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27 novembre 2019

Traître à ta race

Dans l’escalier je guette les bruits
attendant plus fiévreusement
le livreur
qu’amant ou amante
le dédoublement




que suis-je devenu
souviens-toi la misère
enfant
le paquet de bonbons c’était toujours trop cher
Leader-Price
Maman voyant
sur le tapis roulant
le défilé des produits de marque
des autres
les français
elle disait comme ça
les français

malgré ses papiers d’identité
son passeport français
son permis français
la livraison 
maman disait
disait
ça doit coûter cher
maman
R. voyant ma veste
s'exclamait
ça doit coûter cher
comme un enfant il a dit
au moins 100 euros
ma veste à 700 euros
qu'est tu devenu
le poulet semi-moisi
du hard discount
un jour maman 
s’exclama
le poulet semi-moisi
c’est la dernière fois
comme dans ce vol
Air-Algérie
viande verdâtre
on nous disait
comme il existe le poulet
jaune
peut-être celui
vert après tout pourquoi pas
on pouvait tout croire
on nous apprenait à tout
croire.

Le petit F2 cité de l’Europe

jusqu’à 7 ans
dormir papa maman
yannis myriam moi
dans la même pièce


Trois-pièce dans le 9e
biscornu peut-être
avec une chambre en plus
un bureau


la machine à tirer l’argent
tu comprenais pas
que l’argent dedans
ce n’était pas gratuit
pas gratuit
pour nous
c’est sûr
(le découvert
MOINS 8000 francs
tu te rappelles
maman qui n’en peut plus
déjà enfant
tu commençais à comprendre
que tu étais pauvre)


aujourd’hui tu tires à l’envie
la machine c’est gratos
vérité infantile
tu confirmes
ta croyance de petiot
en un week-end tu claques
300 balles
Résidus de lyrisme - Page 6 Compte11

en boite de nuit
qu’est ce que tu es devenu
c’est ça ta vie
tu vois
verre
se remplir
se vider
piste de danse pareil
toujours le plus beau 
on te dit
ça
très belle lavallière
le plus beau
pas sûr


bizarre
les filles te sourient dans la rue
aujourd’hui
parfois se retournent
ces trois filles russes
comme cliché
vivant
dire
trois filles russes
comme pour
allégoriser
soudain
beauté moderne
(qui ne veut rien dire)
qui se retourne
(une seule)
mouvement de tête rapide 
deux fois
le sourire
pour toi
tu connais ce sourire
dans les films
ou les bars à strip-tease
où 
A.
bossait te racontait
le client mort-soûl
auquel
elle faisait les poches
au milieu du lap-dance
la mondaine
les flics
déguisés en client
demandant toujours
une pipe
dans l’espoir
peut-être
à la fois
de se faire sucer gratis
et d’augmenter leur taux
d’interpellation
la mise au jour d’un bordel illicite
Un jour t’as joué dans un film comme ça
tout le monde t’en parle
tu étais en slip dans l’une des scènes
Résidus de lyrisme - Page 6 Amour_11

tu n’es pas le plus beau
pas mâchoire carrée
ni bras d’hommes
pourtant
on se retourne
te demande
ton numéro
ça t’étonne
M. dit

t’es pas mal
puis t’es drôle
Avec L.
on disait

on fait un peu 
des high five à 
notre adolescence
tu vois 
c’est con qu’aujourd’hui
je m’en tape à un inexprimable point






tu avais jadis
des lunettes
petits yeux
elles te faisaient 
les lunettes
petit
chétif
mal sapé
muant à 16 ans
Grandissant d’un coup sec
1m85 sans gradation
comme ta vie
tout d’un bloc
tu dévales
tu ne sais pas si tu le dis
avec satisfaction
1m85
tu ne crois pas
c’est un fait
comme cheveux
bouclés
ça aussi
c’est ton charme




soudain 
on veut t’embrasser de force
dans les toilettes du sans-souci
puis on te frappe
quand tu dis non
tu sors
P. et V.
se foutent de ta gueule
toi tu es choqué
de t’être fait frapper
pour ça
Tu te dis pour calmer
ton coeur-chamade
Que les filles pfff
vivent ça 
le vivent
dans leurs corps réels
puis
dans leurs têtes fêlées


se défendent
dans la tête toujours
de ces extorsions
bien réelles
V. pour se faire pardonner
paye un long Island
14 balles quand même
Toi tu en prends deux autres
Tu en donnes un à une fille sur la piste
parce que tu as plus soif
elle te dit
tu as mis de la drogue dedans
tu reviens quelques lignes plus haut


Que les filles pfff
vivent ça 
le vivent
dans leurs corps réels
puis
dans leurs têtes fêlées


c’est vrai
se défendre toujours
sinon

J. t’a raconté hier sur la plage de Fécamp

le viol ce type qui l’a droguée
qui ne voulait pas partir de chez elle
qui a laissé sur sa table de chevet
200 euros en riant
il a évalué son crime son corps son plaisir
à deux cents euros
J. ne pouvait pas bouger
la drogue dissipée pourtant
J. ne pouvait plus bouger


j’ai pleuré
eu honte de pleurer
dit pardon
non représentant
les hommes
présentant
les excuses collectives de ma classe
eu honte de ne rien faire 
de plus que pleurer
(morale à peu de frais)
trop facile
pleurer
rentrer chez soi
ouvrir le frigo
mettre des glaçons 
dans son campari
soupirer
raconter à M-A
prendre la bouteille de champagne
dire tu en veux ?


qu’est ce que t’es devenu


qu’est ce que t’as peur
merde
du plaisir
que tu ressens
à l’épicerie italienne
quand tu blagues
avec le vendeur
qu’est ce que c’est que ça
ai honte
à nouveau
honte




tu as peur forcément de le dire avec un plaisir coupable
de moins en moins
tu arpentes trop sérieusement désormais
la rue des martyrs
ça t’effraie
tu trahis ta classe
tes parents
ça te fait peur
tu voudrais retrouver
ta colère d’antan
ne pas dire
« le caviste »
« le barbier »
« le pressing »
ne pas dire
ces mots des autres
qui n’étaient pas pour les immigrés
qui ne doivent pas être
pour nous ces mots
qui nous mettent
dehors
sauf quelques-uns
les Zineb
les Zora
les
toujours des femmes
si ça suffit pas
ça comme preuve


tu es devenu
français
tu t’es même mis à voter


Mélenchon certes
t’as voté quand même
jusqu’à 29 ans tu avais refusé
de t’inscrire sur les listes






mais ça commence par là
devenir ce qu’on hait
l’autre
tu étais
l’autre
devenant
l’autre
de l’autre
à force d’errances je suis devenu un autre et, cet autre lui-même, est devenu un autre.

alors ici tu prends conscience 
à ce moment là
de ce poème là
de ce que tu deviens
de ta transformation
tes chaussures à 600 balles
(volées, pour beaucoup
ça change rien)
tu déchires
ce que tu deviens
dans ce geste
pour rien
tu déchires
ce que tu crains
pour rien
tu gardes
intact
ce petit bout
ton prénom par quoi
personne ne t’appelle
(sauf papa maman frère soeurs)
Résidus de lyrisme - Page 6 Boudin11

tu gardes ça
tu l’accroches
le centre



 

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Commentaires
O
Qu'est-ce que je peux te kiffer... je retombe sur ce texte, il me touche encore...
Répondre
boudi's blog
  • une fleur qui a poussé d'entre les lézardes du béton, un sourire qui ressemble à une brèche. Des pétales disloqués sur les pavés à 6 sous. J'entends la criée, et le baluchon qu'on brûle. Myself dans un monde de yourself.
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