Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
boudi's blog
boudi's blog
Archives
Newsletter
1 abonnés
4 juillet 2023

Onlyfans

 

En ouvrant Snapchat, je vois que S. a posté une story où elle redirige vers un linktree sur lequel je ne clique pas. J’ouvre rarement, sauf pour me cultiver quant à Bassem, cette appli. Nous n’avions plus, avec S., depuis plusieurs années maintenant, qu’une relation distendue et, regardant la date, nos derniers messages remontent à trois ans.

Je lui écris, elle m’apprend qu’elle vient de se marier que de justesse nous nous ratâmes parce que son voyage de noces en Europe la fit passer Paris qu’elle adore tant. S., vit aux Etats-Unis, à Atlanta, adore la France et les chiens, adopte les plus abîmés par la vie. Son dernier chien, j’oublie son nom, il me reviendra (je croyais me souvenir, j’allais écrire Chico, sans certitude, en remontant notre conversation WhatsApp, Chapo, il s’appelait Chapo), avait été abandonné et maltraité. Elle le recueillit avant qu’un cancer ne le dévore. D’abord une jambe puis la vie. 

 

S., m’émeut, je lui avais offert les poèmes de Carver et le paysan de Paris traduit en anglais. Nous conversons toujours en anglais, elle écrit de la poésie, que j’aime assez, peut-être à cause de ce qu’en anglais tout résonne miraculeusement. Cette langue est un instrument de poésie. Elle parle, pourtant, français. 

 

Elle me déclare que, sa famille is struggling, je ne sais, si en français, nous avons un équivalent pour décrire les galères financières. Si le sens précisément de ce mot ne tire pas sa couleur du rapport protestant, de destinée manifeste, à l’argent. 

 

Son linktree compte plusieurs liens, son snapchat, son instragram et son OnlyFans. La souscription à son OF coûte, je crois, 9,99e. Son Instagram, s’il lui permet de garder contact avec ses amis, lui sert avant tout de vitrine publicitaire, redirige, souvent, vers son OnlyFans, par ses stories elle laisse entendre des promesses de rapports virtuels, plus tard et ailleurs, contre autre chose que du temps d’écran. Elle propose, parmi les services d’être online 8pm-2am, pour discuter en français, anglais et espagnol, ratissant, par là, le plus large possible, l’important, pour son interlocuteur, demeurant, essentiellement, de s’exciter - érotiquement, amoureusement ou sensuellement - avec elle. Nous sous-estimons, de façon générale, le profil des clients des travailleuses du sexe, une part d’entre eux y recherche une forme complexe d’affection et d’illusion amoureuse, ce jeu de dupe s’entretient de chaque côté de l’écran, le rôle, ici, de la TDS étant de suspendre, au maximum, la crédulité de son client, de dissimuler à lui-même (se prenant aussi au jeu?) que le spectacle est bien un spectacle. Que, leur rapport se situe - quoi qu’en disent les théories de la domination - dans un équilibre toujours changeant, le pouvoir n’appartient pas toujours et définitivement à celui qui dispose du moyen économique, cette dépendance, parce que la TDS dispose de plusieurs clients, ne correspond pas à celle des maîtresses ou des lorettes, surtout, et les maîtresses ici, plus dépendantes, certes, plus puissantes aussi en disposent avec plus d’abondance, les TDS jouent, à leur guise, de l’amour, titre précieux, bien davantage monnaie que métal précieux, ne possédant de valeur que, exclusivement, celle qu’on lui agrée. La subordination économique, la première dépendance, se renverse quand l’amour, bien joué, c’est à dire, en quelque sorte, investi, s’étend irrésistiblement.

J’ignore si Sarah parvient, aujourd’hui, à produire ces formes de dépendance, ce qu’elle vend, marchandant sa personne, est du travail et pas de chirurgie, une ode au naturel (c’est à dire pas de chirurgie du corps tandis, qu’en réalité, elle s’offrit une rhinoplastie). Le rapport maintenu par ce biais là, celui d’Instagram entre elle et moi m’interroge puisque, par nature, je ne suis pas le destinataire de ses stories qu’elle adresse à ses prospects tandis que moi, son ami, ne les emploie, les stories, qu’à des fins phatiques, un moyen de conserver du contact, par des réactions, coeur ou flamme, et quelques mots parfois, donnant à ces stories une double dimension, celle du contenu - l’adresse aux clients - celle de l’usage abstrait et jamais déclaré des stories : maintenir le lien. J’emploie essentiellement Instagram à cette fin, maintenir le lien sans me lancer dans les laborieux ça va quoi de neuf haha. 

Publicité
Commentaires
boudi's blog
  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Derniers commentaires
Visiteurs
Depuis la création 49 397
Publicité