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23 décembre 2012

Sachez la foudre par coeur

Ma tragédie débute si Aragon écrit «Elsa entre dans le poème», et salaud, Aragon, le dit.
Libre, Elsa glisse et danse du poème au réel ; inchangée dans l’encre ou dans l’amour. 

Mais toi du poème la gisante, toi sa prisonnière, toi engendrée dans lui, nourrie par lui. Toi à y pouvoir fleurir sans périr, toi. Ailes immobiles dans la volière. Toi captive semblable au regard sous tes paupières repliées -anémones paniquées sur l'infini.

Nous sommes de la même vérité, du même ciel. Mais le mien, sombre et glacé, cauchemar de janvier, plane, vautour lugubre ; mais le tien, doux juillet des chansons, bleu de l’amour brûle et pleure, l’Univers lui tient la main et les rossignols déraisonnent.

Le tutoiement de mes «je t’aime», t’entoure de ses doigts malades, dessine une ombre qui n’est pas l’ombre connue de ta chair mortelle et désirable et méprisable et aimée. Ce tutoiement, c’est toi mêlée de ma démence, toi fusionnée de rime et de chagrin, toi victorieuse de mon amour à moi.

Tu montes en moi, vacarme des marées, tu grimpes en moi, lierre assoiffé, tu prends au drame toutes les couleurs du mystère, voilà ton visage, arc-en-ciel de déraison. 

Mais si l’on m’annonçait ta mort demain ? J’y serais aussi indifférent qu’à ta vie réelle, ta vie fragile, ta vie insignifiante si je ne t'aime pas.

Dans mon existence intime, par chaque frémissement de mes tortures sensibles, tu deviens métamorphose des parfaits : la terre, le feu, le ciel, l’amour, et toi-même.

Je te sais depuis ton commencement, je t’ai faite de toute éternité ; soupirs et buées. 

J’ai pleuré à toutes tes naissances, à toutes tes blessures, à tous tes rires et à toutes tes fatigues. Je connais le goût de sueur de ta nuit. Ombre inexacte mastiquée par la lune, repue de soleil, trempée de lumière, tu vis en moi veillée des vertiges, première fois du regret.

Tu meurs en moi chaque jour. Tu prends toutes les formes imaginables, lumineuses et lugubres. 

Je sais le spectacle face au miroir, tous les matins, quand tu croises ton image ce reflet grandiose et insensé de lumière.

 

 

 

 

 

 

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  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
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