Depuis le 26 avril, j'écris un roman dont le fil conducteur se compose des dix sujets les plus populaires sur twitter à une heure donnée. J'indique et l'heure et le jour auquel je puise mes #.
Twitter 12 mai 2021
Chiara est #juive ce qui provoque parfois des tensions avec ses camarades de classe.
Tensions sans importance, de mauvaises blagues d’adolescents qui jouent avec les limites. Il arrive que Chiara s’énerve c’est antisémite et Rayan, mort de rire, répond
tu vas appeler la #LICRA ?
Les paroles, parfois, cependant excèdent le permis, Chiara sent bien qu’un vieux fond #antisémite baigne toutes ces « blagues ».
Chaque fois que le conflit #israélo-palestinien se trouve une actualité, ce bain rance engloutit.
Chiara, parce que la situation s’apaisait ces dernières années, n’y pensait plus. Elle ne remarquait même pas que les blagues antisémites, pour peu qu’elles demeurassent, se prononçaient avec moins de conviction. Ca passait.
Chiara, ne dort pas cette nuit, la #guerre entre le #Hamas et #Tsahal la terrifie, lui donne de l’insomnie.
Elle écrit à Anissa vers 2h du matin
Chiara : putain ça va être horrible demain
Anissa : je sais mon père casse les couilles
Chiara : les ovaires
Anissa : casse pas les couilles toi
Chiara : Rayan va être trop relou
Anissa : mon père là #yahoudi, #yahoudi #yahoudi
Chiara : mes darons…ils ont rien dit à table.
Les parents de Chiara, juifs, intellos, de gauche, qui ont transmis à Chiara une solide culture littéraire et intellectuelle, l’encouragent dans toutes ses prises de position politique, admirent son courage et la remercient de prendre, presqu’en leur nom, la défense des plus faibles. Sarah, sa mère, se sent fière de sa fille quand à Kippour, en 2019, en famille, elle défendit le #voile auprès d’une assemblée plus que réfractaire.
Les parents de Chiara ne comprennent pas tout des engagements de leur fille et acceptent, eux, d’être un peu dépassés ma chérie par tous ces trucs cisgenre et compagnie…on te fait confiance…
Les parents de Chiara ne dorment pas non plus. Ils regardent cette chaîne d’info en continu qu’ils détestent tant #i24News sorte de #BFM israélien, au goût prononcé pour le scandale. #I24 diffuse aussi en français et, cette nuit, Sarah et son époux ne se sentent pas capables de penser en hébreu.
Ils voient à la télé les #explosions
ces morts pour rien
Comment va David à #Tel-Aviv ?
Julien vient de m’écrire…il est dans l’herbe avec un chauffeur de taxi
Y a 130 #sirènes qui sonnent
C’est la #guerre
#IsraelUnderAttack
#GazaUnderAttack
#Lod
Quelle horreur, quelle horreur…
Salauds #Netanhyaou
Salauds #Hamas
#Milice.
Ils auront le temps d’atteindre l’#abri ?
90 secondes il a dit David pour y aller
Seulement ?
#Missiles, #Roquettes, #F35, #F16, #Qassam
#DômeDeFer
Des larmes, partout, des larmes.
Le droit d’Israël à exister
Le droit de la Palestine à exister
Jérusalem
3 fois sainte
Ils savent que les prochains jours seront difficiles ici, qu’on leur demandera de prendre position, les juifs, les arabes, tout le monde attendra d’eux une prise de position sans nuance.
A #gauche on les considérera comme des meurtriers s’ils ne condamnent pas #Israel en les termes les plus dur ; les #juifs les traiteront comme pire que des traitres s’ils ne souhaitent pas l’abolition des palestiniens.
La mère d’Anissa, pleure, devant les images d’enfants morts que lui montre son mari sur l’ordinateur. Il veut les montrer à Anissa, papa je veux pas voir ça !
Aziz : Ah tu veux pas voir, tu veux pas voir…#harki !
Anissa : Tu me parles pas comme ça !!!
Zohra pleure encore plus : hlass, hlass, hlass
Anissa au père : Tu casses ton ramadan hein
Aziz : qu’ils aillent se faire enculer les #juifs
Anissa, entre ses dents, : alcoolo de merde.
Aziz : regarde, regarde, il tend son smartphone cette fois.
Anissa voit, dans des langes enveloppés, 7 #enfants immobiles, Anissa voit 3 femmes, à genoux dans la poussière, un grand voile blanc leur couvre la tête. Elle devine leurs larmes, elle fait face aux images du désespoir, de l’injustice. Son coeur se serre et une bouffée de haine monte en elle qu’elle réprime de justesse. Elle se souvient, cette photo, l’avoir vue ailleurs.
Papa…c’est une photo de #Daesh ça
Aziz : harki, harki
se tourne vers la mère
Aziz : t’as vu ta fille, lahchouma,
Anissa, entre ses dents, : c’est toi la honte de la famille.
Max ne dort pas de la nuit, trop excité par la guerre, il jubile devant les explosions il tape sur son clavier
t’as vu la précision de Tsahal ?
Wah les roquettes, pouh pouh pouh
Twitter 10 mai 2021
Twitter 7 mai
La mère d’Anissa fait #ramadan et sa pratique ne déborde pas, elle ne s’en vante pas, la garde pour elle. Scrupuleusement, elle prie cinq fois par jour, lit le Coran, prépare pour #ZakatAlFitr les denrées alimentaires et un peu d’argent à donner, le jour de #l’Aïd aux nécessiteux. Zora, la mère d’Anissa, n’aime pas #Israël sans que, à l’inverse du père à moitié-alcoolique à moitié complotiste, elle n’imagine #Israël responsable de tout le malheur humain.
Anissa déteste Aziz, son père, elle réduit au maximum ses interactions avec lui. Aziz adore ses enfants, tous ses enfants. Sale égoïste, lui avait envoyé à la figure Amine l'aîné (27 ans aujourd’hui) avant de partir pour toujours, gardant contact avec le reste de la fratrie, surtout Anissa sa benjamine qu’il adore. Il a ouvert en Chine, à Pékin, une boulangerie française au succès fulgurant, là-bas, comme par ironie je suis un vrai français dit-il.
Twitter 1-3 mai 2021
Week-end 1-3 mai
2.
Lana est rassurée, les copines vont bien, en voyant les images de la #manif et la surexcitation de Max devant les gauchos qui tapent sur les #gauchos elle a craint que les trois filles, surtout Chiara qui est tête brulée, ne finissent avec un oeil en moins.
Sylvie, la mère de Lana, demande à Max de mettre la table il dit lana, tu mets la table
Lana, avant de s’énerver, se souvient du message d’Ophélie il y a quelques jours il fait pas une dépression max ? une sorte de culpabilité sistoriale, une vague nostalgie enfantine remonte, et elle obéït. Max, ne s’y attendait pas. Il hésite entre la remercier et lui adresser un sourire goguenard. Il opte pour le sourire goguenard, merci la féministe.
Lana, soupire, lasse, elle féministe ? quand elle compara à Chiara ou même à Lou…non vraiment pas. Seulement elle relève
c’est pas une insulte féministe hein
Marc, Le père de Max pas de politique à table
Max : papa t’as vu le tweet de #JeanMessiah ? Enorme, il montre le tweet sur son tel
Marc, amusé, voyant Lana qui le fusille du regard : Pas de politique Max
Leur complicité évidente n’a échappé à aucune des deux femmes.
Le repas finit, Lana demande à son père de débarrasser la table ce qui le désarçonne et, mécaniquement, comme guidé par son étonnement, le fait. Ca amuse tout le monde. Sylvie le remercie et, Marc se trouve d’une grande générosité d’avoir ainsi aidé son épouse.
Dimanche :
OUI #SAKEN Lana entend ces cris provenir de la chambre de Max depuis une heure. Il sort dans le couloir son t-shirt #KCORP. Lana sort pour lui demander de se taire…tu pourrais au moins mettre un pantalon. Il crie #SAKEEEEEEEN le #midlaner en claquant la porte de sa chambre. Lana va voir sa mère, vous pouvez pas faire quelque chose ? Son père répond on te laisse faire quand t’écoutes tes…coréens… Lana mais il me laisse pas faire du tout il cogne contre les murs…Il la reprend Oh Lana, t’es vraiment pénible, il a raison ton frère. Lana maman ? Un geste de la main, de la mère, un geste, ce geste que Lana mémorise pour ne jamais le reproduire, avec personne. Ce geste de renoncement, de résignation, ce geste de soumission. Lana retourne dans sa chambre, claque la porte. Son père crie Lana.
(on ne peut pas mettre d’émojis sur le forum il y en aurait dans la conv)
Elle écrit à Rayan
Lana : J’en peux plus de Max
Rayan : Il veux pas t’écoute #BTS ?
Lana : Il crie « midlaner » depuis une heure
Rayan : Dinguerie !
Lana : Ouais…
Rayan : Toi aussi tu mate #LOL ?
Lana : ???
Rayan : les #EUM ?
Lana : et vous soulez.
Rayan : ???
Lana : Fatigue.
Rayan regrette d'avoir été aussi con, écrit-il à Anissa, sans bien saisir pourquoi il lui écrit à elle. Cette-fois, contrairement à l'autre, en classe, elle ne se vexe pas. A quoi ça tient ? Elle se sent complice de cette intrigue amoureuse et ça lui va bien.
Lana entend son frère à côté, qui semble parler à des gens sur #discord. Elle l’entend #300k, elle entend #OTP, il parle fort, il prend un malin plaisir, elle le sent, à parler bien plus fort que nécessaire, à prendre le plus de place possible, cette place qui, dans le monde, ne cesse de rétrécir pour lui.
Max, s’il te plaît, t’es ridicule. Il ne l’entend pas. Il a son casque sur les oreilles, son t-shirt sur le dos, sa chambre est sombre et sale. Il a installé de travers des LED violettes. L’ordinateur fait beaucoup de bruit, l’unité centrale transparente projette sur le plafond une rosace de couleur. Elle regarde le spectacle, elle ne sait pas combien de temps. Elle détaille cette chambre qui n’a pas changé depuis tant d’années. Comme son frère. Les mêmes choses, les mêmes objets un peu plus obsolètes, comme son frère.
Elle se souvient de sa chaise #DxRacer neuve, il y a deux ans. Elle l’a aidé à le porter depuis le relais colis, ça pèse 30 kilos cette merde ! Elle le revoit monter l’objet et son air accompli quand il s’est assis depuis la première fois, comme l’aboutissement de quelque chose. La chaise, aujourd’hui, grince et le cuir synthétique, au dos, montre des signes d’usure.
Elle écrit à Ophélie pourquoi t’as dit qu’il était dépressif Max ?
Ophélie n’a pas dormi depuis deux nuits.
Twitter 1er mai - 3 mai 2021
Week-End
1er-3 mai
(Première partie)
Les cinq filles ont toutes dormi dans la chambre d’Ophélie, à cause du #couvre-feu qui empêche la circulation entre 19h et 6h mais aussi parce qu’elles aiment la chaleur tendre de cette promiscuité. Le matin, à 9h le réveil de Chiara sonne
Chiara : #Manif !
(silence)
Chiara entonne l’Internationale : C’est la lut-te fin-ale
Lana émerge, difficilement
Lana : Putain !
Chiara : Tu préférerais que je chante #BTS ?
Lana : J’ai trop mal dormi à cause d’Ophélie
Lana à Ophélie : T’avais tes règles ?
Chiara à Ophélie : Tu t’es levée cent sept fois pour aller aux chiottes
Anissa dans un bâillement : J’ai rien entendu moi
Lana, toujours dans le lit, : Ouais toi un teh tu dors tout le week-end.
Ophélie : Euh…
Lana, toujours au lit, filme les filles
Ophélie : arrête !
Lana : C’est pour Insta
Chiara : T’as fait mille stories toute la soirée…
Lana, toujours sur son téléphone : Oh #1stTasteOfButter
Ophélie : Je suis trop moche sans maquillage !!
Chiara à Lana : Ca veut dire quoi même ?
Lana : Les retours sur l’album !!!
Anissa à Lou : Tellement relou
Lou n’ose pas répondre, elle baisse la tête puis à Chiara : Tu vas à la manif du #1er mai ?
Chiara : GRAVE
Lana chantonne : Like an echo in the forest 하루가 돌아오겠지 아무 일도 없단 듯이
Anissa à Lana : Même tu racontes quoi dès le matin
Chiara à très haute voix : qui vient à la #Manif ?
Anissa : archi-mort
Lana : la même
Ophélie : Je suis fatiguée
Lana regarde Ophélie avec un air d’une compassion exagérée
Ophélie : Mais arrête !! J’ai pas mes règles
Chiara : Y a rien de honteux
Ophélie : Mais !!
Chiara à Lana : Par contre t’avais dit que tu venais hein
Anissa à Lou : T’es sûre tu veux y aller ?
Lou : Oui
Anissa : Te force pas hein
Lou : Non j’ai envie
puis d’une petite voix à Anissa
Lou : T’es sûre que tu veux pas venir ?
Anissa : Bon, bon
Chiara : Allez !
se remet à chanter
Anissa : Tu casses la tête. Vas-y ok, je viens.
(pause)
Anissa : Je sais pas si je resterai par contre
Lana, sur son téléphone depuis un moment, ne dis rien
Chiara regarde discrètement : Oh, y a Rayan qui a réagi à la story !
Lana : Vas-y arrête
Anissa : Il est vif.
Chiara participe aussi souvent qu’elle le peut aux #manifs depuis deux ans environ. Elle se méfie comme de la peste des #syndicats, surtout ceux étudiants, elle les trouve bruyants, très masculins et surtout très idiots. Son grand-père, un ancien cheminot, adhérent de toujours au #PCF assommait la famille de discours sur la lutte des classes et l’énième congrès du parti.
De ce discours Chiara ne percevait qu’un vague brouhaha où les mots abscons et clairs flottaient les uns à côtés des autres, elle entendait capitalistes, valeurs d’usage, dictature du prolétariat, Mitterrand…
Les discours de papy, comme le communisme façon #PCF, s’enlisaient, n’engendraient rien, sentaient le camphre et le passé gênant.
Les « hommes de la famille » (c’est à dire le père et le grand-frère de Chiara), comme Papy les appelait, accueillaient avec une froideur polie les longues plaintes mélancoliques de Papy.
Lycéen, le grand frère de Chiara lycée défendait de molles idées de gauche et, désormais, achevant son Master 2 de Finance, défendait mollement l’écologie en lui ajoutant, aussitôt, l’épithète qui l’annulait non punitive.
L'Internationale, Sera le genre humain chantait souvent papy et ce chant d’amour pour le genre humain n’atteignait jamais Chiara et, pour cause, comme elle s’en rendit compte plus tard : il ne la concernait pas, le communisme de papa excluait ou, du moins, reléguait les femmes.
Papy ne se privait ni de blagues grivoises au grand désespoir de Manin, sa fille et la mère de Chiara, ni de blagues plus franchement sexistes. Vraiment un truc de bonnes femmes soupirait-il lorsque sa fille ou sa femme le contredisait.
Il a fallu que Chiara se retrouve par hasard, le 23 novembre 2019, à la marche #Noustoutes pour s’emparer de la politique.
Elle passait #PlaceDeLaRépublique parce qu’elle devait déposer chez un réparateur l’ordinateur portable de son père et c’est alors qu’elle vit l’immense cortège, essentiellement féminin, criant et chantant et, sans s’en rendre compte vraiment, comme par un appel venu d’une profondeur muette ou, plus certainement, d’une frustration longtemps tue, les rejoignit. Elle fondait, en quelque sorte, sa colère dans cette colère géante, répétée 49 000 fois, de République jusqu’à #Nation, à Saint-Etienne, Nantes ou Bordeaux.
L’élan passé elle prit peur au milieu de cette foule, cernée par des #CRS en armes, au regard de haine, une haine qui s’hérite et se transmet de générations en générations de #CRS, le matériel s’adapte, la haine, elle, jamais démodée, toujours intacte, se transmet telle quelle.
Un groupe de filles, à chapeau pointu, la voyant paniquée, s’approchèrent d’elle pour la rassurer. Dans son désarroi cette situation parut si irréelle à Chiara qu’elle crut - la panique peut métamorphoser la réalité jusqu’à l’absurde en tentant de lui restituer sa cohérence - se trouver un 31 octobre au milieu des bouteilles de bière décorées en citrouilles, des sorcières et des zombies.
Anna, 23 ans, voyant Chiara encore plus paniquée, lui dit en riant
T’inquiètes ! On est pas des vraies sorcières
Ce qui mécontenta beaucoup une autre sorcière qui, elle, pour sûr, affirmait-elle, était une vraie sorcière.
Chiara eut beaucoup de mal à défaire l’écheveau complexe et contradictoire de ces sorcières. Elle ne saisissait pas bien, à les entendre discuter, s’il s’agissait pour ces femmes là de se trouver une lointaine généalogie de martyres ou se croire, réellement, dotées de pouvoirs surnaturels capable de tordre le monde. Chiara croit que la révolution peut tordre le monde.
Arrivée à la fin de la manif’, avant la charge des #CRS, elle prit le numéro d’Anna qui depuis l’oriente dans son parcours militant et intellectuel.
Elle lui conseilla quelques lectures et notamment le Sorcières: La puissance invaincue des femmes de Mona Chollet qui, après la manif, fut son deuxième choc militant. Elle lui conseilla aussi différents sites et différents comptes twitter à suivre notamment celui de Valerie Rey-Robert @valerieCG et son livre, qui lui fendit le coeur, une culture du viol à la française à cause de l’écho qu’il y trouva avec sa propre vie. Ces livres, les discussions avec Anna et d’autres femmes qu’elle croisant durant ces deux années, lui permirent de réécrire sa jeune vie. Anna lui expliquait que le féminisme était autant appropriation de son histoire que de l’Histoire. Qu’il s’agissait bien davantage de « s’écrire » que de se « réécrire ». Son dégoût envers les hommes augmenta sans cesse et celui-ci se justifia, souvent. Le malaise qu’elle ressentit devant Melvin lorsqu’il les aborda, Ophélie et elle, se trouva validé rapidement, lorsqu’il lui proposa le shoot sexy. Elle ignorait cependant que Melvin continuait à parler à Ophélie malgré sa mise en garde. Chiara, s’était montrée trop brutale, incapable d’adapter son discours à la situation concrète, à la personnalité réelle d’Ophélie. Ophélie, alors, lui cache sa relation et se trouve, esseulée, abandonnée aux griffes de ce garçon.
Anna est d’extrême gauche, trotskiste (papi déteste les trotskistes autant que les #CRS) et aujourd’hui, pour le #1ermai, Chiara doit la rejoindre avec Lou et Anissa. Lou, sans en avoir parlé avec quiconque de son entourage, a suivi une trajectoire parallèle, quoi qu’exclusivement numérique, à celle de Chiara. Elle n’eût pas, avant aujourd’hui, le courage de se rendre en #manif mais elle lisait avec avidité tout ce qui lui tombait dans les mains au sujet du féminisme y compris les livres théoriques. Si pour Chiara le premier choc fut celui de la #manif #NousToutes, pour Lou ce fut la rencontre avec Le Deuxième Sexe de Beauvoir. Là où Chiara connut la colère Lou connut l’abattement. Ce livre, au lieu de lui donner de l’entrain, l’écrasait complètement, il la mit face à la nécessité d’une action dont elle se sentait absolument incapable. Au-delà de sa condition de femme, c’est sa condition de Lou, discrète, peureuse, timide qui se réveillait là dans toute sa honte. Elle sentit deux fois palpable sa condition subalterne, portion congrue comme l’écrivait Beauvoir et, à cause de sa timidité, portion congrue de la portion congrue, soit moins que rien.
Pour se sauver de ce naufrage, elle eut recours, de façon plus frénétique encore à l’écriture là où lui était permis assez de puissance pour vivre.
Anissa, elle, traînait des pieds pendant la manif, elle ne s’intéresse pas vraiment à la politique, elle fuit tous les discours qui y ont trait et s’énerve quand Chiara parle du voile, défend le voile sans qu’elle ne sache précisément ce qui l’énerve là-dedans. La mère d’Anissa porte le voile et Anissa déteste les racistes comme #JeanMessiah qui la considèrent comme inférieure pour ce motif…seulement quand Chiara défend sa mère, ça la hérisse encore plus que quand #JeanMessiah parle.
Lou avait déjà vu sur Twitter ces cohortes de CRS, armés, bouclier à la main, elle ne s’imaginait pas un tel écart en les affrontant en vrai. Menace concrète qui paraît bien plus parée à l’assaut qu’à la protection.
Anissa veut aller en tête de cortège, Chiara l’arrête c’est pas du tourisme hein Anissa, vexée, boude, Lou demande devant y a les #blackblocs ? Chiara oui, et ça craint, ça se tape de fou, j'ai pas envie de me faire fracasser le crâne. Chiara écrit un message à Anna, je suis avec des copines, c’est leur première manif, on peut vous rejoindre quand ça arrive à #Nation ?
Les filles entendent des cris, des heurts, des jets de projectile en tous sens et le cri #collabos sort de la foule. Le nuage jaunâtre des gazeuses s’élève Chiara dit putain les SS chargent. D’autres manifestants, qui fuient le conflit, l’entendent et lui disent non c’est le #SO de la #CGT et les #blackblocs qui se tapent dessus.
Les trois filles n’y comprennent rien. Chiara dit mais non ça doit être les fachos…Le type très sûr de lui, non, non les #blackblocs ils ont tabassé la #CGTRATP et même les sans-papiers. Un type, retraité, sticker de la #CGT sur le blouson Quelle honte.
2.
Twitter 29 avril 2021
Anissa s’ennuie follement en classe, le sort a voulu que de toutes ses amies les plus proches elle soit la seule à se retrouver dans le groupe B. Elle envoie aux filles des messages toute la matinée en les suppliant de la retrouver devant le lycée à midi. Elle écrit surtout à Lana qui est un peu la cheffe, elle structure le groupe, organise les activités communes. Les jours où Lana est malade tout le groupe se grippe et personne, même pas Ophélie, ne parvient à diriger et maintenir l’ensemble. Les filles restent seules ou, au mieux, vont par deux. A 10h30 Anissa reçoit un Snap de Chiara avec un filtre qui la fait apparaître au côté du chanteur #btob. Avant qu’elle n’aie le temps de lui répondre le prof de philo, M. Feumer, aperçoit Anissa sur son téléphone, il soupire, prononce un peu fort son prénom Anissa…elle s’excuse, désolé Monsieur il répond je sais que ce n’est facile pour personne en ce moment, je te demande juste de tenir un peu…pour nous non plus c’est pas simple regarde ce ce #Blanquer…il montre les fenêtres #Blanquerdelair ! On attend toujours les purificateurs ! La classe rit de voir ce professeur, si souvent caustique, se plaindre aussi ouvertement du ministre. Les élèves partagent, vaguement, cette détestation envers Blanquer, il est pour elles et eux, moins un ministre qui parle sur #europe1 qu’un meme Twitter qui joue à la corde à sauter avec des enfants de 5 ans ou rate des divisions sur #BFM.
Anissa range son téléphone avec mauvaise humeur.
M. Feumer est un prof plutôt apprécié, le #confinement et, surtout, les cours en demi-groupe ont contribué à améliorer encore son image. Avec vous monsieur on apprend des vrais trucs avait dit Rayan. M. Feumer l’avait remercié et il avait ajouté, narquois et complice, ce serait bien que tu me le montres dans tes copies Rayan. Un oh le bâtard rieur et bon enfant s’était élevé de la classe puis le cours avait repris, plutôt calmement.
Anissa n’aime pas trop l’école, elle s’est toujours sentie un peu une intruse dans le système scolaire. Elle n’a suivi le cursus général qu’à cause de l’insistance désespérée de sa mère qui craignait de la voir finir, comme elle, femme de ménage. Anissa s’est battue pour satisfaire sa mère, elle a choisi les mêmes spécialités que ses copines, humanités littérature et philosophie pour ne pas finir encore plus perdue. Elle stresse pour le bac dont elle ne comprend pas les modalités pour cette année, le discours politique change, toujours, comme le #déconfinement dont on ne comprend s’il sera le #19mai en #juin ou #jamais.
Elle ajoutera il est où Damso ? et #BTSPAVEDTHEWAY
Anissa ne tient pas en place et sort, dix minutes après la remarque du prof, son téléphone, sur lequel elle ouvre #wattpad. Elle lit beaucoup sur #wattpad, elle y écrit encore plus.
Le soir, après avoir bloqué une heure sans écrire, Anissa se rappela de son interaction du matin et se mit à lire les écrits de lou des bois comme Lou se désignait sur la plateforme. Elle y passa la nuit. Elle adorait tout ce que Lou écrivait. Ses poèmes, ses nouvelles, ses romans avortés et en cours et une sorte de romance homosexuelle bizarre avec #EmmanuelMacron et une petite frappe d’Amiens nommé #billie.
A partir de ce moment là Anissa intégra Lou au groupe de ses amies qui, de peur de gêner, prit le moins de place possible. Le jour des vacances scolaires, Lana invita la bande chez elle et parla de 420 avec de gros éclats de rire ce que Lou ne comprit pas du tout, elle les accompagna, préférant largement leur compagnie à la solitude qui fut toujours son lot. L’appartement était vide pour le week-end. Max squattait chez Laure, sa copine, la seule qu’il eût jamais, et les parents ne rentreraient que bien plus tard. Quand Lana se mit à rouler Lou ouvrit grand les yeux, très inquiète devant le geste illégal, et voulut partir mais se ravisa de peur de perdre ses nouvelles amies. Lou refusa de fumer et Lana, défoncée, n’insista pas mais lui dit je croyais trop t’étais une vieille meuf prétentieuse. Le visage de Lou se contracta, elle hésitait entre le sourire soumis et les larmes angoissées qui lui montaient. Anissa, arriva, la prit dans ses bras et dit à Lana, t’abuses !! Lana, rit du rire mou et enroué de la beuh et s’excusa je te kiffe maintenant hein.
De leur passion pour l’écriture, Lou et Anissa ne s’ouvrent que peu auprès des autres filles, aucune d’entre elles ne l’ignore, évidemment. A cette pratique personne n’assigne aucune valeur positive ou négative, elle est un fait, à égalité avec la passion de Lana pour la #K-Pop ou la pratique semi-virtuose d’Ophélie sur Instagram. Si écrire peut faire l’objet de moqueries ce n’est jamais que pour rire, de la même façon qu’on se moque de la superficialité d’Ophélie et d’Instagram ou du fanatisme religieux de Lana pour tout ce qui est sud-coréen. Chiara, durant l’été 2019, avait envoyé un snap depuis le Barbecue Coréen où elle dînait avec ses parents et, sur la photo où les tranches de viande grillaient, écrivit : le harem de Lana.
La cloche sonne enfin, Anissa murmure Ya Rahbi Rayan l’entend et mime l’horreur starf une islamo-gauchiste Anissa, en même temps qu’elle prend ses affaires, tu dis starf et tu parles ? Rayan ahahah, je fais #ramadan c’est pour ça. Il lui demande tu fais quoi après ? Anissa rougit un peu et sans la laisser répondre il reprend avec un faux détachement Tu rejoins Lana ? Anissa n’est pas particulièrement intéressée par Rayan mais ça la vexe quand même, Ouais enfin pas sûr pourquoi ? Rayan pour rien, pour rien, juste comme ça. Il va dire quelque chose puis se ravise Anissa demande T’allais dire quoi ? il répond rien, rien t’inquiètes puis agite la main en direction de deux garçons près de la porte ehhh malik ça dit quoi ? Anissa entend le mot #PSG et le groupe des garçons disparaît.
Twitter 28 avril 2021
Twitter 28 avril 16h32
Le match de #Benzema avait ravi Max, cte contrôle de la tête bim reprise de volée dans la mère à Mendy. Mais le score ne lui convenait pas 1-1 à domicile c’est la merde…twettait-il dans l’indifférence générale. Ses tweets ne perçaient jamais, un de ses amis, un jour, l’avait raillé à ce sujet t’as 3500 tweets et 75 abonnés…le même ratio que #Werner devant le but. Max n’avait su quoi répondre, la répartie n’était pas son fort et il ne trouvait, dans le meilleur des cas, le bon mot que des mois après l’événement. Max détestait sa soeur Lana il la trouvait superficielle, ridicule, il haïssait la K-Pop qu’elle écoutait à longueur de journée et prenait un malin plaisir à taper contre le mur séparant leurs deux chambres lorsque, invitant une amie, Lana voulait s’ambiancer avec sa copine. Max se montrait particulièrement pointilleux quant au volume lorsqu’Ophélie rejoignait sa soeur, la voix de #Joonie, toujours, se trouvait interrompue par ce martèlement frénétique. Chiara, un jour, demanda à Lana je peux le défoncer stp ? Lana, fit un geste de la main, laisse tomber. De toutes façons y a que quand Ophélie et là qu’il s’arrête pas. Là t’inquiètes.
Un soir, après le départ d’Ophélie, Lana fit remarquer à son frère, d’un air mi-amusé, mi dégoûté, tu la kiffes hein ? Max bégaya, rouge de honte, les yeux haineux, cette pute ? puis il rejoignit sa chambre, claqua la porte, poussa la puissance de ses enceintes au maximum pour écouter #Kendrick. Lana, soupira. Max pensait prouver, par ces coups brutaux, sa virilité, il imaginait que ces gestes vifs et bruyants feraient de lui, aux yeux d’Ophélie, un mâle alpha irrésistible. Elle le faisait fantasmer à cause de son jeune âge et d’une lointaine ressemblance avec #Rina Sawayama. Sur le forum #jvxcom, dans la rubrique sexualité, il rédigeait parfois de longs posts pour demander conseil les kheys la pote trop bonne de ma soeur mineure me fait des avances de fou. Les membres l’incitaient à profiter, quelques uns lui proposaient d’inclure la soeur, d’autres de filmer le tout.
Ophélie trouvait Max chelou et, sans qu’elle ne l’avoua directement à Lana, vraiment malaisant. Ophélie n’en cessa pas pour autant ses visites hebdomadaires chez Lana, Ophélie aimait et admirait Lana, son assurance, cette inflexibilité quant à ses goûts même les plus clivants, sa capacité à dire je ne sais pas ou je m’en fous. Lana donne du courage, par son exemple, à Ophélie et le jour où des garçons de la classe tournait le viol en dérision pour défendre #Moha la Squale, Lana gifla le meneur puis repartit comme une #queen comme le dirent les autres filles de classe. Ophélie puise à ce souvenir lorsque la peur la paralyse et y trouve la force d’agir.
Lana aime Ophélie, sans aucun doute. Lana jalouse Ophélie, elle lui envie son goût sûr et simple, ses longues jambes, son beau visage et se console de posséder, elle, une plus jolie poitrine que celle d’Ophélie. Un jour Lana, un peu défoncée, avait persiflé auprès de Chiara Ophélie, on lui colle un sticker quicksilver ça fait une planche de surf. Chiara ne répondit rien, elle écarquilla ses grands yeux noirs, et le répéta dès qu’elle le put à Ophélie qui pleura beaucoup. Personne n’en tint rigueur à personne, Lana, le lendemain, mouilla le beau visage d’Ophélie de baisers et de larmes, et Ophélie pleurait et ses cheveux étaient humides et Chiara patronnait la scène en pleurant elle aussi.
Max ne parvient pas à se trouver une place dans le monde, il a redoublé deux fois sa L1 de droit et ne se rend plus à l’Université, il socialisait peu avant le Covid et a désormais une excuse pour ne rien faire. Sa mère s’en désole, son père s’indiffère. Deux fois par an il le traite de parasite. Sa mère cherche des solutions, elle épluche les offres de formation courte et professionalisante, tiens regarde ce #BTS à quoi il répond d’un rire méchant et méprisant tu me prends pour qui ? pour un enfant de #Dole ?
Lana connaît à peu près le comportement de son frère sur Internet et sait pertinemment qu’elle ne pourra pas le changer. Elle ne peut arracher Max à sa chute ni même ralentir celle-ci, elle a essayé il y a deux ans, au début, quand Max commençait seulement à déchoir. Il la repoussa avec haine, il voyait en elle quelque chose qui le rendait fou de rage, il traitait l’amour de sa soeur comme une charité humiliante. Alors, l’amour enfantin pour ce frère jadis aimé devint une vague indifférence puis un grand dégoût lorsqu’elle l’entendit défendre la pédophilie sur le #discord consacré aux scans de manga où ils participaient tous les deux. Elle quitta le #discord aussitôt, se souvenant avec horreur des arguments avancés par son frère. Chaque fois que dans l’actualité, une affaire de cette nature ressort, elle pense à son frère, le regarde avec colère, la mâchoire serrée, bougeant de droite à gauche dans un grincement méchant.
Lana avait pesté contre son frère après la conversation de la veille et le soir elle reçoit un SMS d'Ophélie
Dis, tu crois pas qu’il fait une dépression Max ?
Twitter 27 Avril 2021
Lana se réveille à 8 heures comme tous les jours y compris le week-end, y compris pendant les vacances, y compris pendant les semaines de cours en #distanciel. Elle désactive l’alarme avant qu’elle ne sonne, elle ne règle celle-ci que par précaution, au cas où, un jour un rêve trop intense la priverait du rivage de l’éveil.
Aujourd’hui, elle n’a pas cours, le lycée a décidé la veille de diviser les classes en demi-groupes. Son édification reprendra la semaine suivante, puis à nouveau une semaine blanche, puis à nouveau la classe en demi-groupe ; une instruction menée à cloche-pieds (dont on espère qu’elle ne formera pas des boiteuxses et des infirmes). Lana est une élève moyenne et sérieuse de la 3ème à la première sa moyenne a baissé avec régularité ; 1 point chaque année pour se fixer, aujourd’hui en terminale, à 13 qui semble être son plancher. Elle vise la mention Bien au Bac. Elle n’excelle en aucune matière et regrette l’absence de spé coréen dans son lycée, par naïveté géographique et culturelle elle a choisi d’apprendre le chinois. Aujourd’hui, elle conçoit, honteuse, combien la raison de son choix, en seconde, était raciste.
Lana gère avec doigté son existence numérique, elle se soucie peu, bien sûr, de la valeur de ses données, de leur encodage ou leur traçabilité. Elle clique sans regarder sur le « ok tout accepter » chaque fois que l’option apparaît, elle ignore absolument ce à quoi elle consent en cette matière. En une demie-heure, elle a pu parcourir l’actualité du monde, c’est à dire de #BTS ou de #Enhypen sur Twitter, et sa vie sociale par Instagram.
A 8h30 elle quitte son lit, elle passe devant la chambre de son grand-frère à quoi elle se promet de ne jamais ressembler, ce geek avec son poster du #Real Madrid sur la porte qui s’affiche sans vergogne et lui fout la honte chaque fois qu’une copine passe à la maison. Elle aimerait le déchirer, son frère l’insulterait, à peine, elle sait quel être craintif il est. Sa mère se montrerait plus sévère, elle tient, absolument au respect de la propriété de chacun. Le père ne prendrait pas partie, il préfère, en tout s’abstenir, sauf au jour des élections présidentielles en râlant contre le résultat, quel qu’il soit. La veille, son père protestait contre les nouvelles mesures sanitaires sans expliquer ce qu’il leur reprochait ni même leur contenu. Au dîner Lana échangeait avec son père
Lana : tu te feras vacciner ?
Vers 9h Anissa lui envoie un message :

Twitter 26 Avril 2021
Il est magnifique le clip #Enhypen, s’exclama Lana au milieu de l’après-midi, lundi. Ses 4 amies et elles mangeaient un sandwich libanais dans un parc peu connu, proche de la rue Doudeauville, dans le 18ème. Lana, répétait : il est magnifique et tendait son téléphone à ses amies qui partageaient, avec moins d’entrain, son enthousiasme. Cette partie là, i n c r o y a b l e, disait-elle en désignant l’écran ce qui fit rougir Ophélie qui, honteuse de sa honte, demanda on a toute eu la même réaction ? Personne ne lui répondit, les autres filles observaient Lana et ses yeux scintillants de lumière bleue. Lana rêvait aux embrassades avec son chanteur préféré et n’accordait ni à la honte ni à la parole d’Ophélie la moindre attention. Si les autres lui parlaient, Lana se contentait d’une molle approbation.
Elle s’abandonnait à la seule activité sérieuse et importante ; caresser en pensées le corps de #Heeseung, là, presque réel sur l’écran animé. Lana, à force de répétitions, de rêveries, de recherches google image connaissait, mieux que son médecin, l’anatomie de #Heeseung. Elle pouvait deviner, malgré le maquillage et les effets spéciaux des clips, l’état de santé véritable de son idole. Elle en pouvait mesurer les moindres variations, s’en inquiéter et envoyer à la boite de production des recommandations douces mais fermes.
Les images qui traversaient Lana étaient sans contours, inexactes en quelque sorte ; son désir ne se composait pas d’une série de gestes, il consistait en une succession d’impressions et de secousses internes.
Lana quitta brutalement ses amies, déçue, sûrement, de les voir si peu partager son excitation. Elle marcha vite, sans se retourner, comme pour les devancer si jamais, au bout de la rue, #Heeseung devait apparaître. Oui, dans ce cas, Ophélie ne l’aurait pas, avec ses longs ongles peints à la mode et ses talons transparents. Elle prendrait #Heeseung par le bras - ou se laisserait prendre par lui - et l’entraînerait dans les ruelles compliquées de Paris…Au croisement du boulevard Barbès et du boulevard de Rochechouart elle entendit une sorte de clameur s’approcher d’elle qui la figea. Prise par ses fantasmes elle ne pouvait imaginer d’autre objet à la clameur que la présence d’#Heeseung. Ses amies, à ce moment là, la rejoignaient essoufflées et Lana pesta.
Anissa si on te dérange dis le hein. C’est pas ça, je croyais…Le cortège du #lesbianvisibilyday approchait, chantant et agitant des bannières et des pancartes.
Les autres filles de la bande de Lana baillaient, Chiara, petite, brune, sentant bon le cèdre et le lilas, chantonnait You promised the world and I fell for it de #Séléna Gomez. Lana leva les yeux au ciel, activa le haut-parleur de son iPhone et diffusa le premier clip de l’album #Border Carnival en bafouillant les paroles qu’elle n’avait pas encore eu le temps d’apprendre. Tout, plutôt que de laisser la voix impie de #Séléna Gomez couvrir dans son esprit le doux souvenir de #Heeseung. La chanson finie, avant que Lana n’ait le temps de ranger son téléphone ou de changer de vidéo, une pub orange hurla depuis l’application YouTube, le joueur du PSG #Kimpembe hurlait quelque chose de vague à propos de la 5G. Chiara, piquée et piquante, ah, c’est mieux que ce qui était juste avant ça. Sans en rien laisser paraître Lana boue et rit avec Chiara puis se plaint de cette incompréhensible #rentrée scolaire, pour nous les lycéennes c’est devenu incompréhensible. Anissa poursuit…et encore toi t’as pas un frère qui passe sa journée à te parler de foot ou de #Ratchet et Clank. C’est quoi #Ratchet et Clank demande Lana, par politesse. Je sais pas, je sais pas. Les filles rient.
Lou reprend…vous savez qu’aujourd’hui…#tchernobyl