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30 juin 2023

Air France

Je me souviens cette fille, la péniche, l’X., une fille, le prénom commençait par S., nous nous trouvions sur le pont, l’eau scintillait à cause de ce que l’X. fait tomber sur le monde une lumière de théâtre, elle ne me plaisait pas tellement, du moins la question ne se posait pas en ces termes, dans la langue de l’X, posée j’y eus répondu par le haussement d’épaules, S., sur le pont, me dit tu es bien entourée parce que des amies m’accompagnaient et que la nuit, pour les garçons, les amies filles deviennent un halo enrichissant, des mots banals, elle parle la langue des autres. S. me dit, j’ai froid puis, après une pause, ah si seulement quelqu’un pouvait me réchauffer. S. répète cette dernière phrase, moi je lui parle des vaguelettes dans la Seine, puis, cédant à son implicite, je l’embrasse, en moi, ça fait comme une tempête, le plaisir insensé de n’importe quel baiser, ici, j’embrasse la substance dans cet éblouissement chimique j’embrase mes synapses qui font l’amour avec mon coeur. Ce moment, qui ne voudrait le revivre ? J’ai envie de t’embrasser encore, je lui dis, elle répond, encore dans sa langue des autres, toujours, pour ça il faudra se revoir, nous échangeons nos numéros de téléphone que nous n’utiliserons pas, ni elle, ni moi. En bas, sous le pont de la péniche, un collègue de S., me dit d’elle c’est une chic fille, ou quelque chose de ressemblant, leur langue, encore, elle. Je lui demande tu me paies une bière tu sais ce que c’est la vie d’étudiant. Lui, travaille à Air France, comme S., il me répond non, je n’ai pas été étudiant. Cette bière, je ne la désire pas vraiment, comme je ne désirais pas S., j’expérimentais, par cette demande, la capacité à obtenir, par le sourire. Pas plus.
J. se moque de moi, en me lisant, dit, tu ne parles que de Marie-Anaïs dans des textes larmoyants ou de sexe. Curieux qu’elle voit, dans ces rapports sensuels ou amoureux, du sexe ou, le faisant commencer très tôt, dès la tension ressentie, même solitaire, étend le sexe, à toute mention du désir. Sacrée J. 

(texte débuté il y a trois mois)

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30 juin 2023

Le ?

Douloureux, ces textes, gardés sur l’ordinateur, retenus, parfois, au dernier moment, considéré, soi-même, du dehors, pourtant, comme la crapule sans pitié, retenant, retenant disant retenant accusé de dire retenant de menacer quand dire là encore c’est ne pas faire et maintenant même dire ne pas dire des mots là présents, ces dizaines d’onglets sans-titre lorsque j’ouvre Pages. J’enrage de devoir tenir et tenir pourtant sous des huées, dégueuler, faudrait-il ? La rage, passe, je la polis, je me divertis.
Ces derniers jours, sinon ces problèmes d’argent à cause de je ne sais quelle horreur, me dénonçant, en vain, puisqu’aucune illégalité, suspendant, toutefois, l’arrivée d’argent sur le compte. D’où ce billet, d’où la rage, dans la sécheresse soudaine, ce dimanche de canicule étendu jusqu’au RIB. Le calme, tout de même, quelques mots échangés, de purs échanges administratifs, avec Marie-Anaïs, avoir de ses nouvelles, savoir que l’amour lui vînt, deux semaines durant, me réjouit. J’ignore, encore, si, écrivant, ici, je peux dire davantage. Avec K., au nouveau café grec de la rue des Martyrs, nous discutions de ce pouvoir dire, qui, chez moi, entretient un lien avec mon impudeur, déplacé, étendu aux autres, dans impudeur, entre le concept de scandale, comme dans pudeur, celui d’une prude réserve. La vie bien vécue, socialement la plus juste, se situe entre les deux. Probablement. Je me soumets toujours aux avis de Marie-Anaïs, je dis soumets parce qu’ils n’emportent jamais mon entière conviction, qu’ils relèvent de la croyance, comme dans la religion nous suspendons, croyant une vertu nous échappant, les voies du seigneur sont impénétrables. Dans ce cas, je choisis, à quoi je me rends, ce terme, emprunté au langage militaire, dit bien ceci, une forme de renoncement. Marie-Anaïs me disait c’est mieux de pas être un connard. Disons que ma situation actuelle indique que, probablement, connard véritable, sans retenue, cruauté toute entière, je serais bien plus heureux. Or, je ne le peux ni ne le veux, je m’épate moi-même, conversant avec n’importe quels tiers, de ne faire varier en rien mes opinions féministes, par exemple, et, exposant ma situation, je ne reviens sur rien. Si j’y apporte une mesure, elle provient de la raison, à laquelle Marie-Anaïs adhérerait tout autant. Marine exemplifie moins une dérive, ce serait grotesque, qu’une idéologie. Je le déplore sans considérer ceci tellement important dans la gestion collective des rapports de domination actuelle. 

Ne pas insulter François B., lui envoyant mes déjections, se situant au niveau N+1 de son art, pour contenter Marie-Anaïs m’embête encore aujourd’hui. Si au niveau moral et individuel, sûrement, elle a raison, au niveau personnel, de mon déploiement intérieur, elle a tort, or, ce je compte, compte, en la circonstance parce que ce n’est pas si grave. 

Cette question de la morale par le truchement d’un tiers peut déranger, qui maître nous orientant mal, engendre un monstre soi-même. Nous demeurons responsables, quand perdus ignorants, de notre loi. Maître, je m’amuse de ce mot qui ne se mobilise sans éclat de rire.
Je me sens, aujourd’hui, particulièrement bien, le désir, ce guide de toute ma vie, me revient, comme une vague violente, le baiser, un autre, celui-ci, dans le salon avec P., qui mannequin gracieuse, bouge dans le salon, comme un spectre défilant, prenant, dans la tendresse, des poses réelles, de statue profonde, le baiser avec K., quand notre désir brûlait, mutuel, sobre cette fois, de chaque côté de la table, la mousse de l’es(x?)presso passant, révélant le noir liquoreux, l’arbre factice, olivier forcément, d’où pendent les bouteilles blanches et jolies, de l’huile Kalios du nom de la boutique, nos corps gênés par les poteaux. Le ventre, mon ventre, qui brûle, ces retrouvailles avec la flamme, l’amnésique homme préhistorique, qui perdant, le souvenir du feu, de la fabrique du feu, trouve, loin de ses mains, hors de lui, la foudre répétant tapant autour de lui, embrasant. Puis, le départ, je ne peux aller ce soir à la signature du livre de O., sa directrice de thèse, nous marchons ensemble jusqu’à la station de métro Notre-Dame de Lorette, K. doit s’arrêter à Saint-Sulpice. Mon corps dénoué, ce corps, si souvent maladroit, que je sens en ce moment, souple et précis, qui dans le prolongement du désir, sait à nouveau s’animer, l’au revoir d’une bise, glissante ou gisante, dans le cou, après son début, la joue, avant l’oreille, où ça frémit, entre le frisson et l’amour, puis le contact des lèvres, le rouge, troublant son teint, moi jeune homme passé je ne suis plus comme à son premier rendez-vous, qui y ressemble. La douceur de la bouche qui abrite la langue, l’incertaine prochaine fois.  

26 juin 2023

découvert

Je vais mieux, malgré le périple administratif où je me trouve, la question du logement pèse, en chacun de nous, par quoi la société, toujours nous tient. Il faut se faire aux changements, dit-on, je peux garder l’appartement, calculs effectués, mais à quel coût social. Vivre avec un inconnu, de temps à autre, pour la première fois dans cet appartement que je n’ai jamais occupé qu’avec des personnes que j’aime.
Je dois garder cet appartement parce qu’au vu de ma situation administrative, de mon absence de revenus actuelle, je ne pourrai, en région parisienne, rien trouver. Revenir chez les parents, à mon âge, me tuerait. Le monde y est doux mais d’y passer quelques jours, parfois, me tue, me ramollit, m’expulse, aussi, de toute sensualité de toutes possibilités d’ivresses maisons, de fêtes, de retours baroques.
Alors, je dois tenir, inventer ici, parce qu’il n’existe pas d’ailleurs, pas d’autres villes sauf, peut-être, Marseille où je connais des gens, assez de gens pour me refaire une existence sociale. Là-bas, même, se loger devient difficile sans dossier solide, or mon dossier ne présente aucune solidité, il est l’avant dernier grade de la fragilité. Si j’ai pu emménager ici, c’est grâce à C., qui se portait garant, parce qu’à l’époque, Mehdi et moi possédions une carte d'étudiant, la loi ELAN, qui visait à limiter le pouvoir des bailleurs sur les locataires, interdisant l’exigence de garants pour le locataire en CDI/fonctionnaire, entraîna cet effet pervers que, les bailleurs, préfèrent que leurs locataires, pour de petites surfaces (studio/deux pièces) disposent de garants - soient donc étudiants - plutôt que de salaires.
Mickael en fit les frais, cherchant à se loger à Paris, malgré son statut de fonctionnaire et le « 3x le montant du loyer » ne trouva jamais rien et dût s’exiler à Saint-Denis.
Aujourd’hui, non étudiant, je ne peux donc me réclamer d’aucun garant et, en conséquence, ne trouver nulle part, aucun logement. Sauf à envisager un trou à rats dont personne ne voudrait parce qu’insalubre autant que trop cher. 

Je ne vivais pas au-dessus de mes moyens comme certains, courageusement, y parviennent. Le découvert du père de X. is over 9000.
Simplement, je fais les frais de mauvais calculs, de retards, de rattrapages, nulle incurie de ma part, une cruauté à rebours. Inattendue et, comme tout ce qui me survient aujourd’hui, à contre-temps. Nous n'échappons pas aux serres des vautours institutionnels, même quand nous ne trichions pas ou que nous ne pouvons assumer, aujourd'hui, sans drame, les conséquences de notre maladresse ou, même, ici, de notre incompréhension.
Je pourrais dire que, oui, et c’est vrai, nous avons profité de la vie avec MarieA, c'est vrai, que Mickaël, quand il apprenait notre rupture, me disait, parce que ça lui importait (que désormais, pour une raison…administrative) ça compte, mais c’est toi qui payais tout. Nous faisions, chacun en fonction de nos moyens et, moi, à ces moyens j’ajoutai, depuis des années, la ruse.
En cette matière, nous fîmes de notre mieux, à la limite, dans un plaisir partagé. Rôdait, en secret, muette et stricte, l’administration. 

Je vais tenir le coup. Puisque, désormais, je décide de ne pas mourir. Pour quoi faire ? Je l’ignore encore, j’ignore même si je trouverai, jamais, quoi que ce soit.  

26 juin 2023

Matière

L’appartement sent le propre, les vitres laissent passer un soleil sans tâches. Je déteste laver les vitres, pourtant, je m’y mets. Pour passer le temps, pour changer ce que je vois, sans bouger. Le monde, ainsi éclairé, donne un autre plaisir. Je déplace les objets puis les réinstalle dans leur position originelle. Pas parce qu’elle vaut mieux, les deux se valent, pour transformer deux fois.
En ce moment, pas la force de m’occuper, toujours, des tâches administratives, je reste muet face aux transformations qui m’accablent ici, les relances d’EDF, l’obsédante question du loyer, le contrôle inattendu comme celui, il y a sept ans, face auquel je me sortais de justesse, à l’inverse de Victor, qui connût, alors, les foudres imparables et sourdes des administrations.

Il faudra gérer, après, encore, la répartition des objets, à ce sujet, je ne crains pas vraiment les disputes avec Marie-Anaïs, certaines choses, forcément, feront débat, un débat sans importance. Je redoute bien davantage sa mère, qui voudra, forcément s’en mêler, établir des calculs objectifs, servant essentiellement son intérêt, sans concevoir ce que ça veut dire, cette division, que le sens ne relève pas uniquement de je ne sais quel titre de propriété, que les choses, comme la vie, s’enracinent et s’entremêlent et dépassent les quotités de son (pauvre) imaginaire. Je n’aime pas l’idée de l’arrachement des choses, sans inquiétude ni même angoisse, parce que Marie-Anaïs et moi nous connaissons parce que, il y a cette vérité vraie, toujours cruelle pour moi, matériellement elle se rétablira plus facilement que moi, sa mère, au-delà (ou en raison) de sa conception clanique des rapports humains, lui offrira, un temps, les secours nécessaires. Plusieurs dizaines de milliers d’euros attendent Marie-Anaïs pour, si elle veut acheter ou ouvrir une librairie, ce peut être un viatique. Marie-Anaïs n’est pas mesquine (et je ne doute pas que Myriam non plus) elle connait mon état et agira en conséquences comme, lorsqu’elle vînt par surprise (je cauchemarde encore de ceci, elle le comprend, entrer par surprise chez quelqu’un est pire que claquer la porte, confère de l’insécurité à chez soi, moi, qui, depuis enfant redoute la nuit  et les voleurs) tout en le regrettant sachant que je le vivrai mal.  

Je ne connais pas cette chance des secours parentaux ou au prix de leur sang, je la connais moins encore, maintenant que, prostré, tout travail devient impossible. Je ne réponds pas au dernier mail reçu qui me propose dix jours de travail. Hébété la date limite s’approche, passera, sans que je ne puisse agir. Mon énergie je la dispense, une fois par semaine, à sortir et danser, lorsque je le peux. Pour boire, aussi. L’alcool solitaire, heureusement, me quitte. L’appartement est propre, je ne parviens presque jamais à cuisiner, j’ai pris six kilos moi que le gras répugne tant. Héritage de ce mois de novembre paralytique quand commençait le traitement anti-dépresseur. 


Délitement froid, l’anti-dépresseur me sauve, chaque jour, la vie, il éloigne de moi le désespoir, sa brutalité soudaine qui, auparavant, me jetait la tête contre les murs.

 

Je dois reprendre le sport sans changer réellement mon régime alimentaire. Je déteste les privations. En ce moment, je me contente d’un repas par jour sans mincir pour autant. Par souci d’économies. C., paie nos sorties ou M.

23 juin 2023

fait lin.

Le désir s’absente ou, plutôt, emprunte la porte dérobée. Son aspect d’imagination, de prescience m’échappe, désormais, une action concrète, palpable, devient seule capable d’en produire le mouvement. Si je caresse les seins, l’excitation, animale presque en ceci, monte, si j’embrasse avec la langue, mais il faut que la langue soit chaude, le désir, encore naît. L’alcool rend parfois la langue des filles tièdes ce qui, par une sorte d’angoisse automnale, fige mon envie. L’érotisme disparait. Hier, parlant du désir avec V. qui, lui aussi, en découvre la distanciation, il s’amusait de ce qu’il nommait mes dissonances cognitives (je le reprenais sur la prononciation de cognitif qui se prononce coguenitif et non, comme la plupart de gens le croient, coniitif) parce que, ne pouvant m’empêcher de séduire et de frôler, je ne souhaite pas m’aventurer au-delà de ce bord des lèvres, sans crainte aucune non même celle de bander. Les frôlements, comme je l’’expliquais, le contact des seins ou des fesses, m’excite. V. s’en amuse, aussi, parce que chaque fois, avant justement, ce qu’on nomme fatidique, je lui propose de rencontrer ces filles afin, que lui, m’en détourne, justement, ce qu’il se refuse à faire non parce qu’il ne ramasserait les restes par orgueil masculin, simplement parce que ces filles, déjà éprise, ne, pense-t-il, ne lui jetterait qu’un regard amical. Il se trompe, évidemment, sa beauté éclipsera d’évidence le souvenir éthéré du poète des fausses aventures. Fausses aventures parce qu’il me faut, tout le monde l’ignore, le pressent parfois, beaucoup d’élan avant de me jeter contre la bouche. La première nuit que je passais avec M., il y a des années maintenant, qui venait de Bordeaux et trompait son époux pour la première fois, je lui demandai en avance de, une fois dans la chambre, me sucer ; exigence moins née de l’envie de pouvoir et de soumettre que de la certitude, alors, de ne pouvoir, moi, rien oser face à son existence concrète. Je divertissais de mes peurs. Celles-ci, tenaces, l’alcool longtemps, les drogues plus encore, l’extrayèrent de moi.
Au final, je n’ose que peu, je crains tout changement tout en provoquant, à l’infini, les bouleversements les plus totaux.
Le manque d’audace paralyse le désir, l’empêche même de naître, E., jadis, la très jolie russe, venue de Saint-Petersbourg, je l’embrassai en me causant à moi moi-même une grande et terrible violence, je me souviendrai toujours, la même chose avec J. de Garches, ses yeux clos, les muscles frémissants, la joie curieuse. D’elle je me souviens, souvent, du dos musclé, des bras fins, la bague en topaze, sa manière presque sans accent, de dire Maman et Sciences Po. 

Je le sais, de sources sûres et variées, je suis un bon amant. Ce que me disait, quand je l’embrassais dans le cou, M., sur le canapé dans le salon, parce que je parcourais son cou de baisers joueurs. Le matin, après la nuit sans sexe, parce que, moi, fatigué, le désir courbaturé et le moindre obstacle - ici son embarras à cause de son sang et de ce que mâtines sonnaient - me détourne de baiser. Je n’écris pas, ici, sexe, parce que Marty, notre idole à J. et moi, emploie ce mot, toujours, pour parler des organes génitaux ce qui nous paraît, plus que ridicule, répugnant. Marty, écrit aussi, mon coeur se gonfle comme mon sexe. 

Embrasser M. le matin ne me causait aucune peur, le premier, lui par contre, assis tous deux sur le tapis neuf, m’effrayait un peu, je jouai, couard, le bravache ; ne manquant pas de courage je me mêlais à sa bouche, finalement, je commandais dans le lit à son corps de se dénuder, puis nous dormirent, blottis, tendres. Au matin, je ne sais quelle aisance me saisissait, ou, bien si, cette assurance étrange la mienne de quand je me crois sans danger, de circuler dans le monde avec grâce. Ce moment, précis, exact, où l’on tombe si souvent amoureuse de moi. 

Je ne baise pas toujours bien, parfois les sexualités ne permettent pas de rencontre. V. et son accent aiment la violence, elle griffe, mord, je n’aime pas les blessures ni mêmes celles de l’amour. Trop vieux pour ces fauveries. 

Mon désir s’il apparaît parfois ressort d’une excitation presqu’intellectuelle, d’un penchant vers la beauté, vers la femme, dont, nombre des individus en constituent les nobles représentantes. Rien ne me rend plus heureux que la proximité des filles, que la sensualité des filles, que la salive des filles, du baiser timide, à la lèvre brillante à peine du dernier bisou à J. qui sur la plage me demande de lui cracher dans la bouche. J’aime, aussi, avec passion, l’odeur de la baise, cette odeur âcre un peu, difficile à décrire, née, surtout, des moments de plaisir intense. J’ai connu des femmes, parfois, qui ne dégageaient pas cette odeur, desquelles je ne sentais que la transpiration amère, cette fille, je ne sais son prénom, Irlandaise, demeure en ma mémoire, tout, avec elle, revenait à du faux, lorsque je m’apprêtais à la lécher (je me demande comment elle le devina, elle court-circuita une pensée) elle murmura i don’t like to be licked. Alors je m’abstins, le sexe était nul, pour nous deux, nous avions utilisé une capote, je m’étais forcé à jouir, nous accomplissions ensemble une performance qui ne regardait aucun de nous deux. Jean-Maxime, dans un éclair génial (Mickaël disait je ne pense que par fulgurances) annonçait nous ne baisons que des contextes. Cette phrase me porte.
Les filles, souvent, n’aiment pas qu’on les lèche (gramahuche disait Baudelaire) la première fois, à cause de ce que leur sexe, dans leur imagine sent parce que, souvent, ceci leur a été signalé ou, même, que ça aurait pu leur être signalé, ce pèse ; I. (ici, Je m’amuse, avec l’jnitiale) s’excite en léchant et respirant sa cyprine (je déteste ce mot, je déteste aussi « mouille »). Les plus audacieuses, Karine, par exemple, j’écris sans retenue son prénom tant cette femme demeure loin de moi, par-delà toutes les périphéries, l’attend la première fois, ne l’exigera pas, y mènera peut-être. M., aussi, s’agace de ce que les garçons, si peu, le pratique. J’allais écrire mehdi etc. C’est un sujet sur lequel, plus tard, je reviendrai, parce que ce rapport aux femmes, de façon générale, m’intéresse. 

M., considère qu’un garçon sur dix, à peu près, lèche que parmi ces dix pourcents nombre d’entre eux le font mal. Je n’excelle pas en cette matière mais, plein de bonne volonté, je me laisse guider avec plaisir, il est difficile de guider bien davantage que de se faire guider, d’ailleurs. Guider, orienter, ne signifie pas obliger, forcer ou dominer, il s’agit d’indications, légères qui réclament, aussi, la connaissance de son propre désir, le trait d’union qui le lira au plaisir. 

TBC

 

 

 

 

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21 juin 2023

Dés-Insta.

Curieuse mise en scène permanente, de moi, lorsque, sur Instagram, je poste les tentatives de vie, ces minces respirations, au milieu de sombres marécages. Je ne me débats pas, à intervalles réguliers, de moins en moins fréquents cependant, une espèce d’aspiration me mène au monde puis, me rejette, plus loin, cette fois. Les choses administratives m’échappent et se délitent, je ne peux plus en régler aucune. Elles m’asservissent sans qu’aucune d’aide ne me porte le moindre secours parce que, la réclamer, encore, s’apparente à une chose administrative. Je parle et je dois, à chaque mot, me défendre, me justifier, argumenter. Force dont je suis dépourvu, alors, au lieu d’assurer cette existence pratique, je la condense, quelques instants, dans la fausseté virtuelle, quelques éclairs temporaires aussitôt dissipés, appelant, déjà, les suivant, plus coûteux. La foudre se tarit, le ciel se vide. Depuis dimanche, je ne peux plus rien poster sur IG, la fatigue même de cette fugue me domine. Parce que ma vie même en vitrine m’épuise trop. Les documents non lus s’accumulent sans que le seul important ne parvienne jamais, le bientôt qui, de plus en plus, s’associe à un ‘?’.

Mes mises en scène jouaient le double sort de rassurer et de prétendre. Le premier m’épuise, le second m’ennuie.

Les factures me débordent, leur ombre écrase, elle piétine moi, moi-même dix fois, le pilon qui broie dans le creuset cette force vaine, elles tombent, pluie acide, par surprise, les dépenses imprévues et vitales, nécessaires, les courts-circuits, l’air hébété que tout casse. D’hoquets en hoquets je survis dans ce désordre, le regard vitreux que rien n’éclaircit. La comédie, je la joue, encore un peu, jusqu’à…jusqu’à quoi ?

La colère, aussi, elle me quitte, tout s’y apparente. Pourtant, si j’admets calmement, plus calmement les choses, de grands espaces s’ouvrent parfois. Mais la vie administrative m’emporte, ressac de nuit comme de jour. La marée sans repos brise le corps fatigué.

Je relis une phrase, écrite il y a onze ans, que facebook me montre,  Est poète le tricheur aux cartes qui, couvert de plumes et de goudron, parvient á faire croire qu'il est un aigle ou un ange.

Epoque, de moi, le génie, quand la littérature, les mots, la poésie me couraient dans les veines avec aisance, sans lourdeur, aérien, puis je me suis érodé, par peur, fatigue, maladie.

 
Le désespoir, lui, refait jour. Il a pris son temps pour monter son embuscade. Les cauchemars me quittaient, ils reviennent. Chloé, à nouveau, obsédante, à cause d’autres souvenirs. Une main. Un poing. Je me demande, à nouveau, si elle ne me confond pas avec Pierre-Adrien. Parce que tout me demeure, avec elle, incompréhensible. Que la courbe des incompréhension commence par elle, continue par Margot. Après ? Après j’attends d’entendre.

Je rêve, parfois, de Marie-Anaïs chaque fois que j’en rêve, elle entre par surprise dans le lieu où je me trouve ou bien elle rejoint un évènement où je suis déjà présent et, souvent, sa famille avec. Avant, je me disais souvent, que ma vie serait parfaite à deux conditions : si la mère de Marie-Anaïs nous foutait la paix si, ensuite, je pouvais vivre mes amours libres sans contrainte. Ces deux conditions, aujourd’hui accomplies, ne le sont que celle qui les conditionnaient ne se maintienne. J’imagine que, par ailleurs, cette situation a pu rapprocher la mère et la fille parce que l’amour de la mère, pour tortueux, malade et mutilant, n’en demeure pas moins total, ce qui écrase souvent, ici, peut se faire plus léger. Par le drame, sûrement, aux yeux de la mère, un instant au moins, Marie-Anaïs devient plus autonome, plus indépendante, tout paradoxalement, qu’au moment où, elle réclame le plus d’attention. 


Ce que je me dis, aussi, après le tragique soubresaut, que, pour elle, au final, c’est mieux, je veux dire que cette violence, même, permet de justifier sa relation nouvelle, malgré tout ce qu’elle portait d’obstacles sociaux évidents, qu’elle rend, pour un temps, impossible toute critique, l’important étant, pour sa famille, qu’elle aille bien, qu’elle se repose. Cette crise court-circuite toute protestation, toute inquiétude, ou, disons, nous sommes, elle et moi, dernière curieuse union, le coeur interprétatif des événements ; elle pour l’inquiétude suscitée par qui l’aime moi comme le responsable du drame.
Deux points qui par leur radicalité émotionnelle excluent tout autre terme, tout autre commentaire du moins, des tiers termes. Je me demande si Marie-Anaïs s’aperçoit de ceci. Probablement que oui, malgré l’immense fatigue qui la saisît. 

18 juin 2023

Point, à la ligne .

Récemment, A. fêtait son anniversaire et je m’abstins de lui souhaiter, parce que, pour espérer que des liens brisés se ressoudent, il faut attendre. Nos liens, brisés, par un en dehors de notre relation, par un récit et des impressions qui lui vinrent de l’extérieur. Rien de moi à elle, au contraire presque. La douleur, la douleur vraiment immense quand, peu après le suicide, elle se proposait, dans une attention qui me toucha, de me consoler. Alors, je ne compris pas, le brusque changement, le gel autour de moi né du rejet soudain, brutal, qui, sans explication portait tous les possibles, trop des possibles. Ne pas lui souhaiter son anniversaire, voyant ses stories sur instagram, sa joie manifeste, me blessait, que les personnes décevantes s’éloignent, voilà bien peu de colère, que d’autres, à l’attachement sincère, s’éloignent, que leur vie nous apparaisse sans que l’on puisse dire un mot, abîme et nie. Je me suis tu. Pourtant. Parfois, je ne peux m’empêcher, vieille habitude ou tentative, de liker ses stories, dire un petit j’existe.

Attendre, me conseillait L., attendre pour…prouver que je ne me confondais pas avec le récit fait de moi qui effara tant A. Attendre, donc. A raison, probablement, parce que les êtres humains fonctionnent ainsi mais qui sent la terrible injustice et la proximité constante de la mort, j’allais écrire la mort, j’ai écrit la mort, non alors de la finitude plutôt, du non-futur, ne peut supporter cette abstention. Attendre, oui, comme espoir, donc bientôt, donc futur, donc temps, toutes ces choses par moi ignorées, inconnues, douloureuses.

Cependant, récemment, je lui écrivis un long message, important pour moi, pour faire le point, à ses yeux, sur moi que, plus tard, si plus tard peut exister, ce message en forge le premier mouvement, le dépôt qui, germera ou gèlera.

J’ignore comment elle le prît. Mon affection pour A., que rien n’éprouve, ressemble à peu d’amitiés par moi ressenties.
Elle ne dépend pas d’une longue histoire, c’est à dire d’une habitude et du devoir de fidélité que l’on se croit envers ses vieilles connaissances, elle ne relève pas non plus d’une répétition fréquente et intense d’aventures et de bombances communes.

Si elle ne trouve son origine et sa force ni dans l’espace ni dans le temps alors à quoi tient-elle cette affection ? Je dis, douloureusement, affection ici, retenant le mot amitié, parce que, ce dernier, implique une réciprocité pour le moment, au moins suspendue, au pire disparue. Elle tient, probablement, à un moment particulier de mon être, de mes changements intérieurs dont, malgré elle, elle pût être le témoin en même temps que l’amitié naissait. Je l’adore, sincèrement, sans rancoeur dans ce rejet que je comprends, que j’admets, qui blesse malgré l’accord de la tête. Avec elle, tout ce que je portais de sordide en moi, près d’elle, du moins n’existait pas, si elle me vit bouillonnant parfois ironique et non sans cruauté (ah, le club des poètes), elle ne me vît pas sordide, elle me connut débarrassé de l’horreur, cette fripe pourrie, galeuse.
Perdre A., étrange pour qui ne vit pas en moi, appartient au pire, me retourne moi contre moi. Quand elle m’écrivit de durs messages je restais sidéré, je me souviens, je marchais (arpentais ?) sur le boulevard de Rochechouart, je ne sais plus ce que j’y faisais, si je sortais du Louxor ou de chez Valentin ou, plus simplement, d’une balade. Je me souviens que le soir tombait, je me souviens, aussi, que je voyais sur le chemin, les petites affichettes apparaissant régulièrement d’un écrivain cherchant sous pente une petite chambre qu’il réglerait en cash.

Je pense souvent à A.

Ca m’a fait mal, quand elle n’a plus voulu me parler parce que, je croyais, envers elle, avec elle, toujours je me montrai très exemplaire. Sans affectation.
J’aime, chez A., la façon d’avoir envie ou, parfois, de s’indigner avec exagération, comme ce soir où elle tombait presque déjà amoureuse de L., en entendant le mot sous-continent indien, croyant, à cause de l’ivresse, que le préfixe sous établissait une hiérarchie ethnique et non une position géographique. J’aime, qu’elle aime s’amuser que, bien sûr, en elle le règne poétique ne s’achèvera jamais. J’aime, en elle, le sens naturel de la fête, une pente que le travail n’a pas entamé. Nous ne manquons pas de différends, quelques uns profonds, nous ne manquons surtout pas d’un espace commun, d’une façon assez semblable d’aimer. Je termine avec difficulté ce texte commencé il y a plusieurs semaines, je le veux exact, il se gâche. La dernière fois que je l’ai vue, c’était après sa rupture, elle m’a dit, je risque de pleurer, on parlait de polyamour, des formes divergentes prises par lui, du conflit qu’il implique. J’avais trouvé, par hasard, son profil OkCupid, il y a toujours une étrangeté à croiser nos amies sur ces plateformes, observer leur mise en scène, je me souviens, j’avais souri, quand, dans ce qu’elle cherche, elle énoncait, du sexe.


Et puis elle m’avait promis un resto. Et ça, je boude quand même. Elle me disait, qu’elle gagnait trois mille euros et plus, alors j’étais content pour elle. Et pour moi, ahah. J’allais, avec ma situation difficile, peut-être lui demander des sous. Pour, m’amuser peut-être, pour survivre plus certainement, pour alléger le véritable sacrifice de Marie-Anaïs, en ce moment.

Je souffre, dans l’écriture de ce texte, parce que ça remonte, ce que je ressens pour elle. Que, ma folie, ma folie d’un mois, un mois, je trouve, après ce que je subissais, franchement, ce n’était pas tant, ça demeurait dans le permis, dans l’excusable, même dans l’affection maintenue et l’attention. Imaginez, maintenant, une seconde recevoir des discours mélangés, changeant sans cesse, pour, à la fin des fins, en recevoir la version la plus atténuée possible. Mon frère, après avoir lu, le contenu de la réalité des reproches ne ressentit aucun soulagement, il entendait encore la menace, la condamnation, sans saisir, que, non, parce que ce que l’autre dit, ça en est la version la pire, celle à partir de quoi le débat se noue, si, si faible alors, moi mon récit, mes preuves, viennent en contrepoint. J’ai mal, A. me manque, ma folie me brisa, brisa des liens précieux, le sien, le nôtre, sa singularité, étoile polaire désormais moi me gelant. Oui, j’ai mal, quand C. m’invitait, pour mon anniversaire, à privé de dessert, je pensais à A., que peut-être nous aurions du y aller ensemble, que privé de dessert, punition des adultes aux enfants rebelles, que, oui, ça dit un peu.

13 juin 2023

Tu seras viril

L’étrange action, tardive en mon cas, de la setraline abstrait le désir sexuel dont la consistance, alors, tient davantage du souvenir ou du rêve, que de la pulsion amoureuse ou reproductive.

Le corps, lui, fonctionne comme de normal, il réagit aux stimulations habituelles, bander ne me pose aucun problème, éjaculer, par contre s’interdit, c’est à dire accomplir et achever ; entrer dans le destin reproducteur et le plaisir à l’acmé.

M. s’étonne que je m’indiffère autant de la sexualité, résumant celle-ci au rapport pénétrant/pénétré, comprenant mal que ce ne fut pas toujours le cas, je peux, désormais jouer, torero, avec mon désir et celui de l’autre, le surprendre par sa suspension. Avec M-C, nous jouions, souvent, à ce désir suspendu, balançant, retardant le moment de la pénétration, s’approchant au bord, jouant avec la limite du désir pour augmenter, après, celle du plaisir.

ici je supprime un passage que je déploierai dans un autre texte, ici, j’écris aussi qu’une pulsion de mort monte en moi, la même jadis de ce fameux post-coïtum animal triste, cette sensation d’une main osseuse serrant mon coeur.


M., je me sens étrangement bien avec elle, nous ne couchons pas ensemble, parce que je ne le souhaite pas, ce dont elle se vexe, pour la consoler, je glisse sa main contre mon sexe, l’assurant, ainsi, de l’absence de faute de sa désirabilité. Je me sens bien, étrangement, nous dormons ensemble, déshabillés, tendres assez, quelques baisers s’échangent. Le premier, c’était dans le salon, vers 4 heures du matin, elle soupira un enfin, un qu’est ce que tu attendais, qui, aussi, rappelait l’ordre usuel de la séduction, l’homme, quoi que même si son désir tarde à devenir certain, doit oser. Je ne sais plus si, c’était par jeu encore, je lui demandai si je pouvais moi l’embrasser.

Avec W., notre premier baiser, nous sortions d’un café, W., m’intimidait un peu mais trop forfantin, je n’en laissais rien paraître. Un moment, dans l’après-midi, elle me demanda pourquoi tu ne m’embrasses pas, puis nous nous embrassâmes. Paradoxalement, j’excelle dans les commencements, pas dans la prise d’initiatives. Je m’y force. Cette nuit, nous ne l’avions pas passé ensemble, j’avais dormi dans l’auberge de jeunesse Jacques Brel, de Bruxelles, la première et dernière fois. Dans la rue qui m’y menait, je voyais le symbole kabyle inscrit sur les murs. La seconde fois, nous en prîmes par la suite l’habitude montant en gamme, je réservai un hôtel 3*, l’hôtel Aristote, à proximité de la balle que Verlaine tirait sur Rimbaud. W., sortit une bouteille de vin - nous ne buvions presque jamais ensemble - et un préservatif féminin que nous essayâmes par curiosité, comme une expérience artistique que nous délaissâmes bien vite, préférant exercer nos talents manuels à des pratiques plus satisfaisantes. 

 

Le matin, ceci toujours me ravit, quand je l’embrassais dans le cou, sur le canapé, face aux livres, la lumière du soleil entrant par la fenêtre avant que les immeubles d’en face ne le brise - le salon, exposé Sud, brûle quelques heures par jour, les toits de tôle lisses et grises de Paris en augmentent la chaleur, puis le soleil passe sous l’immeuble voisin, il ne reste que la cendre.

 

Si je repense à mon désir sexuel, à la façon dont je dus le positionner face aux autres, me reviennent à la mémoire quelques épisodes. En quatrième, Arnaud abandonnait de son agenda des photos découpés de pin-up et proposait, à qui voulait, de les prendre. Je me portai volontaire parce que, ce faisant, j’actualisais ma masculinité, si mes pratiques correspondaient à celles des autres garçons, alors, j’appartenais au groupe. Cette pratique, transgressive au sens des règlements intérieurs et familiaux, permettait, ici, de respecter une appartenance plus forte et plus nécessaire. Je collai ces photos dans mon agenda, mes parents le découvrirent. Je ne me souviens plus si je dus les arracher, forcément, par contre, ils en tirèrent des conclusions erronées, ignorant, forcément, mon désintérêt pour ces images, l’impossibilité, pour moi, à cause de ce que la circoncision me mutilait jadis, de me masturber et de faire, de ces images, un usage autre que celui de conformité sociale. Par ces images je me signalais auprès des autres, me rassurais, moi-même, de ne pas être découvert, moins mutilé, parce que ceci s’avère trop complexe à découvrir, que moins, que pas assez. Je pouvais jouir, certes oui, du rôle exécuté à la perfection, me cachant à moi-même. Jouir, au final, seul, reproduisant, ailleurs, cette masturbation, d’un plaisir déjà adultère.

Oh, bien entendu, les autres garçons, ces collégiens, eux autant, par ces images, la provocation associée, jouaient aussi, en partie un rôle, dans le verbe haut et la verge droite, eux aussi se signalaient aux autres comme de bons hétérosexuels désirants et puissants. En dernier terme, après et en même temps que cette preuve apportée, moins les quelques dissimulés comme moi, ces garçons se masturbaient en effet sur ces images. Chose plus amusante, Arnaud et Gregory parlaient de leurs visionnages pornographiques et de leur absence successive aux toilettes. Je n’avais pas compris, jusqu’il y a peu, le motif de cette absence.

Deux ans plus tard, j’agissais enocre ainsi et doublement, d’ailleurs. Je possédais, enfin, mon premier téléphone portable. Un NEC, le premier téléphone, en France, en couleurs. Je prouvais, par cette possession, ma supériorité matérielle, il devenait signe de ma richesse prétendue, un mensonge, pour garder sa crédibilité, doit, régulièrement s’actualiser avec d’indiscutables preuves. Ces preuves, même modestes (et mieux encore de ne pas l’être), par effet d’attraction entraînent tous les récits vers le vrai, l’indiscutable, l’indubitable.

Je me souviens, aussi, d’un jour, assis à côté de ce garçon, Nicolas, être bizarre, sale, fumant du shit et, surtout en vendant, dénoncé, un jour par l’un de ces acheteurs dans l’enceinte de l’école. Je disais à Nicolas que mes parents me versaient, tous les mois cinq-cents euros d’argent de poche mensuels. Il répondit, incrédule, impossible et, alors, levait puis baissait la main, reproduisant, longtemps le geste, pour interroger la prof de mathématiques à ce sujet, réclamant cette censure adulte pour trancher notre débat. Je paniquai, je m’apprêtais à être découvert et si l’un des mensonges devait être trahi alors le reste pourrait, soudain, subir le doute. Mes mensonges, au sujet des phynances, tellement improbables, mais assénés avec certitude, ne tiendraient pas face à un doute méthodique, la moindre enquête m’aurait découvert. Alors je tremblai devant ce geste improbable, Nicolas hésitait, sûrement, devant l’incongruité du geste, sa place discutable dans un cours.
A ce moment Damien intevînt pour dire, à peu près, que s’il ne s’agissait pas d’argent de poche mais d’un compte d’épargne, alors, oui ça se tenait. Damien m’offrait une porte de sortie que j’empruntai en toute hâte, oui, voilà, c’était ça, exactement. Cette sortie ne correspondait pas, pourtant, à mon récit initial puisque je parlais d’argent de poche. Qu’importe, l’essentiel était sauvé, la focale déplacée, le mensonge, donc l’identité, préservée.

D’autres mensonges, plus absurdes, l’année suivante, je les commis sans émouvoir aucun soupçon, je prétendais, hackeur de génie, riche à l’infini, m’adonner les week-ends, à des combats de piratages informatiques dont le but consistait à abattre l’ordinateur adverse. Ordinateurs que je prétendais valoir des fortunes. Martin écoutait religieusement mes succès fantasmés, rêvant, lui, à seulement posséder une de ces machines entrée en fusion à cause d’un combat perdu contre un pirate habile d’Allemagne ou de Chine.

Avec mon téléphone NEC, je disposais aussi des premiers forfaits internets mobiles « utiles »,  à l’époque, pas de 3G, de 4G, ni de vaccin, seulement le E, de EDGE, internet mobile de faible débit. J’y pense, parce que, revenant de Marseille en train, passant par les campagnes mal connectées, le E majuscule s’affiche en haut de l’iPhone. Sur le téléphone NEc, en 256 couleurs, je téléchargeais des images floues de Pin-Ups, femmes en sous-vêtements, jamais nues entièrement, d’ailleurs. Lorsque mes camarades voulaient manipuler le téléphone, je faisais en sorte de laisser visibles ces images. Dans ce collège de garçon, ce faisant, je ne devenais pas un répugnant obsédé sexuel, je devenais un homme, comme tous les autres. Ils m’empruntaient, régulièrement mon téléphone, se signalant, eux aussi, autant que moi je me signalais. Nous nous prouvions mutuellement notre masculinité.

En quatrième, je me souviens d’Alexis, qui, parce que nous parlions de masturbation - lui ignorant que moi je ne le pouvais pas et moi ignorant ce en quoi ça consistait - me demandait par je ne sais quels détours, si j’étais précoce. Assimilant, alors, le terme à celui de l’intelligence, c’est à dire d’une qualité, je fanfaronnais de, oui, l’être. Lui non, plus, en réalité, inexpérimenté sexuellement, ne mesurait pas la portée du mot. Alexis, aussi, en cinquième, m’apprit, le mot cunnilingus, que, confusion banale, je pensais référer au nuage. Nous étions trois ou quatre ce jour là, dans la partie boisée et terreuse de la cour de récréation, derrière les algecos à cause de ce qu’une partie du collège était en travaux. Les autres élèves assistaient au cours de latin auquel Alexis, Maureen et je ne sais plus qui d’autre, ne participaient pas. 

 

pour me rendre au collège je devais prendre le bus 241 qui passait par le bois de Boulogne aux heures matudinales durant lesquelles les prostituées exercent encore, le bois de Boulogne compte, essentiellement, des prostituées trans, nous les voyions, hiver comme été, les jupes courtes le visage fardé arpenter les trottoirs, parfois nous les retrouvions à proximité du collège, le pénis énorme de l’une d’elles, débordait de sa mini-jupe, Laure, l’appelait un m’sieur-dame et le saluait de la sorte, pendant des années. Maureen, très grande avant l’âge, virile presque, un jour de banale dispute entre filles et garçons, m’agaçait tellement que je lui envoyai à la figure « t’as du volume entre les jambes », phrase entendue, probablement dans la bouche de Jean-François, obsédé sexuel dès ses 10 ans, ce à quoi, elle rétorqua, habile, « toi t’en as pas ».  

7 juin 2023

Saint-Georges et la grève du Dragon

Je considère, depuis mon emménagement dans le IXè, avoir trouvé, dans le monde, ma place, que cette géographie, dans un appartement que j’adore correspond à mes désirs les plus chers. Le quitter me déchirerait le coeur, tout changement s’y déroulant m’y altère. La fromagerie Chataîgner, en bas de la rue des Martyrs, qu’Yves tient depuis (si je me fie à societe.com) le premier janvier 1958 avec son épouse Annie, a vu toutes les transformations du quartier. Je disais à Marie-Anaïs que, le jour de leur fermeture, quelque chose en moi se briserait, je déteste toutes les faims (je voulais écrire fins mais ma bizarre dyslexie prend le dessus) comme je le disais à M., quand elle et moi nous soûlames à la maison et qu’elle voulait retrouver le VIè, cette année où tout se brise, comme une chose naturelle a aussi vu la fromagerie Chataîgner fermer. Après les vacances d’été, la grille demeurait fermée, longtemps, sans un mot, puis, en début d’année, un petit mot affiché sur la devanture remerciait les clients pour leur fidélité. Ce merci comme une oraison. Dans le quartier rien ne dure longtemps, ces remerciements d’adieu nous les trouvons à toutes les portes, au bout de cinq ans. Dans ma rue, le retoucheur, encore, seul, appartient à un monde ancien, le même en sursis, dans sa boutique ancienne où on ne le règle qu’en espèces ou en chèque bancaire ; lui aussi fermera, forcément. Il en va ainsi de la vie dont, moi, je ne supporte pas le passage. A cause de ceci, et, bien sûr, du sens qu’il a, je mentais sur mon âge, je ne pouvais me résigner à l’usure. Je tentais, qu’importe par quelle ruse, d’en limiter les signes apparents. Un jour, ça ne tient plus.

La fromagerie Chataîgner, après 65 ans d’existence a présenté son grillage clos, sa petite affichette, les passants et les habitués, glissèrent des fleurs et des mercis, comme pour une cérémonie muette. Sophie, La pharmacienne de la Place Saint-Georges, où je ne me rends plus parce qu’un jour elle me parlait mal, vit aussi dans le quarteir depuis, comme elle dit, toujours, et, la fromagerie Chataîgner préexistait à son toujours. La fromagerie où Yves et Annie faisaient le compte à la main. Yves, toujours casquette sur la tête, l’air bougon, la barbe un peu folle, les tâches de vieillesse, l’énergie toujours, Annie, aimable, bien maquillée, sans cesse, profitant de l’absence du mari pour se montrer généreuse, lui, radin, facturant tout, ne faisant jamais aucun cadeau, méfiant, un peu, bougon. Avec ce charme ancien qui, chez n’importe qui, nous paraîtrait insupportable, ici, l’âge, ce dont il témoigne, aussi, l’exotise.

Michel, l’épicier juif tunisien, de Tunis, de la goulette, Tunis centre, il ajoute aussi, lui aussi travaille ici depuis toujours, cette année il fête ses 66 ans. Un an de plus que la fromagerie d’Yves. Michel travaille six jours sur sept plus de dix-huit heures, il ne fait pas son âge, mais il fatigue, forcément et, aujourd’hui, ne trouve pas de repreneur pour son fonds de commerce. Aujourd’hui, aux épiciers tunisiens succèdent des épiciers bengalis ou sri-lankais, il leur cédera probablement son commerce. Je m’arrêtai pour parler avec Michel, récemment, alors que je me rendais au métro et que je le saluais rapidement, écouteurs aux oreilles, comme d’habitude parce que, l’été, il installe sur le trottoir un tabouret de bistro et discute avec les passants. J’ai défait mes écouteurs et j’ai parlé, et il m’a dit, alors tu as changé j’ai trouvé cette phrase amusante, les phrases que, les vieux amis normalement, vous disent, ou les parents, tu as changé, comme le quartier s’altère, sûrement, celui qui me ressemble, ma vie, aussi tout autant changée. Alors nous avons parlé de sa vie de juif tunisien arrivé en France il y a longtemps, je n’avais pas remarqué ses dents, il lui manque des molaires et quand il rit je vois luire un plombage, ceux qu’on faisait il y a longtemps. Maman, qui souffre des dents, compte de fausses dents, des couronnes (les appelle-t-on ainsi pour justifier le prix royal?) qui ressemblent à des dents naturelles. Il me disait, Michel, j’aime bien parler avec toi. Alors nous avons parlé, maintenant je m’arrête plus souvent et plus longtemps. Tout le monde connait Michel (d’ailleurs, je l’apprends, tout le monde me connait aussi), plusieurs générations, de grands parents, de parents et de jeunes enfants. Michel, m’a dit tu n’achètes plus rien puis j’ai bien vu que Madame était partie puis la pauvre puis perdre un beau gosse comme toi puis et tu as retrouvé quelqu’un.

Je peux faire, depuis mon arrivée il y a 7 ans dans le quartier, un petit fil des commerçants à l’ancienne. Il y a le cordonnier portugais de la rue Henri Monnier, son échoppe poussiéreuse, sale, ses prix deux fois inférieurs à la moyenne française, le fonds de commerce à céder depuis des années, en redescendant, il y a Michel, l’épicier, au croisement de Clauzel et d’Henri Monnier, juste avant la rue Notre-Dame de Lorette, si on tourne à gauche, c’est la rue Clauzel, le retoucheur turc auquel je n’ai jamais demandé le prénom. Je sais que, récemment, son fils s’est marié. Il y a, dans la rue, le grand parking marmoréen, un salon de coiffure qui semble de toute éternité et d’autres, eux, plus modernes, où les coiffeurs pour hommes, tous homosexuels, agitent avec talent et mépris leurs ciseaux. troc en stock a fermé, plus loin, encore, dans la rue Clauzel ma rue, deux boutiques, des dépôts ventes, à l’ancienne, vendent des pièces toutes diverses, certaines de collections. La dame blonde qui la tient, Monica, fume souvent sa cigarette sur le trottoir, elle parle avec Maxime, de l’autre côté de la rue, qui après avoir ouvert une boutique de vêtements, a décidé de la remplacer par une salle de sport, un de ces trucs hyper rapides, avec des machines qui ressemblent à des caissons futuristes. Je ne sais pas quelle promesse commerciale il formule. Monica est à l’ancienne, elle parle avec une voix rauque, reçoit de beaux vêtements, qu’elle adore faire essayer à C., parce que sa silhouette, est parfaite lui dit-elle. David, lui, a ouvert, un magasin de vêtements, une sorte de friperie de luxe, rue La Bruyère, il la tient avec son compagnon et sa fille, il l’appelle la débardeuse, a eu, me dit-il, du mal à trouver un local et aurait bien aimé s’installer Rue Clauzel. Ca m’émeut, chaque fois que le nom de ma rue apparaît quelque part, quand il suscite une émotion. La boutique de David, toute récente pourtant, deux ans je crois, m’a l’air d’exister ici depuis toujours. Elle se remarque parce que sur le trottoir un mannequin paré des choses les plus excentriques et toujours changé, se tient. Un peu comme moi, prince du quartier, comme dit Michel.

Michel, quand nous sortions avec C., avant d’aller au Silencio des Près, nous a parlé, nous étions un peu ivres et il s’apprêtait à fermer, pour une bonne nuit de sommeil, je lui demandai. Il était 23h et, me dit-il, le réveil sonnera à deux heures trente, pour qu’il aille se réapprovisionner à Rungis. Encore. 

 

Il y a deux mois, je crois, j’ai vu de la lumière dans la fromagerie Chataigner, et j’ai eu peur que la tragédie s’augmente de la destruction, une boutique de cookie, de madeleine, un lunnetier ou un marchand de saumon. J’entendais, régulièrement les perceuses, puis je n’ai plus entendu aucun bruit. Il y a deux semaines, étonné, j’ai vu la fromagerie ouverte, à nouveau. Tout le monde s’y pressait, tout le monde racontait, au nouveau gérant, l’émotion de voir, le nom intact Chataigner, encore affiché. Augustin, celui qui a repris la boutique, quand je lui exprimais, en mâchant dans la tomme de chèvre laissée à libre disposition, le soulagement (la joie?) de voir, ici, une fromagerie encore et non un marchand de lunettes, sourit, il me dit qu’ils y tenaient, Annie et Yves, à ce que ça demeure une fromagerie, qu’ils vivent juste au-dessus et qu’Annie, dès qu’Yves ira mieux, viendra faire la caisse parfois. Yves a subi un double ou triple pontage, sans quoi il aurait continué, jusqu’à la fin. Pendant, le COVID, encore, quand tous les vieux se terraient, lui, continuait de se rendre à Rungis, nous n’avons jamais autant parlé qu’à cette époque, le monde, rétracté, condensé en quartier, un monde d’un kilomètre sur un kilomètre.


La vie renaît, à Chataîgner, maintenant, est accolé le mot sauvages, les fromages sauvages, Augustin prépare, pour l’entrée un chèvre frais comme une crême brûlée, un peu sucrée, à mon goût, mais très belle. La boutique se ressemble toujours, le carrelage demeure le même. Mais maintenant les fromages ne sont plus exposés à l’air libre, tous se présentent derrière une cage en verre, obstacle transparent. Un geste de plus. Je me demande pourquoi, Yves, en 1958 devînt fromager, ce qui le guida, là, à cette profession. S’hérite-t-elle ? Trouve-t-on ce qu’on trouve comme les commerçants tunisiens de Djerba, achetant les épiceries arrivant en France, parce que réputés commerçants les djerbiens reproduisent ici leur nature ?

Le primeur tunisien de la rue des martyrs, au croisement de (?), vient aussi de Djerba, ainsi que tous ses collègues, nous discutons souvent. Il vivait, il y a plusieurs années, dans le XVIIIè, puis, souhaitant une maison pour ses enfants, en acquît une dans la région d’Auxerre, le forçant à faire plus de 4 heures trente de route aller retour chaque jour. Mais les arabes paressent, dit-on. Aujourd’hui, plus âgé, il lui manque lui aussi des dents, il reeménage dans le quartier, de l’autre côté de la butte, à Marx Dormoy. Ses avocats, à 2,99euros pièces sont les meilleurs que j’ai goûtés, ils sont énormes, deux ou trois fois plus lourds que leurs imitations de piètre qualité à un euro en supermarché. Il vend aussi des herbes fraiches, de grandes et belles bottes à bien meilleur prix que celles sous plastique de la marque florette à quoi je me résignais avant.

La réapparition de Chataîgner donne à la vie la vie. La rend. Différente. Comme la mienne devient. Je l’écris sans rancoeur, aujourd’hui, je vais mieux, je rencontre des gens, mon quartier s’amplifie, je me mets à connaître chacun et chacune. Marie, la serveuse du café du Père Tanguy, qui, pendant des années minaudait auprès de moi, qui, tout récemment, me proposait un verre. Je rencontre. 

6 juin 2023

Du sens.

Lorsque j’ai voulu mourir, la première fois en 2023, que j’ai amorcé le geste avant que maman ne m’appelle, c’était, je crois en février. Marie-Anaïs se trouvait à Saint-Egrève, je crois. A ce moment là, je laissais derrière moi quelques lettres adressées à chaque personne, celles que j’estimais coupables, celles auprès de qui je devais expliquer mon geste. Cette fois-ci, je ne prévenais personne avant, je programmais un envoi, d’un petit film de moi ingérant les médicaments, à l’adresse de Marine. La vision de certaines choses, me disais-je, peut crever les yeux.
Aujourd’hui j’ai jeté les comprimés préparés pour le moment, ils demeuraient encore sur l’étagère de la bibliothèque, entre les livres, la poussière, le hand spinner bleu acheté en 2017. Aujourd’hui, j’ai jeté les cachets dans le sac poubelle de la salle de bains, puis je l’ai fermé. Le sac poubelle contient un paquet de M&M’s vide que j’avais acheté 2 euros dans un distributeur automatique, mort de faim, avant d’aller au Silencio des Près, beaucoup de cotons démaquillants, pas trop sombres, maintenant, je me maquille en smoky eyes, brouillon, comme à mon habitude, j’étale la poudre sur mon oeil en tapotant le pinceau, puis, approximativement, j’arrange le tout, deux brosses à dents toutes noires parce que, dans un accès maniaque, elles servirent à brosser les recoins sales de la cabine de douche, des mouchoirs utilisés pour le rhume des foins de C. et maintenant des comprimés non usagés, non utilisés. Le sac en plastique se zippe, je le laisse ouvert, très plein il baille. Pour l’instant, il reste dans l’appartement, pour signifier je ne sais quoi encore, son sens progressera, hors des discours faciles, au fur et à mesure que je le regarderai, le temps, ma vue y déposeront du sens. J’attends le chemin que, par là, j’emprunterai. Répétant, consciemment, les mêmes gestes, observant, consciencieusement, les objets, nous pouvons leur établir un sens, les faire agir en nous. Comme des mots. 

6 juin 2023

Shenron

La réunion des sept Dragon Balls permet l’invocation du dragon Shenron, capable d’exaucer n’importe quel souhait. La Terre se trouve souvent la cible d’indivuds voulant la détruire ou en dominer les habitants. Ce projet ne s’accomplit jamais sans pertes humaines voire, même, pertes d’un ou de plusieurs héros. Une fois les antagonistes vaincus, les personnages invoquent Shenron pour rendre la vie à ceux qui l’ont perdu. Dans l’un des chapitres, je ne me souviens pas lequel, Krilin, au moment de prononcer le souhait, demande à Shenron d’exclure de la résurrection les méchants, disant méchants il ne signifie pas, ici, les adversaires des héros et leurs séides, il vise les êtres humains « mauvais ». Je me demande, alors, quelle règle morale s’applique à ce souhait, quelle loi détermine la culpabilité de ceux péris. Shenron ne nous donne à ce sujet aucune indication, nous ignorons, alors, s’il s’agit de juger l’âme humaine, excluant par anticipation les individus susceptibles de commettre le mal ou bien s’agit-il de celles et ceux condamnés par la justice. Mais alors quelle loi appliquer ? Celle du Japon, de l’Iran, de la Somalie ? Peut-être l’exception souhaité par Krilin n’exclut, en réalité personne, Shenron s’interrogeant ainsi que moi-même se décidant à ne pouvoir trancher les méchants. Il réalise, sans que Krilin ne le sache, son souhait, il exclut les méchants de la résurrection mais comme il n’y a pas de méchants par essence..  

5 juin 2023

Guér(ie)r

J’ai pendant des années, c’est à dire des dizaines d’années, dissimulé à maman le harcèlement scolaire subi. Ces derniers jours, sous l’effet de la sertraline, je rêvais sans cesse de lui révéler. A force de vivre, en songes, avec le degré de réalité des rêves sous AD, je ne pouvais plus le cacher. Deux réalités se superposaient, en moi sans violence, sans douleur, mais m’encombraient, ne me permettaient plus de distinguer, le vrai du virtuel.
Le lui dire ne soulageait pas mon moi adolescent, il dissipait mon rêve. Ce rêve ne me pesait pas, je l’expérimentais sans douleur, seulement, il demeurait, occupait des coordonnées répétitives dans cet espace mental, un point, dans le cerveau, appuyé comme ces points noircis à l’infini sur les cahiers d’étude.
Depuis toujours le rêve me sert de dérivatif, j’y exprime ma violence sourde et frustrée, mes désirs contrariés, mes espoirs ou, ici, tout simplement, mes envies. Le rêve, comme l’écriture barbare d’ici, me retient, m’empêche, me console. Ce rêve protégeait maman qu’évidemment le récit affecterait, aucun parent ne reçoit ces témoignages sans pitié et, même, culpabilité, celle de n’avoir pas vu.
Longtemps, je m’abstins, dans le monde entier, d’en parler, refusant de me confondre avec ces événements, les taire, je le croyais, les niait. Ce silence donnait libre cours aux interprétations des autres, je prétendais, sans dire pourtant, qu’il existait une continuité avec ce moi au monde et celui antérieur. Un être, toujours du côté des forts, je croyais, que c’était les forts quand il s’agissait des brutes.
Je le cachais aux autres à cause de la honte, à cause de l’orgueil, ce faisant j’étais, au-dedans, un être disloqué, irréparable et contradictoire qui ne savait pas vivre. Maman, de lui cacher, jusqu’à aujourd’hui, valait de la protéger elle.
Mehdi, je m’en souviens, lorsque nous évoquions, en des termes généraux, le harcèlement scolaire s’imaginait, qu’à tout le moins, loin d’en être victime, je participais plutôt, plus ou moins activement, à la génération de ces dominations. Ma soeur, lorsque je le lui révélais, récemment, s’en étonnait aussi, puisque, disait-elle, tu ne dégageais pas ça.
Être dédouble, rendu duplice et falsificateur. Héritage invisible dont nous acquittons, toute la vie, les droits de succession. Servage infini.

La vie, elle me coûtait, onéreuse, payée, ma vie de ma substance, comme, je crois, tous les autres projetés dans cette condition. Ce mélange de haine, de détestation de soi-même, de lutte à la surface. 

Voltaire écrivait, nourrisson prématuré et rachitique, je suis né tué. Les adolescents harcelés, eux, se perpétuent, ainsi, longtemps du moins, tués. Les victimes de violence, de touts celles-ci, aussi, vivent tués.

Leur rapport au monde, longtemps, demeurera vicié sinon, même toujours, il s’agit moins, même, ou non pas seulement, de quelque chose de cassé mais plutôt d’un lien jamais formé. Il ne faut pas chercher la fracture dans la vie de ces individus il faut trouver l’absence, le non né et, parfois, ce qui fut mon cas, l’avorté. 

A l’inverse d’autres enfants harcelés je me suis, presque chaque fois, battu sans saisir que cette bataille n’aurait pas du se mener tête contre tête que, affublé de la honte, alourdie par elle, leur meilleur complice, je n’avais aucune chance. Je partais perdant parce que je ne fixais ni les règles, ni le lieu. Il s’agit ici moins d’un élément consubstantiel au harcèlement scolaire que d’un trait de personnalité. Lorsque, parfois, il faudrait renverser la table, ne plus respecter les règles, je m’en abstiens, je tente de tirer le meilleur de mon désavantage. Nous devrions, alors, nous abstenir de jouer.

Mon année de troisième, je découvris, la peur, la vraie peur terrible, interne, à l’époque, je redoutais le début de semaine sachant que, toujours, la torture recommencerait. Cette année là, la seule de ma vie, je cessai de lutter. La torture la nuit, le jour, à l’étude, tout devenait reproche, tout portait la négation, ma négation.

Le harcèlement empêche de se construire parce qu’il interdit au lieu de se former, la ligne naturelle où la personnalité s’affirme, où l’enfant devient adolescent puis adulte s’inscrit, au mieux, en pointillés. Nous ne mourrons pas. Nous ne naissons pas.

Moi, d’abord, ça a été la séduction qui m’a consolé, une séduction cruelle, une revanche générale sur ce qui affirmait, dans la règle des brutes, la véracité de l’homme. Si je possédais des femmes alors je valais quelque chose et mes douleurs antérieures n’étaient que la préface illisible de ma vraie vie. Je me trompais parce que je m’exprimais, alors, encore non comme un chef, un violent, mais comme celui, alors, brisé. Je me fabriquais sur de la poussière d’être. Marie-Anaïs, ensuite, me permit, lentement, de débuter mon être au monde, avec les affres, forcément, de toute naissance, tout commencement, surtout celui qui nous arrache de l’obscurité, aveugle et foudroie. Le Lamictal, ensuite, parce qu’il apaisait mon état mental, qu’il me donnait du calme. enfin, à nouveau, la séduction, plaire, plaire absolument aux filles très belles aux filles que moi je trouvais très belles et auxquelles je plaisais. Ca, oui, ça a été le terme de mon apparition au monde. Guéri ? Je l’ignore. 

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  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
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