats, à 2,99euros pièces sont les meilleurs que j’ai goûtés, ils sont énormes, deux ou trois fois plus lourds que leurs imitations de piètre qualité à un euro en supermarché. Il vend aussi des herbes fraiches, de grandes et belles bottes à bien meilleur prix que celles sous plastique de la marque florette à quoi je me résignais avant.

La réapparition de Chataîgner donne à la vie la vie. La rend. Différente. Comme la mienne devient. Je l’écris sans rancoeur, aujourd’hui, je vais mieux, je rencontre des gens, mon quartier s’amplifie, je me mets à connaître chacun et chacune. Marie, la serveuse du café du Père Tanguy, qui, pendant des années minaudait auprès de moi, qui, tout récemment, me proposait un verre. Je rencontre. 

6 juin 2023

Du sens.

Lorsque j’ai voulu mourir, la première fois en 2023, que j’ai amorcé le geste avant que maman ne m’appelle, c’était, je crois en février. Marie-Anaïs se trouvait à Saint-Egrève, je crois. A ce moment là, je laissais derrière moi quelques lettres adressées à chaque personne, celles que j’estimais coupables, celles auprès de qui je devais expliquer mon geste. Cette fois-ci, je ne prévenais personne avant, je programmais un envoi, d’un petit film de moi ingérant les médicaments, à l’adresse de Marine. La vision de certaines choses, me disais-je, peut crever les yeux.
Aujourd’hui j’ai jeté les comprimés préparés pour le moment, ils demeuraient encore sur l’étagère de la bibliothèque, entre les livres, la poussière, le hand spinner bleu acheté en 2017. Aujourd’hui, j’ai jeté les cachets dans le sac poubelle de la salle de bains, puis je l’ai fermé. Le sac poubelle contient un paquet de M&M’s vide que j’avais acheté 2 euros dans un distributeur automatique, mort de faim, avant d’aller au Silencio des Près, beaucoup de cotons démaquillants, pas trop sombres, maintenant, je me maquille en smoky eyes, brouillon, comme à mon habitude, j’étale la poudre sur mon oeil en tapotant le pinceau, puis, approximativement, j’arrange le tout, deux brosses à dents toutes noires parce que, dans un accès maniaque, elles servirent à brosser les recoins sales de la cabine de douche, des mouchoirs utilisés pour le rhume des foins de C. et maintenant des comprimés non usagés, non utilisés. Le sac en plastique se zippe, je le laisse ouvert, très plein il baille. Pour l’instant, il reste dans l’appartement, pour signifier je ne sais quoi encore, son sens progressera, hors des discours faciles, au fur et à mesure que je le regarderai, le temps, ma vue y déposeront du sens. J’attends le chemin que, par là, j’emprunterai. Répétant, consciemment, les mêmes gestes, observant, consciencieusement, les objets, nous pouvons leur établir un sens, les faire agir en nous. Comme des mots. 

6 juin 2023

Shenron

La réunion des sept Dragon Balls permet l’invocation du dragon Shenron, capable d’exaucer n’importe quel souhait. La Terre se trouve souvent la cible d’indivuds voulant la détruire ou en dominer les habitants. Ce projet ne s’accomplit jamais sans pertes humaines voire, même, pertes d’un ou de plusieurs héros. Une fois les antagonistes vaincus, les personnages invoquent Shenron pour rendre la vie à ceux qui l’ont perdu. Dans l’un des chapitres, je ne me souviens pas lequel, Krilin, au moment de prononcer le souhait, demande à Shenron d’exclure de la résurrection les méchants, disant méchants il ne signifie pas, ici, les adversaires des héros et leurs séides, il vise les êtres humains « mauvais ». Je me demande, alors, quelle règle morale s’applique à ce souhait, quelle loi détermine la culpabilité de ceux péris. Shenron ne nous donne à ce sujet aucune indication, nous ignorons, alors, s’il s’agit de juger l’âme humaine, excluant par anticipation les individus susceptibles de commettre le mal ou bien s’agit-il de celles et ceux condamnés par la justice. Mais alors quelle loi appliquer ? Celle du Japon, de l’Iran, de la Somalie ? Peut-être l’exception souhaité par Krilin n’exclut, en réalité personne, Shenron s’interrogeant ainsi que moi-même se décidant à ne pouvoir trancher les méchants. Il réalise, sans que Krilin ne le sache, son souhait, il exclut les méchants de la résurrection mais comme il n’y a pas de méchants par essence..  

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  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
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